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Intervention de François Braun

Réunion du mardi 2 août 2022 à 21h00
Commission des affaires sociales

François Braun, ministre :

Il s'agit du rapport que j'ai écrit ; je le prends donc pour moi.

Vous dites qu'après minuit, la permanence des soins n'est plus assurée dans beaucoup de territoires. Faut-il rappeler qu'elle l'est, en soirée – avant minuit – et en fin de semaine, dans 98 % d'entre eux ? Bien évidemment, les 2 % qui restent sont préoccupants et nous y concentrons nos efforts. Quant aux prises en charge après minuit, croyez-en mon expérience de près de quarante ans, elles relèvent soit du conseil médical, soit des urgences. Les interventions qui n'appelleraient qu'une simple consultation médicale sont rares, même si je ne nie pas l'existence de cas particuliers, notamment la délivrance de certificats de décès. Vous proposez de rendre obligatoire la permanence des soins. Entendons-nous bien. Je suis d'accord pour imposer une obligation collective de permanence des soins dans l'ensemble du territoire, le soir et en fin de semaine, mais je ne crois pas aux obligations individuelles. Nous prendrons les mesures nécessaires pour placer les acteurs face à leurs responsabilités.

J'ai participé à la réforme du mode de financement des structures d'urgences. Le résultat me semble exemplaire : nous avons introduit de nouveaux critères pour ne plus tenir compte de la seule activité. Ainsi, la dotation populationnelle permet de mieux répondre aux besoins, et si la part de financement à l'activité n'est pas abandonnée, celle dédiée à la qualité et à l'efficacité augmente.

Le FPU de 19,61 euros est bien inférieur à ce que payaient nos concitoyens, d'autant qu'il est souvent pris en charge pour les plus fragiles par l'assurance maladie, sans parler des mutuelles. Surtout, les patients payaient, au titre du ticket modérateur, des sommes qui approchaient les 150 euros lorsqu'il fallait facturer une consultation de spécialiste, une prise de sang, un scanner. Simplement, ils ne s'en rendaient pas compte. Le FPU est une mesure d'équité pour que tous les patients puissent être correctement pris en charge.

Monsieur Valletoux, la conférence des parties prenantes s'inscrit dans le cadre du Conseil national de la refondation qui devrait être officiellement installé début septembre par le Président de la République. Elle reposera sur deux piliers : une approche globale de la santé – prévention, dépistage, soin et suivi – et la restauration de l'éthique au cœur de notre métier – que signifie être soignant en 2022, en 2025 ou en 2035 ? Nous sommes dans la phase de préparation qui devrait se poursuivre jusqu'à la fin du mois d'août. Des discussions bilatérales ont été engagées. J'ai d'ailleurs eu le plaisir d'échanger avec vous puisque vous présidez la Fédération hospitalière de France. Ce travail devrait faire émerger les principaux sujets transversaux qui seuls intéresseront la conférence – ainsi, la gouvernance de l'hôpital, qui ne concerne qu'une partie du secteur de la santé, ne sera pas traitée. Nous tiendrons compte également des contributions écrites que nous recevons depuis six mois.

Cette étape sera suivie d'une phase durant laquelle nous interrogerons nos concitoyens selon deux modalités : une consultation numérique et l'organisation de débats dans les territoires. Je compte sur les élus pour mener ces discussions en y associant les soignés. En effet, le triptyque soignant-soigné-élu est d'une importance primordiale. On ne peut plus continuer à parler de notre système de santé sans installer les patients autour de la table. Cette phase, qui devrait durer un mois, nous permettra de recueillir les informations qui enrichiront la fameuse boîte à outils qui me tient à cœur. Une fois celle-ci constituée, nous la présenterons aux acteurs des territoires. Si nos propositions ne leur conviennent pas, nous les modifierons. Début 2023, la boîte à outils devrait être achevée et nous pourrons définir un calendrier. Je compte sur les ARS pour faciliter l'application des mesures. J'ai pu constater, au cours de mes déplacements, que les solutions originales ne manquaient pas mais qu'elles sortaient parfois du cadre réglementaire. Mon objectif n'est pas de les transformer pour les rendre compatibles, mais d'élargir le cadre pour leur permettre de perdurer.

Madame Garin, la santé environnementale est au cœur de nos réflexions. La transformation du Conseil scientifique en Comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires témoigne de l'approche « Une seule santé » que nous souhaitons adopter, inscrite dans le décret qui fixe le cadre et les missions de ce comité. Ce dernier travaillera en collaboration avec des vétérinaires et des climatologues pour nous préparer à affronter l'ensemble des risques sanitaires, en particulier environnementaux.

