C'est tout de même assez extraordinaire : notre justice enquête sur les soupçons de corruption dans l'attribution au Qatar de l'organisation de la Coupe du monde de football, manifestation qui sera protégée par notre propre police ! Si l'on replace les choses dans leur contexte politique et international, c'est étonnant, pour ne pas dire bizarre. Si jamais la justice affirme qu'il y a eu corruption, nous serons, avec cet accord, complices ; nous nous mettons dans une situation problématique.
Se posent en outre la question des morts au travail et celle du respect des droits de l'homme et de la personne. Au Qatar, comme dans plusieurs autres pays musulmans, on n'a pas le droit de boire de l'alcool. Et, jusqu'à preuve du contraire, on n'a pas le droit de faire l'amour en dehors du mariage. Comment ces règles seront-elles appliquées à l'occasion d'une manifestation internationale ? Y aura-t-il des caméras de surveillance dans les cabines des paquebots et dans les vestiaires ? La police française sera-t-elle chargée d'évaluer ces situations ?
D'une manière générale, il faut se poser la question de l'organisation des manifestations sportives dans des lieux adaptés. Les sujets environnementaux, notamment la climatisation, sont sérieux. Si j'étais humoriste, j'ironiserais : « Après la Coupe du monde de football au Qatar, bientôt la Coupe du monde de ski dans un pays du Golfe ! »
Marie-George Buffet, ancienne ministre des sports, a proposé que l'attribution des grands événements sportifs et culturels relève d'une commission internationale indépendante, et non des fédérations, dont les représentants sont soumis à la pression des sponsors et aux intérêts financiers. Cela garantirait que le gagnant est toujours le sport ou la culture, non la finance. Les parlementaires communistes continueront à défendre cette proposition.
Nous aimerions évidemment que tous les pays du monde soient à égalité : au nom de quoi certains d'entre eux auraient le droit d'organiser des manifestations sportives de haut niveau, et d'autres non ? Toutefois, la protection de la planète doit primer. Plutôt que de confier la tenue des Jeux olympiques à un État donné, on en viendra peut-être à les organiser à l'échelle mondiale, chaque pays accueillant telle ou telle épreuve en fonction de son environnement, de ses capacités et de ses compétences.
La dernière fois que notre commission a été sollicitée pour que notre police apporte son aide à un État étranger, c'était pour contribuer au maintien de l'ordre en Tunisie. Nous savons ce qu'il en est advenu. Cette coopération avait été proposée par Michèle Alliot-Marie, qui faisait là-bas des affaires. J'ose espérer que notre pays n'a pas, avec le Qatar, des relations de même nature.