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Intervention de Eva Sas

Réunion du lundi 19 juin 2023 à 18h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEva Sas :

J'insisterai sur quatre points.

Tout d'abord, ce projet de loi ne répond en rien aux problèmes de pouvoir d'achat des Français. Le premier outil de partage de la valeur est bien l'augmentation des salaires. Cela devrait être votre priorité, car le salaire réel diminue depuis le troisième trimestre 2021 et a encore perdu 1 % au cours de la dernière année.

Ensuite, il faut effectivement favoriser l'accès des salariés des entreprises de moins de cinquante salariés aux outils de partage de la valeur pour lutter contre ce salariat à deux vitesses : d'un côté, les salariés des grands groupes, les mieux rémunérés et bénéficiant déjà de la participation et de l'intéressement ; de l'autre, les salariés des TPE et PME qui n'ont que très peu accès à ces outils.

Malheureusement, la portée de ce projet de loi demeure très faible, pour trois raisons. Premièrement, vous avez introduit la prime Macron dans les outils de partage de la valeur, alors que celle-ci a un effet de substitution aux augmentations de salaire à hauteur de 30 % en moyenne, selon l'Insee. Deuxièmement, aucun minimum n'est fixé dans la loi, de sorte qu'il sera possible à un employeur de verser une prime d'un euro pour satisfaire ses obligations légales. Troisièmement, lorsque l'entreprise réalise des résultats exceptionnels, le texte ne prévoit qu'une obligation de négocier le versement de la prime exceptionnelle, et rien n'est prévu si la négociation échoue.

Enfin, vous auriez dû vous attaquer aux employeurs peu scrupuleux qui privent les salariés de leurs droits à participation en déplaçant la valeur ajoutée dans des holdings, en France ou à l'étranger. Vous n'en avez rien fait.

Dès lors, monsieur le ministre, allez-vous donner un avis favorable à nos amendements qui abrogent l'article L. 3326-1 du code du travail, qui a pour unique but de protéger les patrons qui privent les salariés de leur juste participation, comme chez Procter & Gamble, McDonald's ou General Electric ?

Par ailleurs, si vous vous souciez réellement du partage de la valeur, pourquoi ne pas avoir engagé une négociation interprofessionnelle non pas sur le partage de la valeur, mais sur les salaires ? C'est ce qu'attendent des millions de Français qui n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois.

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