La zone indo-pacifique est un sujet clé. Voilà un sujet sur lequel il faudrait qu'il y ait un débat au Parlement parce que je sens bien que dans la manière dont on en parle, tout le monde y met des choses très différentes.
Il s'agit d'abord de notre souveraineté puisque des territoires d'outre-mer appartiennent à l'axe indopacifique. Au-delà de l'évidence géographique, nous avons noué des grands partenariats et des amitiés profondes avec beaucoup de pays de la zone. Il ne s'agit pas uniquement de coopérations industrielles ou militaires. Il y a des grands pays qui regardent la France comme la Malaisie, l'Indonésie, l'Inde. Par ailleurs, cet axe présente d'autres enjeux de sécurité. Nous n'avons pas prononcé une seule fois le nom de Corée du Nord. Je pense évidemment à nos alliés de Corée du Sud et du Japon. Réaffirmer la présence française dans cette zone passe par le déploiement, dans les années qui viennent, des six patrouilleurs outre-mer (POM).
La prochaine LPM doit être l'occasion de mener une réflexion spécifique sur la défense, par l'armée, des ZEE, réclamée notamment par Wallis-et-Futuna. Les réserves halieutiques sont soumises à pression – des flottilles de pêche s'aventurent dans les eaux territoriales. Nous devons maintenir l'effort qui a permis, il y a cinq ans – j'étais alors secrétaire d'État à l'écologie –, l'arraisonnement des blue boats qui pêchaient illégalement dans la ZEE calédonienne.
Les territoires d'outre-mer doivent faire face à la prédation, qu'il s'agisse des terrains fonciers ou des fonds sous-marins. Les enjeux sont nombreux, y compris dans le domaine environnemental et climatique. La question des câbles est clé, elle touche à la souveraineté. Je pense aussi à la protection des peuples autochtones et de l'autorité coutumière des différents pays d'Océanie. Les défis sont de taille. Certes, il est ardu de tenir cet agenda en même temps que ceux qui nous occupent en Afrique et en Ukraine, mais en même temps, c'est la vocation universelle de la France.
Ainsi que le Président de la République l'a expliqué, l'Alliance atlantique doit rester euro-atlantique. La manière de structurer les choses en Asie doit se faire avec l'ASEAN, avec les pays de la zone. Ce serait une erreur historique que de regarder ce qui se passe dans l'Indo-Pacifique avec un œil euro-atlantique, sans les pays du Pacifique.
Nous n'avons pas tous les mêmes convictions quant à l'appartenance de la France à l'Alliance atlantique, mais un consensus existe entre les différentes formations politiques françaises sur le fait que l'organisation doit être cantonnée à ce à quoi elle était destinée. C'est pourquoi la France, avec d'autres pays membres, a réaffirmé l'identité profonde de l'OTAN. S'il est vrai que le nouveau concept stratégique évoque la Chine, il faut faire attention à ne pas tout mélanger. Nous devons aussi expliquer à nos compatriotes le sens et l'utilité de ces alliances.
J'en viens aux moyens dont bénéficient nos armées. J'ai dit que la fidélisation constituait un défi majeur : si des postes manquent, ce n'est pas parce qu'ils ont été fermés budgétairement – ils sont reportés d'année en année – mais parce qu'ils n'ont pas été pourvus. La difficulté consiste moins à recruter qu'à fidéliser les personnes, dans le cadre de carrières plus longues au sein des armées. Du reste, le même constat s'impose s'agissant des réserves. On se donne des objectifs élevés, les parlementaires votent des enveloppes importantes, mais il faut, en face, trouver suffisamment de réservistes.
Je réfute les annonces alarmistes, parues dans la presse, sur les capacités de défense de la France en cas d'attaque, et notamment ce qui a été prétendument extrait du rapport Thiériot-Mirallès, sur un stock de munitions qui ne permettrait pas de tenir plus de deux semaines.