Nous sommes très heureux de pouvoir procéder à cette audition importante, à un moment où notre stratégie de reconquête et de souveraineté industrielles porte ses fruits en France et en Europe. L'inauguration, cette semaine, d'une gigafactory française de batteries pour les véhicules électriques en témoigne. Au côté du Président de la République, le 11 mai dernier, vous aviez vous-même parlé de véritable « mutation de la doctrine européenne sur l'industrie ». La réindustrialisation décarbonée est à l'œuvre partout sur notre territoire et c'est une très bonne chose.
La situation politique l'exige, alors que les rapports de force économiques entre puissances ne cessent de s'exacerber : aggravation des tensions commerciales, accélération de la course aux matières premières critiques, mesures déloyales faussant la concurrence au prétexte de politiques industrielles. Chacun le voit désormais, parmi les Européens : l'économie est un instrument de souveraineté et de puissance et l'Europe doit y prendre toute sa place, sans naïveté. C'est le sens de l'action que vous menez avec la Commission, en lien avec le Parlement européen et les parlements nationaux.
Dans la compétition stratégique mondiale, l'échelon européen est bien le plus pertinent pour consolider notre souveraineté industrielle. Ceux qui, en 2017, fustigeaient la volonté de souveraineté européenne en évoquant une utopie française voient bien que, partout en Europe, le changement est en train de s'opérer, y compris chez nos amis allemands – le chancelier, à l'occasion de son discours de Prague, a plaidé pour une stratégie « Made in Europe 2030 », qui rejoint largement les positions françaises.
Je tiens à saluer votre action depuis 2019, en tant que commissaire chargé du marché intérieur et de l'industrie.
Vous avez joué un rôle clé pour protéger les Européens, en permettant une production d'ampleur de vaccins contre la covid. On se souvient de la manière dont tout avait commencé puis de la reprise en main, notamment par la Commission, dont l'action a été décisive.
Vous avez permis une régulation ambitieuse des services et des marchés numériques. Les accords historiques sur le règlement sur les services numériques ( Digital Services Act, DSA) et sur le règlement sur les marchés numériques ( Digital Markets Act, DMA), obtenus sous présidence française, démontrent que l'Europe est aux avant-postes pour mettre un terme au « Far West numérique ». Il serait intéressant de vous entendre sur Twitter et la conformité qui devra être la sienne au mois de septembre prochain.
Il nous reste encore de nombreux défis à relever. Je pense en particulier au renforcement de notre base industrielle et technologique de défense (BITD), au cœur de la solidarité européenne envers l'Ukraine, qui défend nos valeurs contre l'agression russe. L'Europe a fait preuve d'une réactivité dont nous pouvons nous féliciter, en présentant rapidement des mesures concrètes pour bâtir une économie de guerre et accélérer la livraison et l'acquisition conjointe de munitions. C'est le sens de la proposition de règlement de soutien à la production de munitions ( Act in Support of Ammunition Production, Asap) : 500 millions d'euros pour fournir davantage de munitions à la résistance ukrainienne, et cela dès que possible. Nous comptons sur les États membres et sur le Parlement européen pour parvenir à un accord au plus tôt.
Il y aurait encore bien d'autres sujets à évoquer, tels que notre réponse commune à l'IRA.