S'agissant de l'autonomie stratégique et de la politique commerciale, j'ai dit hier à notre homologue américaine, l'ambassadrice Tai, qu'il était temps de revoir nos relations internationales, sans naïveté, pour assurer la sécurité des chaînes d'approvisionnement, au besoin en faisant jouer les rapports de force. Le fonctionnement d'un accord bilatéral n'est pas forcément garanti quand tout va mal – je vous renvoie à l'anecdote relative aux vaccins.
C'est un vaste chantier, je ne vous le cache pas, compte tenu de l'évolution géopolitique du monde. Nous existons dans ce monde parce que nous sommes un continent et que nous sommes unis et forts ensemble. Il nous faut traduire cette unité et cette force dans nos relations commerciales, pour décourager toute tentation d'utiliser les dépendances que l'on crée lorsque l'on ouvre une voie commerciale. Nous avons donc décidé d'intégrer cette dimension totalement nouvelle dans nos relations commerciales internationales. Le chantier est ouvert.
La souveraineté alimentaire est aussi un élément essentiel de notre souveraineté. Nos agriculteurs, qui se débattent déjà avec le réchauffement climatique et les problèmes d'eau, doivent être accompagnés dans la transition. Ces sujets sont actuellement discutés par les colégislateurs – donc le Conseil et le Parlement européen –, auxquels il revient de se prononcer sur les moyens de le faire. Ce n'est pas le rôle de la Commission.
On met beaucoup de choses dans les investissements directs étrangers – lorsque j'étais ministre des finances, j'ai eu un peu de mal à m'y retrouver, au début. On y met aussi bien les investissements immobiliers que les investissements financiers et industriels. Il est donc utile d'étudier les IDE de façon plus segmentée, ne serait-ce que pour les suivre. Tous les investissements sont les bienvenus, mais tous n'ont le même impact sur l'économie ou l'industrie.
Avec ma collègue Margrethe Vestager, nous avons défini de nouveaux instruments de filtrage très performants et plus efficaces pour limiter ces IDE s'ils sont contraires aux intérêts européens. Ils existent depuis peu, il faut maintenant les rendre actifs. Un autre point essentiel est que les contraintes environnementales et sociales que nous nous fixons sur le marché intérieur s'appliquent à toutes les entreprises qui contribuent à la fabrication du produit, d'un bout à l'autre de la chaîne de valeur. J'y attache une grande importance. Il y a aussi la question des standards, qui est bien plus large que le seul aspect technologique et couvre aussi les obligations que nous nous imposons, en particulier en matière environnementale. Un travail en la matière reste à réaliser, qui va dans le sens du filtrage des IDE que vous appeliez de vos vœux.
Je ne connais pas la réglementation canadienne que vous évoquiez, mais je vais m'y intéresser. Il est possible qu'elle ait un lien avec la politique d'immigration choisie du Canada, qui se traduit par une forte hausse démographique et donc l'augmentation des besoins en logements.