Au début de l'année, les Américains ont voté l' Inflation Reduction Act, qui leur permet de soutenir leurs entreprises à grands coups de commandes publiques et de subventions : l'Union européenne pousse des cris d'orfraie en découvrant qu'un pays peut être souverain et protéger son industrie. Disons-le, elle est prise au dépourvu, elle patauge et certains évoquent, en réponse, un Buy European Act, que nous attendons toujours.
Si nous n'avons toujours pas d'équivalent au Buy American Act ou au Small Business Act, c'est parce que le droit de la concurrence de l'Union européenne nous étouffe. Nos règles de commande publique rendent très difficile, voire impossible, pour l'État de prioriser des acteurs nationaux ou européens. Les investissements étrangers profitent de règles laxistes : si une entreprise extra-européenne souhaite racheter une entreprise française, l'État ne peut s'y opposer que si cette dernière figure sur la liste des secteurs stratégiques dressée par le décret Montebourg. Cette logique restrictive l'empêche donc de protéger les autres entreprises. Enfin, le contrôle des concentrations freine la possibilité pour les grandes entreprises européennes de monter en puissance en ne leur permettant pas de se constituer en géants.
Résultat : nous sommes incapables de rivaliser avec les grands acteurs américains et chinois dans de trop nombreux domaines. Dans le numérique, par exemple, vous répétez votre volonté de créer des Gafam européens. Parfait ! Mais avec ces règles absurdes, comment espérer contrer Amazon ou Google, qui se sont construits sur la commande publique, sur des monopoles ?
À quand un droit de la concurrence qui protégera et privilégiera les entreprises européennes, et qui donnera aux États la possibilité d'orienter leurs commandes publiques uniquement vers des acteurs européens ? Quand l'Union européenne cessera-t-elle enfin d'être aveuglément soumise à l'idéologie de la concurrence libre et non faussée ?