La contemporanéisation des APL a eu un effet positif. Malgré les interrogations qu'elle a pu susciter, cette méthode est la bonne – si la première année pouvait présenter des risques, elle s'est plutôt bien déroulée. La loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat l'a complétée d'une augmentation de 3,5 % des APL. Elle continuera à être un élément important du soutien aux plus modestes.
Grâce au plan « logement d'abord », 440 000 personnes ont quitté la rue pour un logement. Évidemment, cela ne fonctionne pas comme un vase communicant immédiat. C'est pourquoi il a fallu préserver les 200 000 places d'hébergement d'urgence, compte tenu du contexte migratoire et de la fragilité socio-économique actuels. Ce sont presque 6 millions que nous dépensons chaque soir – au total, les crédits du programme 177 représentent 3 milliards, contre 1 milliard les années précédentes.
Vous le savez, le Président de la République et la Première ministre souhaitent présenter dans les prochains mois un plan « logement d'abord 2 », avec une ambition renforcée. Ce plan ne fonctionne que si l'on est capable d'accompagner les plus fragiles avant, pendant et après leur accès au logement.
D'abord, à travers la production de logements qui correspondent aux besoins – résidences sociales, pensions de famille, PLAI. Le Premier ministre Jean Castex avait fixé pour objectif d'avoir au moins une pension de famille dans chaque quartier de gare du Grand Paris. Nous continuons de suivre ce dossier avec la société du Grand Paris et les différents aménageurs pour que cet outil utile que sont les pensions de famille permette d'héberger les plus fragiles.
La décentralisation a été annoncée, dans la feuille de route de la Première ministre et, plusieurs fois, par le Président de la République. Un chantier doit être mené sur ces questions, s'agissant notamment du logement.
L'objectif est de produire davantage là où il y en a le plus besoin. Nous y travaillons avec les associations d'élus, qui sont généralement d'accord avec cet acte de décentralisation, même si les élus d'intercommunalités, de départements ou de métropoles ne partagent pas toujours la même vision.
Nous sommes dans une phase de crise et j'ai été certainement l'un des premiers à parler de « bombe sociale », dans une interview au Parisien, en novembre 2022. Il y a urgence à produire plus et à comprendre les raisons de la baisse de production. S'il y a une responsabilité partagée, comme l'est l'acte éducatif, c'est bien celle du logement.
Nous devons aujourd'hui travailler sur une décentralisation utile car, avant les élections municipales, on a vu des élus locaux refuser certains projets et programmes, en vertu de l'adage, souvent faux, selon lequel un maire bâtisseur est un maire battu. Il en a résulté une baisse de production de logements et les années covid n'ont pas amélioré la situation. Par la suite, certains candidats ont été élus en expliquant qu'ils ne relanceraient pas la production. Plusieurs territoires, notamment quelques grandes métropoles, n'ont pas retrouvé les niveaux de production d'avant les élections municipales, ce qui est fâcheux.
Un travail est donc mené dans le cadre du CNR logement, pour atteindre l'objectif de construire plus là où les besoins sont les plus importants. Je crois en ce travail partenarial : il faut redonner aux maires l'envie de construire. En tant qu'ancien maire, je connais les injonctions paradoxales auxquelles les élus sont soumis. Dans les zones pavillonnaires, par exemple, les pétitions se multiplient lorsque des promoteurs commencent à installer un projet. Mais ceux-là mêmes qui les signent se retrouvent parfois dans d'autres dispositions, s'ils ont l'occasion de vendre leur bien à un bon prix aux promoteurs. C'est un sujet sur lequel il faut progresser.
Je crois que la décentralisation est utile. Sur les politiques, de rénovation thermique notamment, elle pourrait nous aider à aller plus vite dans certains cas, mais cela demande aussi à être travaillé. Je crois à l'idée de donner le pouvoir aux élus locaux dans le cadre des autorités organisatrices de l'habitat (AOH), par une contractualisation gagnant-gagnant. Le chantier est devant nous.
Allouer 15 millions à l'Anru en 2022 était suffisant mais ce n'est pas l'ancien président de l'agence qui contredira Nicolas Sansu sur le besoin d'inscrire 50 millions en 2023. Il faudra continuer : l'État devra tenir son engagement d'allouer 1 milliard de crédits sur toute la durée du nouveau programme national de renouvellement urbain. L'ensemble des programmes de l'Anru ont été examinés en comité d'engagement. Nous sommes dans une phase de réalisation, donc de versements plus élevés, ce que nous devons poursuivre.
Concernant les adultes relais, 5 000 postes en rotation suffisent, compte tenu du temps, souvent long, de recrutement, ainsi que des entrées et des départs. Dans le cadre du plan Quartiers 2030 et des bataillons de prévention, nous avons engagé une réflexion sur les contraintes, parfois fortes, liées à ces postes. Le niveau d'études ou l'âge des candidats ne convenant pas toujours, nous réfléchissons à élargir les critères d'éligibilité pour les adultes relais.
