Nous voici réunis afin de ratifier l'ordonnance du 8 décembre 2021 étendant et adaptant à la fonction publique des communes de Polynésie française certaines dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Je ne ferai pas durer davantage le suspense : nous voterons en faveur du texte, qui va globalement dans le bon sens et répond, quoiqu'en partie seulement, aux revendications des manifestants de 2017. Nous suivrons en cela l'avis de nos collègues polynésiens, en vertu de la règle que nous nous sommes fixée à ce sujet.
Nous avions émis des propositions qui n'ont pas été acceptées : renforcer les centres de gestion – trois agents, ce n'est pas assez pour assurer l'organisation et le suivi des concours de 4 000 fonctionnaires dans une contrée extrêmement vaste, éclatée en multiples îles –, dont la carence concerne d'ailleurs l'ensemble du territoire national, et limiter à 10 % le recours aux contractuels. Je regrette d'autant plus le rejet de cette dernière mesure que M. le ministre délégué s'est dit à deux doigts de nous donner raison, reconnaissant que la multiplication des contractuels n'était une bonne chose ni dans la fonction publique territoriale, ni dans la fonction publique d'État. C'est là une excellente nouvelle, qui me réjouit autant qu'elle m'étonne : si vous parvenez, monsieur le ministre délégué, à convaincre vos collègues au sein du Conseil des ministres, ce sera de bon augure pour la suite – à moins que les choses ne se décident en Conseil de défense et de sécurité nationale (CSDN).
L'une de nos propositions, néanmoins, a été adoptée : un rapport consacré aux contraintes budgétaires qui pèsent sur les communes polynésiennes. C'est la première fois que vous aurez conclu avec nous l'un de ces compromis dont vous nous parlez tant, et cela tient au travail de concertation mené par M. le rapporteur, que je voudrais remercier. Vous auriez gagné à appliquer plus tôt cette méthode – je pense aux projets de loi consacrés au pouvoir d'achat –, au lieu de recourir à la brutalité de secondes délibérations qui vous permettent de revenir à deux heures du matin sur ce qu'avait décidé l'Assemblée nationale.
Encore une fois, nous allons donc voter pour ce texte en dépit de ses limites. La première d'entre elles réside dans le fait que nous n'avons pas inscrit dans la loi les moyens de nous assurer que la fonction publique ne serait pas, petit à petit, abîmée. Nous ne pouvons donc que vous faire confiance sur ce point : or, comme vous ne nous avez jamais demandé de vote de confiance, je suis au regret de vous apprendre que nous ne nous fions guère à vous et que nous aurions préféré des dispositions législatives explicites.
La deuxième limite, c'est que le texte ne répond pas pleinement à la question du pouvoir d'achat qui a été portée par le mouvement social de 2017 et qui reste centrale en Polynésie comme dans l'Hexagone, en Guadeloupe comme en Martinique, à La Réunion comme en Guyane – bref, sur tout le territoire national. Le présent projet de loi ne répond pas plus à l'urgence sociale en Polynésie que le projet de loi prétendument en faveur du pouvoir d'achat n'y répond, où que ce soit en France. Il faudra donc, sur ce sujet, compter de nouveau sur la mobilisation sociale pour obtenir des choses de ce Gouvernement. C'est ce qu'avaient démontré les gilets jaunes en 2018.