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Intervention de Gabriel Attal

Réunion du mardi 30 mai 2023 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gabriel Attal, ministre délégué :

Je commencerai par les questions de Louis Margueritte sur les difficultés de recrutement et d'attractivité. À périmètre constant, le schéma d'emploi du programme 302 Facilitation et sécurisation des échanges s'établit à 19 ETP, avec 748 sorties et 767 entrées, malgré un objectif de +33 ETP. Le COM signé avec les douanes pour les années 2022 à 2025 prévoit une stabilité, avec 33 ETP de plus en 2022, puis 11 de moins par an les années suivantes. Ce schéma réaffirme les missions de la direction des douanes, mais ne considère pas l'unification du recouvrement fiscal au niveau de la DGFiP, qui a induit un transfert des missions fiscales des douanes vers la DGFiP à compter de 2019. Nous prévoyons 443 ETP transférés dans les prochaines années. De plus, la DGDDI accroîtra les recrutements externes, qui devraient représenter 25 % des embauches, notamment pour les domaines informatiques, quoique le recrutement par concours reste la principale voie de recrutement.

La stratégie d'ouverture de la douane pour renforcer son attractivité se traduit aussi par des initiatives de promotion et de valorisation, notamment des parcours professionnels pour les agents recrutés en dehors des concours, afin de fidéliser ces personnes. Nous avons expérimenté en 2022 un concours national à affectation locale dans les Hauts-de-France, afin que les candidats disposent d'une meilleure visibilité sur leur affectation. Il y a en outre un enjeu de communication, de nombreux Français ignorant, d'une part, le rattachement des douanes à Bercy, pourtant très positif, et, d'autre part, la diversité et la richesse des missions, qui permettent de réaliser toute une carrière. Une campagne de communication sera donc prochainement lancée pour mettre en valeur les métiers de la douane et attirer davantage de talents.

Je répondrai maintenant à Mme Leduc. Mon plan de lutte contre les fraudes prévoit, madame la rapporteure spéciale, la création d'un conseil d'évaluation des fraudes, qu'elles soient fiscales, sociales ou douanières. Je souhaite d'ailleurs une évaluation davantage partagée. Selon que l'on écoute Agnès Verdier-Molinié ou Gabriel Zucman, l'évasion fiscale va de 30 à 100 ou 150 milliards d'euros. Un travail d'évaluation commun doit donc être mené avec des experts, des personnalités qualifiées et des parlementaires, qui auront accès aux données de l'administration et pourront commander des études par extrapolation, comme celle menée par la DGFiP et l'Institut nationale de la statistique et des études économiques (INSEE) sur la fraude à la TVA. Je considère qu'il s'agit de l'évaluation la plus précise sur la fraude fiscale. Elle a pris un certain temps, mais permet de savoir que la fraude à la TVA représente environ 20 milliards d'euros par an dans notre pays. Nous devons systématiser ce type d'évaluation. La prochaine concernera l'impôt sur les sociétés, et je souhaite que le conseil d'évaluation puisse commander des études et partager des données. Je doute en revanche que ce sujet nécessite une direction interministérielle, car Bercy dispose de très bonnes directions, capables de travailler avec les autres ministères, et que la mission interministérielle de lutte contre la fraude (Micaf) s'est montrée récemment très efficace sur un certain nombre de politiques.

Je reviens sur les effectifs et les suppressions de postes à la DGFiP, évoqués par le président Coquerel et d'autres intervenants. Plus de 10 000 agents sont mobilisés sur les investigations spécialisées, précisément 10 373 en 2021. Conformément au plan de lutte contre les fraudes, le prochain PLF prévoira cependant de renforcer les forces de contrôle de 1 500 ETP, car il importe de doter l'administration de capacités dans plusieurs domaines en matière de recherche, de vérifications et de plusieurs spécialités complexes, notamment les questions patrimoniales, la fraude internationale et l'évasion fiscale.

