Pour l'OTAN, c'est l'heure du réveil. La mort cérébrale n'était qu'un coma profond ; l'Amérique est de retour. Comme l'a dit le président Biden, « Le moindre pouce du territoire de l'OTAN sera défendu. » Les Européens, Allemagne en tête, découvrent les limites du doux commerce, la fragilité géopolitique de nos valeurs, l'impératif catégorique de la solidarité, le devoir d'être forts et complémentaires, aussi impérieux que celui d'être justes. Sans ce revirement de la politique russe, nous ne serions pas ici ce soir à discuter de l'adhésion à l'OTAN de deux grands pays qui ont librement décidé de mettre un terme à deux siècles de neutralité pour la Suède et, pour la Finlande, à soixante-quinze ans de relations spéciales avec la Russie.
Sans doute la rupture n'est-elle pas brutale. La Finlande s'était certes interdit de rejoindre l'OTAN après la chute de l'Union soviétique, mais elle s'était arrachée aux contraintes de la souveraineté limitée que lui avait imposées son puissant voisin par le traité de Paris de 1947. La Suède, quant à elle, avait toujours entretenu dans le passé avec les puissances occidentales, et tout particulièrement avec les États-Unis, une relation de coopération discrète mais substantielle. Depuis la fin de la guerre froide, les deux pays avaient noué avec l'OTAN un partenariat organisé. L'idée était alors, à Stockholm, de se rapprocher suffisamment de l'OTAN pour se dispenser d'avoir à en faire partie. Cette subtilité appartient désormais au passé.
Il manquait cependant aux relations entre l'OTAN et les deux démocraties nordiques deux choses essentielles et que seule l'adhésion pouvait apporter : d'une part, une participation à part entière à la décision au sein d'une organisation dont je rappelle qu'elle est respectueuse de la souveraineté des États et fonctionne sur la base du commun accord ; d'autre part, le bénéfice de l'article 5 du traité, c'est-à-dire la garantie de solidarité, y compris l'emploi de la force armée de tous ses membres en cas d'agression de l'un d'entre eux.
En votant pour le projet de loi qui vous est soumis, pour les deux protocoles qui vous sont proposés, c'est à cet engagement réciproque de solidarité maximale que vous faites souscrire la France. La question qui vous est posée est donc de savoir si cet engagement réciproque est légitime à vos yeux, s'il est utile à la sauvegarde de la paix et à la sécurité de tous. Votre rapporteur et la commission des affaires étrangères, qui s'est prononcée à une très large majorité en faveur du projet de loi, répondent clairement oui à cette question.
Trois considérations principales me semblent devoir guider le choix de la représentation nationale. Il y a d'abord la réduction, à la charnière de l'Union européenne et de la Russie, de la zone grise, zone de tous les dangers, comprenant les États qui inquiètent la Russie par leur adhésion au modèle économique, social et politique des démocraties occidentales sans pour autant disposer des garanties de sécurité correspondantes.