Le 24 février dernier, jour de l'invasion, j'avais ici même employé les termes de « guerre culturelle » et d'« anti-Europe ». Je voudrais y revenir pour commencer mon intervention. Je représente les Français d'Europe centrale, aux premières loges de ce conflit, mais je représente aussi le Franco-Allemand, le Franco-Allemand profond, ancien et en plein renouveau, le Franco-Allemand solide, le Franco-Allemand citoyen.
Il y a bientôt quatre-vingts ans, les ruines étaient encore fumantes. Au sortir de l'horreur, des villes entières avaient encore faim et froid l'hiver. La région de la Sarre était encore française, et devait l'être douze ans de plus, en proie à des tensions communautaires parfois violentes. Le Bade-Wurtemberg n'était pas allemand, mais une zone d'occupation. C'est alors, dans ce contexte de tensions, que ces ennemis héréditaires qu'étaient la France et l'Allemagne, en un contre-pied génial au déterminisme et aux nationalismes étriqués, fondèrent la Communauté européenne du charbon et de l'acier, un modèle unique de réconciliation par le faire-ensemble, sur les terres belligènes de notre chère Europe.