Intervention de Éric Dupond-Moretti

Séance en hémicycle du jeudi 6 juillet 2023 à 15h00
Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027 — Article 3 bis b

Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Je disais donc que j'étais fier que cet amendement soit déposé au texte que je défends et que la France, pays des droits de l'homme, a vocation à l'universalité, un principe qui nous honore tous. Je n'oublie pas le rôle qu'a joué dans ces travaux le sénateur Jean-Pierre Sueur, ni celui de Cécile Untermaier.

Monsieur Gouffier Valente, votre amendement vise à modifier l'article 689-11 du code de procédure pénale, qui fixe les conditions dans lesquelles la justice française est compétente pour juger des actes de torture, des crimes contre l'humanité ou des crimes de guerre lorsque les faits ont été commis à l'étranger et que ni leur auteur ni les victimes ne sont français. Vous proposez de supprimer la condition de double incrimination pour l'ensemble des crimes contre l'humanité et des crimes et délits de guerre ; en effet, il ne paraît pas souhaitable de contraindre ainsi la compétence des juridictions françaises pour juger de tels crimes, en réalité universels. Cette disposition permettra en outre de se prémunir contre les éventuels revirements jurisprudentiels à venir, car nous en avons déjà récemment connu plusieurs en la matière. Votre proposition permet au législateur de stabiliser une jurisprudence dont on peut dire objectivement qu'elle a fluctué.

En second lieu, votre amendement prévoit de préciser la condition de résidence habituelle en incorporant dans la loi l'interprétation souple qu'en a faite la Cour de cassation dans un arrêt du 12 mai dernier. La résidence habituelle doit être appréciée en prenant en considération un faisceau d'indices permettant d'établir un lien de rattachement suffisant avec la France. Celui-ci peut notamment résulter de la durée, actuelle ou prévisible, ainsi que des conditions et des raisons de la présence de l'intéressé sur le territoire français, de la volonté manifestée par celui-ci de s'y installer ou de s'y maintenir ou encore de ses liens familiaux, sociaux, matériels ou professionnels.

L'amendement de M. Gouffier Valente ainsi que les deux identiques confortent la compétence des juridictions françaises pour connaître des crimes contre l'humanité et des crimes et délits de guerre commis à l'étranger. Le Gouvernement émet un avis très favorable sur ces trois amendements qui semblent tout à fait opportuns et sollicite par conséquent le retrait des autres amendements de la discussion commune.

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