Un service d'urgences a fermé à Lyon, en effet, pour une journée. Si mes souvenirs sont bons, il s'agit d'un service privé. L'activité a été reportée sur les deux autres services d'urgences, dont celui de l'hôpital Lyon Sud. Cette situation n'est pas rare. Lorsque la fermeture est anticipée, les services voisins peuvent absorber la surcharge de travail. C'est l'une des propositions de la boîte à outils pour cet été.

Tout le monde déplore l'attente aux urgences ; c'est oublier qu'en cas d'urgence, on n'attend pas ! Lorsque vous arrivez aux urgences, vous êtes reçu dans les sept minutes en moyenne par une infirmière d'accueil et d'orientation, qui est une professionnelle aguerrie et qui a reçu une formation spécifique. Si vous êtes victime d'un infarctus, vous passerez avant les autres. Si vous souffrez d'un traumatisme à la cheville depuis quatre semaines, vous risquez d'attendre longtemps. C'est ce que nous voulons éviter en orientant les patients en amont.

Je n'ai pas entendu parler du problème survenu aux Sables-d'Olonne mais, puisque je me rends demain à Nantes, je me renseignerai. Si un enfant en détresse a attendu devant une porte fermée, c'est inacceptable.

Monsieur Dharréville, réguler la demande de soin d'un patient n'est pas une solution dégradée, au contraire. C'est une méthode moderne qui s'adapte à la pathologie des patients. En revanche, envoyer tout le monde aux urgences sans discernement, s'en remettre totalement à ces services comme s'il n'y avait plus de médecine de ville serait un mode dégradé. Je ne sais pas ce que vous entendez par « mesurettes libérales ». En tout cas, il n'est pas très libéral de s'appuyer, comme nous le faisons, sur l'hôpital public. Assurément, certaines de nos mesures concernent nos collègues libéraux, mais vouloir résoudre le problème de l'hôpital sans accepter de travailler avec les médecins libéraux serait perdu d'avance. Nous avons simplifié l'avenant 9 à la convention médicale relatif à la valorisation de la participation des médecins libéraux à la régulation médicale, dont l'extrême complexité était dénoncée. Les premiers résultats, qui ne sont pas des « statistiques taillées sur mesure », sont encourageants. Nous sommes d'accord pour donner des moyens aux urgences, à condition de ne pas oublier les autres.

Monsieur Colombani, je suis défavorable à la réintégration des personnels non vaccinés. Les scientifiques eux-mêmes le déconseillent, qu'il s'agisse du Conseil scientifique dans son dernier avis, de l'Académie nationale de médecine, de l'Ordre national des infirmiers ou de la Haute Autorité de santé. Cependant, le texte que vous avez voté prévoit la possibilité de saisir cette dernière si la situation évolue. Le problème n'est pas seulement scientifique, il est aussi éthique. Je rends d'ailleurs hommage aux soignants qui se sont fait vacciner car ils ont tenu la première ligne – croyez-moi, j'en sais quelque chose.

Le forfait de réorientation des urgences, ce n'est pas payer pour ne pas être soigné. Il s'agit d'indemniser le temps passé par l'infirmier à réorienter le patient. Pour l'éviter, il suffit que le patient, avant de se déplacer, contacte son médecin traitant ou le 15.

En ce qui concerne les mesures incitatives pour la médecine générale, j'ai parlé de la majoration de 15 euros pour un acte relevant de la régulation médicale. Quant au déplafonnement du recours à la télémédecine, c'est une mauvaise idée sauf si vous voulez donner beaucoup d'argent à des entreprises qui se spécialisent dans ce mode de consultation en employant des médecins qui ne font rien d'autre et qui, demain, seront basés à l'étranger. Nous avons limité à 40 % la part de la télémédecine dans l'activité du médecin afin de garantir que le praticien qui reçoit virtuellement est compétent et qu'il a l'habitude de soigner des patients.

Nous pourrons discuter de la situation en Corse, mais la problématique des CHU est complexe : devenir un CHU n'est pas la solution miraculeuse pour attirer des professionnels. Les CHU jouent un rôle dans l'enseignement et la recherche ; ils disposent d'unités de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM). Une solution intermédiaire pourrait être des postes universitaires territoriaux, financés par l'hôpital et les fonds territoriaux. Dès lors que les candidats répondent aux exigences universitaires, l'ouverture de postes est facile. C'est une étape intéressante et éprouvée pour des structures qui souhaitent devenir universitaires.

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