J'ai annoncé que le dispositif des cités éducatives était prolongé pour trois années supplémentaires. C'est un dispositif auquel nous croyons. Nous devons veiller à ce qu'il ne devienne pas un tiroir-caisse supplémentaire de la politique de la ville. Il doit conserver son ambition, celle de sortir des silos pour faire travailler ensemble tous les acteurs éducatifs – éducation nationale, collectivités territoriales, associations.
Le chantier des futurs contrats de ville est en route. Pour mener à bien cet engagement pour 2030, j'ai confié à Mohamed Mechmache une mission sur la participation des habitants dans la construction des contrats de ville. Je n'ai aucun doute sur le fait que ces contrats doivent se construire à l'échelle des quartiers, non à Paris, quelles que soient les compétences qui s'y trouvent. On a trop souvent connu une politique de la ville définie en trois, quatre ou cinq piliers, qu'il fallait satisfaire sans quoi on n'obtenait pas de subvention. Je préfère que chaque ville, chaque territoire se concentre sur sa ou ses priorités et que nous travaillions sur cette base.
Les préfets ont reçu de l'Insee des propositions de zonage fondées sur la loi Lamy de 2014 et prenant en compte les critères de revenus et de population. Ils ont pour consigne de travailler avec souplesse avec les élus des communes et des intercommunalités pour définir le zonage le plus compétent à budget constant. À ce stade, des quartiers entrant dans le dispositif, d'autres en sortant, la population globale paraît s'équilibrer – du moins, nous y travaillons.
J'ai par ailleurs demandé que chaque subvention du nouveau programme national de renouvellement urbain soit vérifiée. De nombreuses grandes associations en bénéficient ; je souhaite aussi, et surtout, aider les petites associations, celles qui agissent au quotidien dans les territoires. Tel est l'objet du travail que je souhaite mener dans chaque territoire.
Outre la capacité à construire plus, il y a plusieurs objectifs à tenir. Avec Éric Lombard et la Caisse des dépôts, nous avons travaillé à un programme de relance et d'accompagnement des projets d'investissement qui sont aujourd'hui à l'arrêt : il concernera 17 000 à 20 000 logements, pour 3,5 milliards environ. Il s'agit d'une action de soutien non à tel ou tel promoteur mais à la production de logements intermédiaires et sociaux afin que, dans des territoires en tension, des projets qui avaient déjà obtenu un permis de construire mais restaient sans acquéreur puissent démarrer rapidement. Les ventes de logements neufs ont en effet diminué de 40 % entre le premier trimestre de 2022 et celui de 2023. C'est la quadrature du cercle, et cela a commencé par une baisse de l'offre. À mon arrivée au Gouvernement, les promoteurs se plaignaient de n'avoir pas assez à vendre car on ne leur avait pas permis de construire assez de projets, à cause des élections municipales et de la crise sanitaire. Aujourd'hui, nous sommes dans une crise de la demande, mais les deux s'autoalimentent car plus les produits à vendre sont rares, moins les demandeurs potentiels ont de possibilités d'acquisition.
Nous devons donc travailler avec la Caisse des dépôts, avec Action logement et avec les banques, ce que nous faisons, avec Bruno Le Maire. Nous demandons à ces dernières d'utiliser toute leur capacité de souplesse, notamment en matière de durée d'endettement, pour limiter les refus de crédits : les dérogations auxquelles elles ont droit pour prêter de l'argent n'atteignent que 13 % à 14 % des prêts, alors que la marge de flexibilité prévue est de 20 %.
Nous travaillons aussi à prolonger le prêt à taux zéro, un dispositif d'autant plus vertueux que nous sommes dans une période de taux élevés. Outre ces mesures d'urgence, il y en aura d'autres sur les problèmes liés au foncier. Il faut travailler sur le bail réel solidaire d'activité et les offices fonciers solidaires pour mieux les accompagner et leur permettre de baisser le prix du foncier.
Sur la question des copropriétés, notamment dégradées, et de l'habitat insalubre, j'ai confié une mission à Mathieu Hanotin et à Michèle Lutz, la maire de Mulhouse, dont les propositions viendront compléter les vôtres pour alimenter un éventuel projet de loi sur l'habitat insalubre.
Enfin, nous travaillons avec le garde des sceaux et le ministère de la justice à assouplir les règles des copropriétés, en respectant la gouvernance et la démocratie en son sein. Cela est nécessaire si l'on veut développer les programmes de réhabilitation, notamment thermique des copropriétés. Il n'est pas possible que les propriétaires-bailleurs qui disposent d'un grand nombre de tantièmes en assemblée générale votent contre certains travaux et bloquent les capacités d'une copropriété à se rénover.