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Intervention de Walid Chaiehloudj

Réunion du mercredi 17 mai 2023 à 14h00
Commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la constitution

Walid Chaiehloudj, professeur des universités, co-responsable du centre du droit économique et du développement de l'université de Perpignan, membre non permanent de l'Autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie :

L'Autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie est très défavorable aux mesures de régulation de marché parce qu'elles posent la difficulté de l'absence de concurrence. Quand le gouvernement accepte une demande de régulation, une demande « stop », c'est-à-dire que l'on interdit l'importation d'un produit, on a mécaniquement une absence de concurrence sur le marché et des prix très élevés. On a en plus des phénomènes de pratiques illicites. Pendant un temps, en Calédonie, on avait contingenté le Nutella et tous ceux qui revenaient de métropole avec ce produit le revendaient au marché noir. Il s'ensuivait des phénomènes assez délétères.

Nous sommes très défavorables à ces questions, puisqu'elles ne permettent pas de dynamiser la concurrence et incitent l'opérateur local à augmenter ses prix et proposer des produits sur le marché qui ne sont pas forcément de qualité. J'ai l'exemple de certaines denrées alimentaires produites en Nouvelle-Calédonie de très mauvaise qualité parce qu'on avait autorisé une telle démarche. Je me souviens de l'affaire des tuyaux. Un fabricant de tuyaux bénéficiait d'une mesure « stop » jusqu'en 2019. L'Autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie s'était montrée offensive, en considérant que ce n'était pas une bonne mesure parce qu'elle ne dynamisait pas la concurrence. Le Gouvernement a finalement accepté une demande de mesure de taxation, consistant à taxer davantage les tuyaux concurrents. On a reçu finalement des engagements très forts de la part de l'acteur qui avait baissé ses prix, ce qui avait permis d'installer une concurrence sur le marché.

D'autre part, une problématique concerne les pays ultramarins, liée au fait qu'on est très attaché au continent européen. On veut que les produits viennent d'Europe. La Nouvelle-Calédonie est un pays et territoire d'outre-mer (PTOM), sans taxe douanière sur les produits provenant d'Europe. En revanche, des taxes s'appliquent aux produits qui viennent de Nouvelle-Zélande et d'Australie. Vous imaginez très bien que le coût d'approche de ces deux pays, à deux heures de la Nouvelle-Calédonie, est mécaniquement inférieur, avec un impact potentiel sur la vie chère par la possibilité de ne pas taxer des produits issus des pays voisins. Là aussi, il faudrait peut-être, même pour la Martinique et la Guyane, accepter d'avoir des produits qui ne sont pas forcément des produits européens, mais qui sont des produits équivalents et vendus un petit peu moins cher. Je pense qu'il faut mener un vrai travail sur la fiscalisation des produits non européens. Évidemment, c'est une question très politique, qui dépend du Gouvernement.

Je crois que vous n'avez pas évoqué l'article L. 410-2 du code de commerce, consacré à la liberté des prix. Ses alinéas 2 et 3 permettent au gouvernement d'intervenir sur les prix pendant six mois en cas de circonstances exceptionnelles ou lorsqu'un intérêt général se niche. La commission doit savoir qu'en cas d'exagération sur certains territoires, le gouvernement peut procéder par décret. Il est vrai que la démarche porte atteinte à l'économie de marché, mais elle peut aussi permettre de diminuer les prix pour un temps.

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