L'importance pour les armées françaises de disposer de forces pré positionnées est bien comprise et elle trouve sa traduction dans la LPM, qu'il s'agisse des forces pré positionnées à l'étranger ou de nos forces de souveraineté dans l'ensemble de nos territoires, qui font l'objet d'un traitement particulier dans la LPM. Pour ce type d'opérations, si les forces pré positionnées permettent d'absorber le premier choc, il est toujours nécessaire de les renforcer par des équipements et des éléments particuliers que l'on ne pourrait, sauf à y consacrer énormément d'argent, laisser sur place en permanence. Je pense par exemple aux modules de chirurgie vitale, des équipements spécifiques qui doivent être entretenus et utilisés par nos chirurgiens et que l'on ne saurait laisser à l'année à Djibouti ou au Gabon. En revanche, nous tenons à être capables de renforcer ces bases rapidement et par anticipation, alors même que la décision politique et militaire n'est pas encore prise. C'est ce que nous avons fait dans ce cas : la décision a été prise le 22 avril mais nous avions commencé à projeter dès le 18 avril les compétences qui manquaient à l'état-major de Djibouti : des spécialistes de l'évacuation de ressortissants, des spécialistes du CAPCO de Lyon, des forces spéciales et des médecins. C'est ainsi que nous envisageons de reformuler la capacité de réponse d'urgence de nos forces armées : être en mesure de déployer très rapidement les petits modules nécessaires et hyperspécialisés pour renforcer les forces pré positionnées qui, connaissant leur environnement, peuvent négocier avec les autorités locales.
Pour ce qui est du transport stratégique, nous avons effectivement recours à des gros-porteurs Antonov, notamment pour les transports hors gabarit. Mais ce n'est pas un Antonov 124 que nous aurions posé à Wadi Seidna. Ces avions servent à transporter du gros matériel ou des équipements sensibles entre les théâtres d'opération et la métropole, pour des projections et des relèves d'hélicoptères, ou pour le transport de munitions. Nous aurions pu déployer directement, de la métropole jusqu'à Khartoum, des A400M, avions remarquables, je le redis, si nous avions eu la certitude que l'aéroport était ouvert, mais ce n'était pas le cas. L'énorme avantage stratégique de l'A400M est son allonge, qui nous permettait de faire l'aller-retour Djibouti-Khartoum-Djibouti sans refaire le plein. C'est crucial : si l'on va à El-Fasher, situé à 2 000 kilomètres de Djibouti, il faut pouvoir revenir sans devoir ravitailler sur place. Ces capacités, que nous avons développées depuis de nombreuses années maintenant, sont arrivées à maturité.