Merci pour cette proposition de création d'une commission d'enquête, alors qu'on ne semble pas avoir pris la mesure de la gravité de ce qui est à l'œuvre – comme le montrent les interventions de certains collègues.
La question centrale est celle de la capacité de la démocratie à entendre et tenir compte des données scientifiques. Le constat scientifique est implacable : les pesticides sont la première cause de l'effondrement dans des proportions vertigineuses de la biodiversité, des populations d'insectes, d'oiseaux et de vers de terre – 80 % des populations d'insectes notamment.
Les pesticides affectent de manière grave la santé humaine. Au point que nous faisons face à une épidémie de maladies chroniques et que l'espérance de vie stagne, voire pourrait être amenée à reculer. On peut faire la longue liste de ces maladies, qui va des cancers pédiatriques à l'endométriose – laquelle touche une femme sur dix. Les premiers concernés sont les agriculteurs eux-mêmes.
Avec Dominique Potier, nous avions mené la bataille pour le fonds d'indemnisation des victimes de pesticides. Mais il ne s'agit pas seulement d'indemniser les victimes, il faut surtout qu'il n'y en ait plus. Les pesticides sont partout. Dans les eaux, dans les sols, dans nos corps et dans le cordon ombilical qui relie le fœtus à la femme enceinte.
Cette commission d'enquête est plus qu'utile, elle est indispensable. De nombreux rapports – dont notamment un référé de la Cour des comptes – ont depuis longtemps pointé l'échec du plan Écophyto. Selon nous, c'est la conception même de ce plan qu'il faut revoir, car il repose sur le volontariat et non sur des décisions environnementales d'ordre public. Le poids des lobbies est aussi en cause.
Je rappelle qu'en la matière, la responsabilité pénale des ministres et gouvernements successifs est engagée depuis 2017. Il est assez consternant de voir les fabricants de pesticides se tenir au côté du ministère de l'agriculture dans la procédure « Justice pour le vivant ».