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Intervention de Général d'armée Christian Rodriguez

Réunion du mercredi 27 juillet 2022 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général d'armée Christian Rodriguez :

Monsieur Warsmann, vos travaux législatifs ont été salutaires, mais tout n'est pas complètement aligné. Un problème de formation des enquêteurs, mais aussi des magistrats, se pose à cet égard. Les saisies progressent néanmoins chaque année. Je rêve que nous puissions en dresser un catalogue, au sein duquel nous pourrions commander ce qui répond à nos besoins. Un garde républicain m'avait ainsi fait la demande d'un tracteur saisi : j'ai pu le lui fournir en un mois. Je pense comme vous que c'est ainsi que la gendarmerie « fait mal » aux truands. Aujourd'hui, 1 100 à 1 200 véhicules saisis sont déjà conduits par des gendarmes, et je souhaite intéresser les régions de gendarmerie à aller plus loin en ce sens.

Le photovoltaïque suppose un investissement de départ. Or, l'administration a du mal à investir, et nous manquons de budget pour entretenir correctement notre patrimoine domanial. Il est plus simple de payer un loyer aux collectivités lorsqu'elles se chargent des constructions. Néanmoins, le photovoltaïque fait partie des moyens d'économies d'énergie envisagés en conséquence de la guerre en Ukraine.

Aucune difficulté de recrutement des gendarmes adjoints volontaires en sortie d'école ne m'a été remontée. Les effectifs théoriques définis sont pourvus. Il est cependant difficile d'anticiper les départs. Le taux de chômage étant plutôt bas actuellement, les gendarmes adjoints volontaires souhaiteront probablement davantage devenir des gendarmes, et partiront sans doute moins avant la fin des six ans que par le passé. Aujourd'hui, un candidat sur trois est sélectionné au concours de gendarme adjoint volontaire, contre un sur six à sept pour le concours de sous-officier. Ce taux de sélection est satisfaisant. Il pourrait être amélioré, mais les gendarmes adjoints volontaires constituent déjà ainsi une bonne part du recrutement des gendarmes d'active.

Réaliser des statistiques actuellement en matière de sécurité routière est difficile, car seules des années atypiques viennent de s'écouler. De plus, les statistiques de décès actuelles concernent des accidents survenus en 2021. Même si le nombre de personnes au volant a diminué durant la crise sanitaire, la dangerosité des comportements au volant a augmenté. La gendarmerie ne relâche pas ses efforts dans ce domaine. La déléguée interministérielle à la sécurité routière est très volontaire également. La généralisation de l'installation de boîtes noires sur les nouveaux véhicules devrait dissuader les comportements à risque. La prévention ne suffit malheureusement pas, et il faut continuer à déployer des gendarmes sur les axes les plus dangereux.

Le SAELSI, désormais nommé « service de l'achat, de l'innovation et de la logistique du ministère de l'intérieur » (SAILMI), comprend des gendarmes et des policiers, mais ne dépend plus des directeurs généraux de la police nationale (DGPN) et de la gendarmerie nationale (DGGN), mais du secrétaire général du ministère, ce qui fonctionne plutôt bien cependant.

Il faut 5 à 6 ans pour construire une brigade. Dans l'attente, les 200 brigades seront créées de manière très souple, dès 2023. Il suffira que les mairies leur fournissent des bureaux. Des logements et garages pourront ensuite être loués, le temps d'entreprendre les constructions. Nous savons « bricoler » de cette manière, avec l'aide des élus.

La répartition des créations de postes entre la police et la gendarmerie ne dépend ni du DGPN ni du DGGN, qui décident seulement de la répartition des postes qui leur sont octroyés. Nous disposons à cet égard d'un outil indiquant quelles zones sont en sous-effectifs. En Bretagne, par exemple, la croissance de la population a été plus importante que celle des effectifs de gendarmerie, ce qu'il faudra réussir à rattraper.

