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Intervention de Anne Genetet

Réunion du mardi 11 juillet 2023 à 13h30
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne Genetet :

La commission d'enquête visait un double objectif : comprendre le fonctionnement des plateformes afin de l'améliorer ; analyser les faits révélés par les Uber files. Sur ce dernier point, nous avons été surpris car, alors même que nous étions ouverts aux potentielles révélations, aucun fait nouveau n'est apparu. Toutes les personnes auditionnées parlaient sous serment : aucune n'a fait de révélation ; personne n'a contredit les informations déjà contenues dans les Uber files. Lorsque vous sous-entendez dans votre propos introductif que certains ont menti sous serment, permettez-nous de ne pas être d'accord avec vous.

D'autre part, dès les premières lignes de votre synthèse, à la page 9, j'ai été frappée par votre tonalité militante. Vous l'avez répété à de nombreuses reprises : vous souhaitiez instaurer une présomption réfragable de salariat pour les travailleurs des plateformes. Aussi avez-vous mené, selon nous, les auditions en adoptant ce filtre, au service de votre obsession afin de valoriser votre idéologie. La rédaction est très militante, parfois outrancière, avec des mots très forts : « imposer », « mépris », « violer » ou « évasion ». Nous ne retrouvons pas là l'essence même du travail parlementaire. La teneur du rapport sur la commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères est bien différente, par exemple.

Ces auditions démontrent que, non seulement il n'y a pas de révélations, mais que des gouvernements successifs ont essayé de répondre à une demande des utilisateurs et proposé une création d'emplois – nous revendiquons de vouloir créer des emplois, et nous l'avons largement démontré. De même, elles n'ont pas révélé un quelconque conflit d'intérêts ni une quelconque contrepartie. Vous le sous-entendez en avançant : « Voilà ce que l'on peut comprendre. » Mais il n'y a pas à « pouvoir comprendre » ! Les faits sont les faits, nous n'avons pas à interpréter un récit. Ce n'est pas un roman mais une commission d'enquête. Depuis 2017, le Gouvernement, entendant les critiques et les doutes, a créé les conditions d'un dialogue social au sein des professions des plateformes.

Néanmoins, certaines ont des méthodes de travail qui laissent songeurs. Sans aucun doute, nous serions d'accord pour aller plus loin et trouver comment définir une meilleure protection sociale pour ces travailleurs et mieux lutter contre l'optimisation fiscale, différente de la fraude. Nous ne partageons pas pour autant le militantisme de votre rapport. Vous écrivez que : « Des entreprises ont pu, grâce à des moyens financiers colossaux et en toute connaissance de cause, braver la loi votée par les représentants du peuple pour implanter un modèle capitalistique d'externalisation de l'emploi destructeur du salariat et des droits des travailleurs, avec l'unique intention de réaliser un maximum de profit dans cette entreprise de sape des acquis sociaux de la solidarité nationale et des réglementations sectorielles. Elles ont trouvé des relais chez des personnalités politiques acquises à leur cause. » Cela reste à prouver ! Des gens les ont écoutées, comme on se doit d'écouter tout le monde. Ce que vous oubliez de dire et que nous voulons rappeler, c'est que nous sommes dans un État de droit, doté d'une justice qui fonctionne et qui, jusqu'à présent, n'a rien démontré de la culpabilité des uns ni des autres. On peut certainement améliorer le système mais nous refusons de laisser planer un doute sur des intentions.

Même si nous ne faisons absolument pas nôtres le ton de votre rapport ni votre objectif d'établir une présomption réfragable de salariat pour les travailleurs des plateformes, nous considérons qu'il faut que ce rapport soit lu. Aussi nous abstiendrons-nous pour exprimer le fait que nous sommes ouverts à sa publication, sans être d'accord avec son contenu.

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