Cet accord est plus équilibré que celui qui a été signé récemment avec l'Arménie. Il s'inscrit dans le cadre d'opérations diplomatiques visant à rapprocher les Balkans du camp occidental. La Macédoine du Nord est entrée dans l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) en 2019. Son rapprochement avec l'Union européenne a été accéléré depuis le début de la guerre en Ukraine. La France a joué son rôle en rencontrant plusieurs fois l'exécutif nord-macédonien depuis 2022. Il est à noter que le vote de ce texte intervient au lendemain du deuxième forum de la Communauté politique européenne à Chisinau.
La Macédoine du Nord est un fragile État multiethnique créé à partir de l'effondrement de la Yougoslavie, dans lequel se joue en partie l'avenir du continent européen. Les conflits religieux qui le traversent auront des résonances dans le reste de l'Union européenne. Les questions ethniques, illustrées par les conflits entre Albanais, Serbes et Kosovars, n'ont pas été soldées. C'est un espace oublié en proie à des tensions larvées très dangereuses. En ex-Yougoslavie, on le sait, la guerre a été vaincue mais la paix n'a pas été gagnée. L'OTAN et l'Union européenne ne voient, dans ces espaces, rien d'autre que des marges, des pays frontières qui constituent un tampon entre la Turquie et le monde musulman à l'Est, et avec les mondes slaves au Nord-Est. Il est à craindre qu'ils soient méprisés par l'Union européenne et l'OTAN, et soient utilisés comme des pions dans la guerre opposant l'Occident à Moscou.
La coopération entre la Macédoine du Nord et Frontex a été entérinée en octobre 2022, ce que nous regrettons compte tenu du danger que représente cette institution pour les droits humains. L'agence européenne a été étrillée par un rapport de l'Office européen de lutte antifraude (OLAF), notamment en raison du refoulement de migrants en mer, de l'absence de prise en compte d'appels de détresse en mer, du harcèlement des migrants et même de malversations internes. Son budget a été multiplié par dix depuis sa création. Elle est en train de devenir un État dans l'État. Elle devrait être dissoute, et un nouveau pacte sur la migration et l'asile élaboré.
L'accord entre la France et la Macédoine du Nord s'inscrit dans le contexte de l'augmentation de la fréquentation de la route migratoire des Balkans. Syriens, Kurdes, Libanais traversent la Turquie au péril de leur vie et sont parfois arrêtés en Macédoine du Nord. Les Balkans forment un espace très courtisé. L'accord sur la réadmission des personnes dont le séjour est irrégulier est une nouvelle étape de cette offensive diplomatique. Il est à espérer qu'il sera appliqué de manière responsable et humaine par l'Union européenne, Frontex, la France et les autorités nord-macédoniennes. Nous nous abstiendrons.