Monsieur le ministre, nous vivons en mode dégradé depuis longtemps. La feuille de route que vous vous êtes concoctée en prend acte et elle institue ce mode dégradé en solution. Les urgentistes que je rencontre, qui chaque jour font des miracles, ne voient là rien de miraculeux. Vous avez, paraît-il, beaucoup conseillé le Président de la République. Il faut reconnaître que ce n'est pas votre action de ministre qui a fabriqué cette situation, mais bien le choix répété de compresser les dépenses de santé, de supprimer des lits à l'hôpital public, de refuser de former les médecins dont nous avons besoin et de ne pas embaucher comme il le faudrait : des politiques libérales, en fait.
Il ne faut pas se contenter de traiter les symptômes, il faut traiter la cause. Or, vous n'en prenez pas le chemin. Il n'y a pas de solution dans la direction que vous suivez. Alors même qu'il eût fallu des impulsions fortes, vous avez recouru à des mesurettes libérales pour l'été, prenant acte de la pénurie et des fermetures de services, au nom de la mutualisation, et vous contentant, au lieu de mesures directement destinées aux urgences, de jouer sur la régulation en limitant l'accès à celles-ci. Vous envoyez aux personnels hospitaliers des contre-signaux décourageants. Vous aurez sans doute des statistiques taillées sur mesure pour démontrer les bienfaits de cette politique mais, dans les services d'urgences, cela ne passe pas. Tandis que la puissance publique demeure timide face aux déserts médicaux, les soignants et les lits manquent toujours autant. Vous ne ferez pas disparaître les patients. Ils sont dans les couloirs et ils attendent des heures durant. Le personnel hospitalier n'en peut plus de détourner le regard faute de pouvoir faire autrement. De nombreux instruments manquent dans votre boîte à outils, notamment des lits, et il y a besoin d'ouvrières et d'ouvriers. Allez-vous véritablement, comme annoncé, mettre fin à vos renoncements ? Que prévoyez-vous pour donner aux urgences les moyens de faire face ? Pour la suite, quel est votre plan ?