Cela n'impliquera pas que le schéma d'emploi ne se réduira pas sur le périmètre global de la DGFiP. La numérisation d'un certain nombre de procédures et la suppression d'un certain nombre de taxes permettent en effet des gains de productivité. Néanmoins, la trajectoire d'emploi de la DGFiP pour les cinq prochaines années est celle qui prévoit le moins de suppressions d'emplois depuis une vingtaine d'années, après que Bercy a représenté 70 % des réductions d'effectifs, expliquées par la dématérialisation, le pré-remplissage des déclarations, le prélèvement à la source et plusieurs suppressions d'impôts et de taxes. Quand j'ai été nommé au budget, j'ai tenu à prévoir une trajectoire d'emploi totalement différente de celle que nous avons connue. Quand nous avons échangé avec elles, les organisations syndicales l'ont d'ailleurs reconnu. Quoique des efforts soient encore possibles, il apparaît surtout que nous sanctuarisons et même que nous renforçons les effectifs du contrôle fiscal.

En réponse à M. Laqhila, je souligne que la dynamisation des redevances domaniales constitue un enjeu majeur pour assurer la préservation des intérêts financiers de l'État et la valorisation de son patrimoine immobilier. La DIE a ainsi lancé un vaste chantier de revalorisation des redevances domaniales, en s'appuyant notamment sur la mise en place au mois d'avril 2018 d'une nomenclature-barème, l'aide à la modernisation des barèmes portant sur les redevances de l'État (Ambre.) Elle permet la fixation de montants dynamiques de redevances domaniales qui prennent en compte les avantages de toute nature que procure le bien, pour moderniser et optimiser la mission de gestion des titres d'occupation et des redevances domaniales.

La DIE a également conçu l'application informatique Figaro, déployée en juin 2022 et raccordée à Chorus, qui sécurise le circuit de recouvrement des redevances grâce à son intégration au système d'information financière de l'État. La dynamisation des redevances s'accompagne en outre d'une professionnalisation des services locaux du domaine, par la formation comme par l'enrichissement de la documentation et par une collaboration renforcée avec les différents services gestionnaires.

La DIE a aussi développé une action en faveur d'une plus grande valorisation des terrains devenus inutiles, par exemple en encourageant l'installation de panneaux photovoltaïques ou d'antennes relais. Enfin, un processus de revue d'actifs permet de réaliser deux fois par an une analyse dynamique du patrimoine par les responsables régionaux de la politique immobilière de l'État, placés auprès des préfets de région. Tous les actifs remis au domaine sont ainsi l'objet d'une réflexion approfondie sur leur devenir, en envisageant le cas échéant une mise en vente, une mise à bail ou un changement de gestionnaire.

Quant à la mécanique des reports de CP pour le CAS, elle obéit à une logique de trésorerie normale, et l'autorisation parlementaire est bien respectée. Pour sa part, le programme 723 respecte son plafond de CP. Cependant, la direction du budget (DB) et la DIE réaliseront un travail pour mieux ajuster les reports de CP dans le cadre de la campagne de reports de fin d'année. Concernant le CAS, le principe n'est pas remis en cause. Cet instrument permet de responsabiliser les services occupants sur les surfaces qu'ils utilisent. Le mécanisme des retours sur produits de cession, permettant au ministère et aux préfectures de région de récupérer 50 % des produits de vente réalisés dans leur périmètre pour financer leurs projets immobiliers incite d'une manière forte à remettre leurs biens inutilisés au domaine et donc à faire preuve d'une plus grande sobriété immobilière.

Concernant l'Agence de l'immobilier de l'État, un bilan a été dressé au terme des dix-huit mois d'expérimentation, selon trois critères de réussite : la viabilité économique et financière, l'aptitude à répondre aux enjeux de la politique immobilière de l'État, la démonstration de la capacité opérationnelle à faire entrer la gestion de l'immobilier de l'État dans une démarche de qualité de service. Ce bilan a été présenté au mois de janvier dernier au conseil de l'immobilier de l'État (CIE.) Il fait ressortir de premiers éléments qualitatifs et quantitatifs, en dépit de la forte contrainte de durée, peu compatible avec la temporalité de l'immobilier, comme le CIE le soulignait dès 2021. Sur le plan quantitatif, l'expérimentation menée dans quatre régions – contre cinq pour le domaine photovoltaïque –, sans aucun crédit budgétaire supplémentaire, a confirmé l'existence d'un besoin au-delà de toute attente. À la fin de l'année 2022, près de 130 opérations étaient en cours de réalisation ou en développement. Sur le plan qualitatif, une enquête de satisfaction a confirmé la satisfaction des bénéficiaires de l'offre, recommandée par 93 % des répondants.

