Au moment où le protocole d'accord initial a été signé, en 2018, plus de 90 000 travailleurs frontaliers empruntaient chaque jour la liaison Metz-Thionville-Luxembourg par voie routière ou ferroviaire. Leur nombre avoisine désormais les 120 000 et pourrait doubler à l'horizon 2050. En raison de l'importance des flux, les différents axes routiers transfrontaliers sont confrontés à un trafic important et subissent régulièrement des congestions aux heures de pointe. La situation est ainsi particulièrement critique au Nord de Metz, où passent 105 000 véhicules par jour. Cela s'explique par la congestion de l'axe reliant Metz à Nancy, qui constitue un point de convergence des axes routiers traversant les villes de Saint-Dizier, Épinal et Lunéville.
Cette situation contribue à accentuer l'impact environnemental du transport routier, qui est responsable d'une part importante des émissions de particules fines et d'oxyde d'azote.
En ce qui concerne le trafic ferroviaire, l'axe reliant Nancy, Metz, Thionville et le Luxembourg est actuellement proche de la saturation, alors que le taux de remplissage était compris entre 50 % et 70 % aux heures de pointe en 2019 pour le tramway et le train sur la section Thionville-Luxembourg.
Dans ce contexte, il apparaît essentiel de poursuivre le renforcement de la coopération franco-luxembourgeoise, afin de réduire les fortes nuisances que cette situation produit pour nos concitoyens.
Tel est l'objectif de l'avenant soumis à notre commission. Signé le 19 octobre 2021, ce texte prolonge les ambitions du protocole d'accord initial, à savoir la réduction de la congestion sur les axes concernés, la préparation à l'accroissement des déplacements des travailleurs transfrontaliers et le développement de mobilités plus durables. Cet avenant, composé de trois articles, vise principalement à accroître les efforts des parties en augmentant leurs contributions respectives en faveur d'investissements dans le domaine ferroviaire.
Je reviendrai sur la genèse, les objectifs et les modalités de financement du protocole d'accord initial avant d'analyser les implications de l'avenant.
Pour répondre aux enjeux liés à la circulation des personnes et des biens entre la France et le Luxembourg, les deux États ont signé, le 20 mars 2018, un protocole visant à mettre en œuvre une politique de transport commune pour les déplacements transfrontaliers entre l'ancienne région Lorraine, qui fait désormais partie du Grand Est, et le grand-duché de Luxembourg.
Ce texte prévoit principalement la réalisation d'aménagements permettant d'accroître les capacités de l'axe ferroviaire reliant la Lorraine et le Luxembourg. Il a également une dimension multimodale en ce qu'il traite, par exemple, de la mise en place de parcs relais et de plateformes de covoiturage.
En ce qui concerne les aménagements ferroviaires, le protocole de 2018 fixe deux horizons temporels. Un premier palier, durant la période 2022-2024, doit être marqué par une augmentation capacitaire du matériel roulant. À ce jour, les allongements de quais ont été réalisés dans environ une moitié des huit gares concernées, et les derniers travaux sont prévus pour la fin de l'année 2023. Un second palier, en 2028-2030, doit se traduire par une augmentation importante du nombre de trains circulant sur la ligne.
Pour ce qui est du financement de l'ensemble des aménagements, les contributions respectives de la partie française et de la partie luxembourgeoise étaient initialement définies selon un principe de parité. Les parties s'engageaient chacune à hauteur de 120 millions d'euros, dont 10 millions d'euros, chacune, pour la promotion de la politique de mobilité durable, comprenant le covoiturage et les services routiers de transport en commun. Le protocole d'accord initial envisageait ainsi une enveloppe financière franco-luxembourgeoise maximale de 240 millions d'euros, dédiée pour une grande partie au volet ferroviaire.
Par ailleurs, le couloir de transport reliant Nancy, Metz, Thionville et le Luxembourg étant situé dans la partie centrale du réseau transeuropéen de transport (RTE-T), des subventions européennes au titre du mécanisme pour l'interconnexion en Europe pourraient réduire le montant des investissements des deux parties pour les liaisons ferroviaires transfrontalières.
L'avenant qui nous est soumis s'inscrit dans la continuité de la volonté initiale d'améliorer les conditions de mobilité, par la diminution de la congestion routière ainsi que par l'amélioration de la régularité et l'augmentation de l'offre ferroviaire. C'est, en effet, un enjeu prioritaire pour les travailleurs appelés à traverser chaque jour la frontière pour se rendre dans le grand-duché, dont le nombre ne cesse d'augmenter, année après année.
À l'issue de la rencontre du 1er juin 2021 entre le premier ministre français et le premier ministre luxembourgeois, ce dernier a annoncé une nouvelle contribution financière maximale de 110 millions d'euros du grand-duché pour les infrastructures ferroviaires d'intérêt commun à la France et au Luxembourg. Cette contribution supplémentaire luxembourgeoise s'accompagne d'une contribution française identique.
L'engagement financier des deux pays passe ainsi, dans le domaine ferroviaire, d'un maximum de 110 millions d'euros à 220 millions d'euros des deux côtés. En revanche, la part dévolue au domaine routier demeure inchangée : elle reste fixée à 10 millions pour chacune des deux parties.
L'avenant vise ainsi à modifier le protocole d'accord initial et sa convention d'application pour ce qui concerne le seul réseau ferroviaire. L'avenant complète le programme d'investissements de l'accord initial en prévoyant des aménagements supplémentaires, à la suite des études de faisabilité réalisées pour l'horizon 2028-2030. Ces aménagements, qui ont pour ambition d'améliorer la liaison ferroviaire entre Metz-Thionville et le Luxembourg comportent notamment la construction d'un centre de maintenance dans la métropole de Metz et son raccordement au réseau, afin de tenir compte de la saturation du centre existant et d'assurer le traitement du matériel récemment acquis par la région, ainsi que l'automatisation ou la semi-automatisation de la conduite des trains et la mise en place d'un système de communication associé. L'objectif est d'améliorer la liaison ferroviaire en fluidifiant les circulations. Il faut préciser que ces aménagements seront engagés sous réserve que des études d'opportunité en confirment l'intérêt.
Comme cela a été précisé lors des auditions que j'ai menées, les crédits complémentaires prévus par l'avenant, qui permettent un doublement des engagements pris en 2018 dans le domaine ferroviaire, ne sont pas intégralement fléchés mais constituent, selon les personnes que j'ai entendues, une « bourse » ou encore un « champ des possibles ». Ces montants seront progressivement mobilisés à l'horizon 2030 en fonction des résultats des études menées par différents groupes de travail.
En conclusion, je tiens à saluer l'engagement de la France et du Luxembourg, qui font l'un et l'autre partie de l'Alliance pour la décarbonation des transports et qui ont choisi d'œuvrer de concert pour améliorer concrètement le quotidien des usagers des différents axes transfrontaliers et ainsi répondre aux défis environnementaux et aux problématiques de qualité de vie liés à la situation actuelle. L'avenant du 19 octobre 2021 consolide la coopération franco-luxembourgeoise en la matière, en augmentant significativement les contributions des deux pays en faveur d'investissements dans le domaine ferroviaire. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter en faveur du projet de loi.