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Intervention de Johnny Hajjar

Réunion du jeudi 1er juin 2023 à 14h05
Commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la constitution

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJohnny Hajjar, rapporteur :

Le coût de la vie a des réalités structurelles et conjoncturelles, et M. Mélin-Soucramanien a rappelé le poids de l'histoire. Mais il faut s'attaquer à ce problème sur le fonds. Pour moi, les institutions doivent être au service d'un modèle de développement qui permet la démocratie économique, qui permet de libérer l'initiative locale, qui permet le contrôle. Il n'y a pas que les prix, parce que s'il faut réduire le chômage dans nos territoires, qui est historiquement supérieur par rapport à des contraintes structurelles, d'éloignement, d'insularité et d'exigüité du marché intérieur, il y a des potentialités de développement qui font la force de la France. Aujourd'hui, la question des institutions se pose, notamment à travers l'appel de Fort-de-France porté par Serge Letchimy et les autres présidents de collectivités.

Le droit doit s'adapter à la réalité et ce n'est pas à la réalité de s'adapter au droit. Néanmoins, je pense que dans sa Constitution, dans sa codification, la France a toujours cherché à adapter la réalité des territoires au droit français et non l'inverse. On voit bien que la conséquence, c'est le mauvais développement de nos territoires, avec de la pauvreté, de la précarité, le conservatisme d'un modèle économique centralisé avec des oligopoles et des monopoles, et le poids de l'histoire.

On revient à la question centrale de l'égalité des droits et, je suis d'accord, à celle de sortir de la question de l'uniformité. Nous ne cherchons pas à ressembler à un blond aux yeux bleus, nous cherchons à avoir des droits égaux et donc des niveaux de vie qui se rapprochent de ceux des territoires de la République.

Les déterminants qu'on a trouvés sur le coût de la vie, c'est le niveau du revenu, c'est le niveau des prix qui fait le pouvoir d'achat, mais c'est aussi toute la partie du fonctionnement des institutions et des collectivités, qui sont des moteurs de développement. C'est aussi la partie de l'État qui est un investisseur dans nos territoires. Quand on conjugue ces quatre paramètres  niveau de revenus, niveau des prix, interventionnisme des collectivités locales, interventionnisme de l'État , l'idée n'est pas de se séparer de l'un ou de l'autre ; c'est de permettre, dans le respect de nos différences, de maintenir un niveau d'égalité des droits.

Que pensez-vous de l'idée de pouvoir conjuguer l'égalité des droits et le droit à la différence ? Je vous rappelle que nous sommes tous ici égaux humainement, en dignité et en humanité, mais nous sommes tous différents par nos réalités physiques, nos histoires de vie, etc. Donc, conjuguons-nous, même naturellement, le droit à l'égalité et le droit à la différence ? Sauf que ce n'est pas codifié. Effectivement, l'idée est de sortir d'un modèle 73/74. On a deux costumes, soit l'un, soit l'autre. Et aujourd'hui, on voit bien qu'on est arrivé à des limites. Parce que c'est une logique politique pour pouvoir aller vers un nouveau modèle de développement qui va améliorer le niveau de vie et le niveau de revenus, diminuer la précarité, le chômage, la pauvreté et libérer l'initiative locale.

Êtes-vous d'accord pour conjuguer les deux ? Comment faire pour que l'égalité des droits ne soit pas l'ennemi du droit à la différence ? Aujourd'hui, malheureusement, dans la codification française, soit on est dans l'un, soit on est dans l'autre. Nous ne pouvons pas avoir les deux en nous alors que nous les avons naturellement. Je parle de mal-développement, qui est une conséquence du poids de la loi française dans la limitation des possibilités de développement de nos territoires.

La deuxième question est celle de la superposition avec les lois européennes. La France a beau jeu de regrouper des territoires géographiquement éloignés les uns des autres dans un pôle dit outre-mer, avec toutes les différences que cela augure. Cela ne se traduit pas aujourd'hui dans nos capacités d'initiatives et de responsabilités locales. Quel est selon vous l'impact des lois européennes qui viennent s'adosser aux lois françaises et qui viennent finalement écraser et annihiler toute capacité d'initiative locale de ces territoires ? Leur enjeu serait de pouvoir déjà créer de la richesse localement à partir de la conjugaison de l'action de l'État, des collectivités, mais aussi de l'initiative privée.

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