L'AGILE s'est donc développée en un temps record depuis sa création au printemps 2021. Cela permet d'envisager une deuxième phase de déploiement, notamment sur la valorisation des biens inutiles de l'État.

J'en viens aux questions de M. Mournet sur les régimes spéciaux de retraite. Seul le régime de la RATP est actuellement concerné par une fermeture, sachant que le régime de la SNCF avait fait l'objet de la clause dite du grand-père. La fermeture du régime de la RATP serait neutre sur la couverture des droits spécifiques, déjà pris en charge intégralement par l'État sans contribution de l'entreprise, contrairement à la SNCF. Le schéma de financement de cette fermeture et de celle des autres régimes concernés sera finalisé dans le cadre des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2024. Il est possible qu'une compensation de la Cnav et de l'Agirc-Arrco concernant le régime de la SNCF permette de neutraliser intégralement jusqu'en 2050 l'impact de la dégradation du ratio démographique.

Concernant la question de la lisibilité de l'information parlementaire, il est vrai que certains régimes spéciaux bénéficiant d'un financement de l'État ne figurent pas dans la mission Régimes sociaux et de retraite, quoique la Cour des comptes le recommande régulièrement dans le cadre de sa NEB. Une telle proposition permettrait effectivement d'accroître la lisibilité de la dépense de l'État et l'information du Parlement. Il ne me semble pas que la ministre de la culture soit opposée aux deux transferts nécessaires vers le programme 195 Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers.

Quant à la suppression du régime des marins, je souligne sa sinistralité particulièrement élevée, liée aux spécificités et à la dangerosité de la profession. Cela explique l'existence de ce régime spécial, qui doit poursuivre ses travaux en faveur de la prévention des risques. La réforme des retraites conserve ce régime et ne modifie pas les âges de départ.

J'en viens aux questions de Mme Errante sur la conservation de 606 millions d'euros sur le programme 552 Dépenses accidentelles et imprévisibles alors que la gestion 2022 approchait de son terme. Cette décision s'explique par les incertitudes qui persistaient lors de l'examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2022 en raison de la situation sanitaire, du contexte international et de ses effets sur l'économie. Les crédits de cette dotation sont d'ailleurs destinés à couvrir des dépenses imprévisibles, ce qui justifie de conserver une marge jusqu'en fin de gestion, pour une gestion « en bon père de famille ». Par ailleurs, afficher une annulation de crédits en exécution conduit à améliorer le solde de la LFR par rapport à la prévision de crédits inscrits, mais ne modifie en rien l'exécution définitive de la gestion.

Quant aux crédits non répartis de titre 2 pour le programme 551 Provisions relatives aux rémunérations publiques, le relèvement de cette dotation a été proposé au Parlement dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de l'été 2022 pour financer l'augmentation du point d'indice. L'évaluation s'est fondée sur le coût brut de la mesure, sans prendre en compte les capacités d'autofinancement des ministères, insuffisamment connues lors de l'élaboration du texte. La mobilisation des capacités des ministères a ensuite permis d'annuler une part significative des crédits ouverts, au terme de discussions certes difficiles avec chaque ministre.

Par ailleurs, l'arrêté du 6 décembre 2022 a été pris tardivement pour prendre en compte le plus grand nombre possible d'éléments de la gestion et pour réduire les mouvements de crédits nécessaires à la finalisation de la gestion de la masse salariale.

M. Cazeneuve et M. Mournet ont tous deux évoqué un réexamen obligatoire du système de retraite tous les cinq ans. La loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, qui a permis la réforme des retraites, prévoit que le Comité de suivi des retraites remette au Parlement un rapport d'évaluation de la loi avant le 1er octobre 2027, plusieurs groupes s'étant mobilisés sur ce sujet, notamment le groupe Démocrate. Il me semblerait intéressant d'envisager la pérennisation de cet exercice, dont les modalités précises devraient être discutées. De plus, le COR réalise au moins tous les cinq ans un exercice complet de projection sur la situation financière de tous les régimes de retraite légalement obligatoires. Ces exercices pourraient servir de base à un débat au Parlement sur l'évolution du système de retraite, à intervalles réguliers. J'y suis assez favorable.