Le taux de suicide dans la gendarmerie correspond à celui de la moyenne nationale alors que chaque gendarme dispose d'une arme à son domicile, ce qui ne doit cependant pas occulter le fait que chaque suicide constitue un échec. Plusieurs dispositifs ont été mis en place pour les prévenir. Avoir logé les gendarmes avec leurs familles dans les casernes facilite la détection des signaux faibles par les camarades, les chefs, les psychologues, les médecins militaires et la concertation, composée de gendarmes élus pour représenter les gendarmes. Nous faisons en sorte que toutes ces personnes se parlent, malgré le secret médical, pour alerter sur les gendarmes qui se sentiraient moins bien. Intégrer à un algorithme tous les cas de passage à l'acte a également permis de leur trouver des déclencheurs inattendus. Les notes attribuées aux gendarmes notamment, qui sont subjectives et peu utiles, seront supprimées en conséquence de cette enquête.

Une décision juridique a été prise concernant l'application de la directive temps de travail (DTT) à la gendarmerie départementale, malgré son statut militaire. Nous l'appliquons. Le repos est indispensable notamment pour prévenir les risques psychosociaux. L'État-major a quant à lui toujours appliqué la DTT, sauf exception. Toutefois, il comprend de moins en moins de gendarmes, et de plus en plus de personnels civils ou du corps de soutien.

Par ailleurs, la DTT prévoit 24 heures de repos par semaine et 4 semaines de vacances par an, tandis qu'un gendarme dispose de 48 heures de repos par semaine et 9 semaines de vacances par an. Les gendarmes peuvent toutefois se reposer moins de 48 heures par semaine en cas d'enquête importante à mener (comme dans le cas des incendies récents), mais pas toutes les semaines. Aller plus loin supposerait de revenir sur le statut militaire des gendarmes pour en faire des policiers. Pour conserver les capacités de montée rapide en puissance de la gendarmerie tout en appliquant strictement l'ensemble des mesures de temps de travail, nous avons calculé qu'il faudrait 40 000 gendarmes supplémentaires.

L'EOGN évolue. Ses pôles ont été réorganisés. Le coût de sa rénovation a été évalué à 224 millions d'euros, dont 52,2 millions d'euros de crédits de paiement entre 2023 et 2027. Une première enveloppe de 23,7 millions d'euros nous a été accordée à la faveur du Beauvau de la sécurité. Sont notamment prévus prochainement un stand de tir mutualisable, un parcours de stress, un stade, un gymnase et différentes simulations destinées à soutenir l'enseignement.

Lors d'un déplacement dans le Tarn, le Président de la République a indiqué que la répartition et la typologie des 200 brigades seraient décidées en concertation entre les élus locaux et les préfets, ce qui me paraît la meilleure méthode. Je dois en parler cette semaine avec le ministre. La gendarmerie ne décidera pas, elle précisera seulement les flux actuels de circulation de la délinquance, et les types de brigades disponibles (qui sont extrêmement divers).

La distribution très large d'armes en Ukraine actuellement pose en effet problème. La directrice d'Europol m'a ainsi indiqué que des passages d'armes par des délinquants avaient très rapidement été détectés en Pologne. La frontière ukrainienne est toutefois très surveillée par l'ensemble des pays, et un suivi est réalisé sur place. J'ai encore abordé cette question hier avec le directeur de la police lettone. Il est difficile par exemple de faire passer des lance-roquettes discrètement.

Je découvre cette augmentation du taux de divorce de 42 % à 62 % en 2020, que je suis incapable d'analyser immédiatement. Je l'examinerai, et je vous ferai un retour.

Le détachement d'une garde républicaine équestre à Marseille est définitif, sauf si les élus estiment n'en avoir plus besoin. Je suis même prêt à examiner d'autres demandes et à y répondre. Je souhaite augmenter le nombre de nos postes à cheval. Un nouveau sera créé à Deauville cet été. Dans le Grand-Est, nous créons un tel poste au moment des vendanges. Au milieu des vignes, ces brigades peuvent voir loin et sont très dissuasives. Elles sont très utiles également pour les incendies. Elles permettent aussi de faire évoluer les carrières des cavaliers.

La spécialisation de la délinquance est un vrai problème. Nous y avons répondu par la création d'offices supranationaux, couvrant la police comme la gendarmerie, et qui répondent chacun à un contentieux. Or, les truands pratiquent de plus en plus plusieurs types de trafics simultanément. Ma conviction est donc qu'il faut davantage croiser les compétences, pour disposer d'unités capables de faire du cyber, comme de traquer le blanchiment d'argent, même de la drogue, en blockchain et en cryptomonnaie. Cela suppose une évolution de la doctrine.

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