Intervention de Walid Chaiehloudj

Réunion du mercredi 17 mai 2023 à 14h00
Commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la constitution

Walid Chaiehloudj, professeur des universités, co-responsable du centre du droit économique et du développement de l'université de Perpignan, membre non permanent de l'Autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie :

Une idée m'est venue en écoutant Me Genty. Nous n'avons pas parlé de la faute lucrative. C'est un gros problème parce que le droit de la concurrence, parfois, ne réprime pas assez, si bien que certaines entreprises ont des stratégies de violation de la loi. Parfois, il est plus malin de ne pas respecter le droit de la concurrence aux fins de réaliser un chiffre d'affaires conséquent. Par la suite, si on reçoit une amende même de 10 % du chiffre d'affaires sur les quatre ou cinq années, on l'a vite thésaurisée, on n'a pas de difficulté pour rendre rentable cette violation de la loi. On pourrait aussi réfléchir à la question de comment on peut dépasser tout cela. En Calédonie par exemple, je trouve que c'est encore pire qu'en métropole, puisqu'on a 5 % du chiffre d'affaires en termes d'amende, alors qu'à l'échelle nationale, c'est 10 %.

Le moyen pour les outre-mer aussi de tordre le cou aux entreprises qui se dirigent vers ces pratiques-là, c'est de rendre attractif ce qu'on appelle l'action en réparation d'un dommage concurrentiel ou private enforcement. On a d'un côté la mise en œuvre publique du droit de la concurrence et, de l'autre côté, la mise en œuvre privée du droit de la concurrence. Qu'est-ce la mise en œuvre publique ? C'est lorsqu'une autorité de concurrence décide de sanctionner et d'infliger une amende à une entreprise. L'entreprise est sanctionnée pour le dommage provoqué à l'économie. L'amende part dans les caisses de l'État ou de la collectivité ou du territoire lorsque c'est la Calédonie. Sauf que le préjudice subi par l'entreprise n'est pas réparé. C'est ici qu'intervient la mise en œuvre privée. L'entreprise doit saisir le juge – on appelle cela une action en responsabilité – pour voir le préjudice concurrentiel réparé.

Nous n'avons pas cette culture de la réparation privée dans les outre-mer. Seule l'Autorité de la concurrence, soit locale, soit nationale, sanctionne les pratiques. Si on avait des entreprises qui saisissaient le juge, on aurait d'une part une amende et d'autre part la réparation du préjudice. Là, on a quelque chose qui est quand même beaucoup plus dissuasif que la simple mise en œuvre du droit de la concurrence par l'Autorité.

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