Jean-René Cazeneuve m'a aussi questionné sur la dette technique. Le COM pour la DGFIP sur 2020-2022 a permis de progresser sur ce sujet. L'inspection générale des finances (IGF) estime que le bilan en 2022 est globalement positif, malgré la crise sanitaire, qui a perturbé la mise en œuvre des réformes. La DGFiP a réalisé 80 % des chantiers et 72 % des indicateurs ont été atteints ou sont jugés en progrès significatif. Un effort important d'investissement a concerné le numérique et le renforcement des moyens informatiques, avec un rattrapage de la dette technique.

Malgré ces efforts, le rapport de l'IGF a identifié des axes d'amélioration sur les sujets informatiques. La dette technique restera donc un enjeu de la feuille de route stratégique 2023-2027. La DGFiP dispose d'ailleurs en 2023 d'une enveloppe de crédits hors titre 2 pour l'informatique de 450 millions d'euros, soit une hausse de 40 % par rapport à l'exécution 2022. Ces moyens colossaux doivent nous permettre d'améliorer nos procédés et techniques.

La mission lancée sur ce sujet préconise d'ailleurs de poursuivre la priorisation des investissements, la migration hors des serveurs les plus anciens et le mouvement vers le cloud. Cela étant, la DGFiP est déjà très dématérialisée, aux procédés assez modernes, en comparaison avec certaines caisses de Sécurité sociale, où la dette technique est plus élevée, ce qui explique que la Cour des comptes ait refusé de certifier les comptes de la branche famille.

Concernant l'avancement de la restructuration du réseau, avec le nouveau réseau de proximité et la démétropolisation, nous voulons rapprocher les services publics de nos concitoyens et tenir compte des besoins spécifiques des publics. Dès le mois de juin 2019, nous avons lancé une démarche inédite de modernisation du réseau et de rééquilibrage géographique des services sur les territoires. Au 31 décembre 2022, 2 975 communes disposent d'un accueil de la DGFiP, dans ses propres structures ou des structures tierces. Une augmentation de 50 % s'observe par rapport au 1er janvier 2019. Le COM de la DGFiP qui fixe l'objectif d'une augmentation de 30 % du nombre de communes où la DGFiP est implantée est donc dépassée.

À la fin de l'année 2023, le taux d'avancement du déploiement du NRP approchera de 97 %. Quelques opérations de réorganisation s'opéreront jusqu'en 2025, en raison de contraintes immobilières, pour atteindre le réseau ambitionné à l'issue de la concertation. La réorganisation territoriale se concrétise aussi par la migration de services, actuellement situés en Île-de-France et dans les grandes métropoles, vers les territoires ruraux et périurbains.

J'en arrive aux questions de Mme Pires Beaune. Je vous remercie d'abord d'avoir salué la mise en œuvre du formulaire, désormais appelé chez nous « formulaire Pires-Beaune. » Je rappelle par ailleurs que le CIR et le Cisap sont deux dispositifs jugés utiles par le Gouvernement pour lutter contre le travail au noir et créer des emplois dans le secteur des services à la personne. Plus de quatre millions de foyers bénéficient ainsi du Cisap et il ne s'agit pas toujours des plus aisés. Quant au CIR, il s'agit d'un ingrédient essentiel de l'attractivité de la France, redevenue le pays le plus attractif pour les investissements étrangers. Or toute réflexion sur l'évolution de crédits d'impôt exige de penser à maintenir cette attractivité.

Par ailleurs, les recettes de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) augmentent, donc les restitutions aussi. De plus, le Gouvernement met en œuvre une dématérialisation des procédures déclaratives en matière d'impôt foncier. L'application « Gérer mes biens immobiliers » et la déclaration d'occupation du logement visent justement à savoir avec certitude qui est propriétaire, occupant ou non, si le bien est loué et s'il s'agit d'une résidence principale ou secondaire, afin d'éviter d'appliquer une taxe non exigible. Cet effort de fiabilisation des données est évidemment nécessaire.

Quant aux mises à jour foncières, les services mettent tout en œuvre pour réduire les délais. La mise en place des services d'appui à la publicité foncière permet notamment de réaliser des actions spécifiques pour accélérer ces délais et donc réduire les dégrèvements évoqués. Je pense que nous y reviendrons lors de l'examen du PLF, en réfléchissant éventuellement à un nouvel indicateur de performance, s'il est utile.

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