Madame la Première ministre, en toutes circonstances et ne vous en déplaise, la faillite du marché de l'énergie avait commencé avant la guerre en Ukraine. Ses conséquences sont vécues de plein fouet par les Français. En un an, les prix de gros de l'électricité sur le marché européen ont été multipliés par dix et ceux du gaz par vingt. Concrètement, les factures des Françaises et des Français augmenteront en moyenne de 200 à 300 euros par an. Alors, lorsque Emmanuel Macron évoque la fin de l'abondance au sujet des bouleversements énergétiques, comment ne pas voir l'impréparation flagrante dont votre Gouvernement s'est rendu coupable ? Cela fait plusieurs mois que Réseau de transport d'électricité (RTE) vous alerte, dans le vide, sur la sécurité de notre approvisionnement en énergie. Notre dépendance à un parc nucléaire vieillissant et à l'importation d'énergies fossiles ne date pas d'hier. L'exposition de ce parc à des problèmes de corrosion est connue depuis janvier 2022. Dès avril 2022, des pays européens ont pris des mesures : l'Italie limite la température dans les bâtiments publics, interdit les publicités lumineuses et réduit l'éclairage nocturne ; l'Allemagne conçoit un plan de sobriété et annonce la nationalisation de son premier producteur gazier – tandis qu'en France, c'est seulement en juillet que le mot « sobriété » affleure à la bouche du Président de la République.
Madame la Première ministre, la situation internationale ne saurait dessiner elle-même un modèle d'action à suivre. Ce que vous faites à chaque étape de la période de chaos et de pénurie que nous connaissons, ce sont des choix politiques. La guerre en Ukraine ne peut servir d'argument commode pour dissimuler les dysfonctionnements du marché et votre allégeance à la logique néolibérale qui le guide. Baisser l'indemnisation des chômeurs, raboter les retraites, refuser d'augmenter les impôts sur les plus riches…