Vous prévoyez de décharger le juge de sa compétence en matière de saisie des rémunérations pour la transférer au commissaire de justice. Cette mesure gestionnaire risque d'aggraver les situations de surendettement car elle peut entraîner de lourdes difficultés financières pour des personnes se trouvant dans des situations le plus souvent précaires.
Nous partageons votre objectif d'accélérer les délais de jugement, que vous avez exposé lors de la présentation du projet de loi dans l'hémicycle, mais la recette est toujours la même : vous déchargez les juges. Le transfert au commissaire de justice d'une procédure qui a toujours été placée sous la protection du juge ne peut se faire qu'au détriment de la justice. Ce n'est pas une solution acceptable : la pratique démontre que la protection du juge en ce domaine est fondamentale car son contrôle est réel et utile. Confier ce contrôle au commissaire de justice a pour conséquence de priver les parties des garanties d'impartialité du juge, alors que le commissaire de justice, qui est mandaté par le créancier est, en quelque sorte, à la fois juge et partie. En outre, vous protégez les créanciers en leur donnant le privilège du préalable, qui est quasiment équivalent à celui dont dispose l'administration alors qu'il s'agit d'un rapport relevant du droit privé. En effet, rares seront les cas où le débiteur saisira le juge a posteriori.
Entre le fort et le faible, c'est pourtant la loi qui est censée affranchir, pour reprendre les mots de Lacordaire.