Vous avez raison de dire que le coût du logement est élevé. C'est l'éternelle question dans les outre-mer. Comme nous sommes à la fois des départements et des régions européennes, nous devons respecter un certain nombre de normes tout en sachant que ce n'est pas indispensable s'agissant de la construction telle qu'on la faisait traditionnellement. Auparavant, on montait sa case, qui tenait plus ou moins. Pour les logements collectifs, il faut faire davantage attention.
Il est vrai que les aides aux organismes en charge du logement sont importantes. En outre-mer, nous avons la fameuse « ligne budgétaire unique » (LBU), à laquelle sont très attachés les Ultramarins. Il faut aussi parler des rémunérations, qui sont ce qu'elles sont. Il faudrait inventer des modalités innovantes. Par exemple, nous avions soutenu la possibilité de faciliter l'accession à la propriété de logements pas totalement finis en sachant que de nombreuses personnes sont habiles de leurs mains. Par conséquent, si vous livrez déjà l'espace et le gros de la construction, la personne peut terminer le chantier par elle-même. Nous pourrions essayer d'innover dans ce domaine.
Quand je vois que les niveaux des loyers sont au niveau des métropoles urbaines de l'Hexagone, je suis un peu étonnée. On a beau dire, le prix de l'immobilier n'est pas encore au niveau des grandes villes de la métropole, et je ne suis donc pas totalement convaincue par ce niveau aussi élevé des loyers.
Concernant l'eau potable, nous avons hérité d'une situation qui était une situation antédiluvienne. Je crois que l'opérateur était la Générale des eaux. L'entretien des réseaux n'a pas été effectué pendant de longues années, ce qui oblige à tout refaire. La difficulté pour pouvoir repartir de bon pied était liée au fait que l'eau était une compétence des collectivités locales et notamment des communes. Donc, avoir un opérateur central pour pouvoir organiser les choses et faire passer les prêts permettant de lancer les travaux s'est avéré très difficile. En tant que responsable, je pouvais les réunir et les inciter à adopter des structures communes, mais sans rien pouvoir imposer. Il a fallu, après plusieurs années, que la loi soit changée pour mettre en place une structure responsable. Nous avons perdu beaucoup de temps. Pour moi, très attachée à la décentralisation, il y a quand même cette impression d'échec, car les élus locaux ne sont pas arrivés à se mettre d'accord dans l'intérêt des populations.
Vous avez mentionné les indivisions. Certaines situations qui ne sont pas réglées depuis des générations. C'est terrible parce que des gens se retrouvent quasiment spoliés. Si une famille a hérité d'un terrain de six hectares, une bonne partie de la propriété disparaît après une période de trente ans à force de céder de petits bouts au fil des ans.
On a mis beaucoup en cause les notaires lors de notre visite. J'ai cru comprendre que cela ne leur rapportait pas suffisamment, mais il me semble aussi que les familles ne sont pas non plus pressées de régler les sujets. Il faut parfois prévoir des frais pour le généalogiste, il faut retrouver les membres de la famille depuis trois générations qui sont éparpillées aux quatre coins du monde. Les notaires ne sont donc pas les seuls à mettre en cause.
La surrémunération des fonctionnaires est un sujet connu. On en parle depuis longtemps. Quelques élus ont décidé de prendre position sur sa suppression. Par exemple, l'ancien président du conseil régional de La Réunion, Paul Vergès, avait indiqué très clairement qu'il était favorable à la suppression de cette surrémunération. Maintenant, il faut que le ministre soit prêt à s'attaquer au sujet et à affronter les vagues qui risquent d'en découler.
Supprimer la surrémunération est une chose, mais il faut en même temps traiter l'attractivité. Dans certains endroits, supprimer la surrémunération les rendra encore moins attractifs. Il faut aussi, peut-être parallèlement, mettre sur pied des politiques proposant davantage de formations de cadres locaux. C'est sans doute ce qui permettrait de pallier ces questions d'attractivité. Louis le Pensec a baissé, il y a quelques années, le taux de surrémunération des médecins de 40 % à 25 %. Aujourd'hui, le nombre de médecins est insuffisant et on parle de réaugmenter la surrémunération. Nous pouvons aussi penser que si l'on développe la formation des médecins sur place, ce sera peut-être aussi une manière de régler ce problème. Malheureusement, nous n'avons pas de clé miracle.
Dans notre mission de Défenseur des droits, nous sommes étonnés de voir que des enfants peuvent passer sous les radars, arrêter d'aller à l'école sans que personne ne les cherche, malgré l'obligation scolaire. Nous avions proposé de déployer des médiateurs de rue pour se rapprocher des jeunes et s'enquérir de leur situation. À Mayotte, les Apprentis d'Auteuil assurent l'accueil de jour pour les jeunes qui sont dans la rue. La démarche permet de les réinsérer dans une forme d'activité de vie. Il me semble que ce travail vers les enfants des rues pourrait être une manière d'avancer.
Il y a aussi tous les mécanismes à mettre en place pour que les jeunes retournent en formation ou dans des emplois aidés. Nous avions lancé pas mal de choses, mais je crois que c'est encore insuffisant. Ce serait à développer. Il faut aussi mentionner le rôle des associations pour aller vers ces jeunes en difficulté. Mais si on va les chercher, cela signifie qu'il faut prévoir des structures adaptées ; on ne peut pas se contenter de leur demander de retourner à l'école où ils ne souhaitent plus aller. Peut-être que nous sommes peut-être encore un tout petit peu légers sur ce point. Nous savons que le problème n'est pas lié à un manque d'enseignants. D'autres méthodes méritent d'être proposées pour retrouver ces enfants qui ne se plaisent pas à l'école.