Je vous ai dit qu'il fallait peut-être élargir le seuil des 5 millions d'euros pour contrôler toutes les concentrations, et pas seulement celles du commerce de détail en outre-mer. J'ai une autre proposition qui pourrait intéresser vos travaux. Nous n'avons pas parlé de l'injonction structurelle. Lorsqu'une entreprise se trouve en position dominante et que l'on décèle des pratiques de prix suspectes, l'Autorité peut imposer une cession d'actifs, notamment dans des groupes d'entreprises.
Le texte précise à ce titre : « en cas d'existence d'une position dominante d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises qui soulève des préoccupations de concurrence du fait de prix ou de marge élevés, en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur économique concerné ». Nous avons un problème avec ce texte, inapplicable en Nouvelle-Calédonie. L'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), émet des statistiques en France, et à l'échelle calédonienne, nous avons l'Institut de la statistique et des études économiques (ISEE), qui n'a pas les moyens de faire ces analyses. Nous ne pouvons savoir de quelle manière les prix ont évolué dans les différents secteurs ni quelles marges réalisent les entreprises. Ce texte est intéressant car il est très fort, son résultat pouvant être d'imposer une cession d'actif, mais il est impossible à mettre en œuvre en l'absence de ces informations.
Vous avez entendu parler du règlement européen du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique ou digital market act, relatif aux contrôleurs d'accès, qui doivent notifier certaines informations à la Commission européenne. Sur le même modèle, nous pourrions bâtir une législation pour les outre-mer qui imposerait aux opérateurs importants du marché de procéder chaque année à un relevé des prix et de leurs marges en vue d'une notification. L'Autorité de la concurrence pourrait ainsi voir si l'évolution des prix et des marges est suspecte. Il serait alors possible de relever les préoccupations de concurrence et les adresser à l'entreprise. Cette dernière devrait démontrer que les augmentations de prix sont liées à des phénomènes de marché, comme la guerre en Ukraine. Cette démarche permettrait de voir aussi que certaines entreprises augmentent les prix de manière un peu arbitraire et dans ce cas intervenir. Il serait ainsi possible d'éliminer une difficulté, celle de l'accès aux informations. L'Insee et l'Isee n'étant pas en capacité aujourd'hui de produire des statistiques sur tous les secteurs.