Avec la déclaration de guerre de la Fédération de Russie à l'Ukraine et la violation du territoire de celle-ci par l'armée russe le 24 février, l'impensable est revenu en Europe. Par cet acte, la Russie a enfreint toutes les règles du droit international et bafoué les valeurs de paix et de liberté sur lesquelles le continent européen a construit son équilibre depuis plusieurs décennies.
Depuis ce 24 février, le peuple ukrainien se bat sans relâche pour préserver son indépendance et sa démocratie. Les forces ukrainiennes ont ardemment résisté, privant les autorités russes d'une victoire rapide. Le courage des Ukrainiens force le respect. L'objectif de la prise de Kiev a été abandonné et l'armée russe a été contrainte de se regrouper à l'est et au sud du pays. La récente contre-offensive ukrainienne dans les régions de Kharkiv et de Kherson a permis de reprendre une part importante du territoire.
Mais si le peuple ukrainien peut espérer et entrevoir un avenir de paix préservant sa démocratie et son indépendance, c'est aussi grâce à l'action résolue du Président de la République, de la France et des Européens.
Oui, dès le début du conflit, nous avons fait preuve de fermeté et réaffirmé nos valeurs.
Agissant avec fermeté, nous avons montré, face aux mensonges du pouvoir russe et à ses menaces contre la sécurité internationale, que nos institutions sont fortes et peuvent réagir rapidement. Par une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies, une large majorité des pays du monde a ainsi condamné l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Dès le début du conflit, l'Ukraine a pu bénéficier d'une aide financière, militaire et humanitaire.
Nous avons également réaffirmé nos valeurs, qui ont d'ailleurs été rappelées à la communauté internationale par le Président de la République lui-même lors de son allocution aux Nations unies le 20 septembre dernier. Un ordre international fondé sur la défense des droits humains, le respect de la souveraineté de chacun et une coopération renforcée : tels sont les principes fondateurs du système multilatéral, seul garant de la paix.
Le Président de la République a également réaffirmé, lors de cette intervention, le choix diplomatique, partagé avec nos partenaires européens, de mettre fin à la guerre sans devenir belligérant.
Il s'agit de mettre fin à la guerre, pour le peuple ukrainien.
Nous devons en effet à celui-ci de mettre fin à la guerre et à une crise humanitaire aux conséquences dramatiques. De nombreuses infrastructures ont été touchées et les bombardements des zones de conflit font constamment de nouvelles victimes. Déjà plus de 5 000 civils, femmes, hommes et enfants, ont été tués, arrachés à leur famille et à leurs proches.
Les exactions sont nombreuses. Les images du massacre de Boutcha, le bombardement d'une maternité à Marioupol et la découverte de fosses communes aux abords d'Izioum rappellent les heures les plus sombres de notre histoire. Toute la lumière devra être faite sur ces crimes, en particulier dans le cadre de l'enquête ouverte par la Cour pénale internationale.
Mettre fin à la guerre, c'est aussi un gage de stabilité pour notre continent.
À cet égard, le discours prononcé vendredi par Vladimir Poutine, son ton messianique et violemment antioccidental nous démontrent qu'il ne reculera, hélas, devant rien.
Mais nous ne devons pas pour autant être des belligérants. Le peuple russe ne nous le pardonnerait pas. Nous ne pouvons entrer en guerre contre un peuple victime d'un régime autoritaire, qui l'isole du reste du monde et le mobilise de force dans un conflit d'un autre temps. Il est primordial de poursuivre le dialogue avec la Russie, comme tente de le faire la France. Il s'agit là d'une condition essentielle pour rétablir durablement la paix sur le continent européen.
Ma conviction est que le refus de la belligérance ne nous condamne nullement à l'impuissance.
Avec ses partenaires européens, la France a imposé à la Russie de multiples sanctions, qui sont efficaces. Elles ont en effet privé le régime de ressources majeures pour financer et approvisionner son effort de guerre. Les importations de la Russie ont chuté, des composantes essentielles de son industrie d'armement sont manquantes et son matériel militaire, devenu défectueux, est souvent à l'abandon au bord des routes, sur le front.
J'entends dire, ici et là, que ces sanctions seraient plus dures à supporter pour les Français que pour les Russes. Il s'agit d'un mensonge malheureusement répandu au moyen de campagnes de désinformation successives. Non seulement ces sanctions fonctionnent à l'endroit du régime russe, mais leur effet sur l'économie française reste marginal. D'une part, parce que la crise alimentaire et économique que nous subissons n'est pas due au seul fait de la guerre en Ukraine et de ses conséquences, d'autre part, parce que les promesses du Président de la République pour protéger le pouvoir d'achat des Français ont été tenues.
Au-delà de leurs mensonges, les autorités russes et leurs relais médiatiques entretiennent un climat de terreur par des chantages abjects portant sur notre souveraineté et notre sécurité collective.
Chantage énergétique, d'abord, en jouant avec la dépendance des pays européens au gaz russe.
Chantage alimentaire, ensuite : les blocus en mer Noire ont durablement affecté les marchés céréaliers mondiaux, aggravant la crise alimentaire en Afrique, où la France est directement engagée dans des opérations de stabilisation et de développement.
Chantage nucléaire, enfin, d'un régime acculé qui n'a d'autre solution que de rappeler au monde sa capacité destructrice ultime.
Nous aurons toujours à cœur d'écouter, de comprendre et de répondre aux préoccupations des Français. Mais, face au chantage des autorités russes, nous ne céderons pas. Ni au chantage énergétique ni au chantage alimentaire, et encore moins au chantage nucléaire.
Pour autant, et je le répète, notre combat n'est pas et ne doit jamais être dirigé contre le peuple russe.