Choisir entre garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires pour prendre part aux décisions les concernant et mettre à mal l'application du principe de parité : voilà ce que nous nous refusons à faire. Le groupe la France insoumise – NUPES n'accepte pas de déroger à la parité en matière d'accès aux mandats électoraux et aux fonctions électives. C'est un principe consacré depuis 1999 et inscrit à l'article 1er de notre Constitution en 2008, pour garantir une continuité de représentation des communes. Est-ce un mal pour un bien ?
Il ne nous semble pas raisonnable de régler le problème de la vacance de postes au sein des conseils communautaires en érodant l'objectif d'une égale représentation des hommes et des femmes dans les instances de décision. Nous savons en effet que les lois visant à l'application de la parité adoptées dans les dernières décennies ont eu un effet positif, bien qu'encore limité.
Aux élections municipales, la part des femmes élues a plus que doublé depuis la fin des années 1980, passant de 17 % en 1989 à 42 % en 2020. Dans les conseils communautaires, le nombre de femmes a augmenté de 4,4 points, pour atteindre la proportion de 35,8 % après 2020. Cependant, et vous le savez toutes et tous ici, il y a bien souvent un problème de parité qualitative. Ainsi, les personnes qui président les intercommunalités sont à 89 % des hommes. Certes, il y a eu des améliorations, mais il reste encore un long chemin à parcourir : la persistance du sexisme, la difficulté à se sentir capable d'assumer des fonctions politiques et le manque de prise en compte de l'articulation des temps de vie personnelle et professionnelle apparaissent comme des freins à la participation des femmes dans les instances représentatives. Cette question essentielle doit être prise à bras-le-corps.
Le principe de parité est l'un des leviers pour parvenir à assurer une égale représentation des femmes et des hommes – ce n'est pas le seul, mais il en fait partie. Dès lors, pouvons-nous vraiment l'abandonner ?
Évidemment, nous entendons aussi le problème posé par la vacance des postes au sein des conseils communautaires, en particulier pour les petites communes, qui se plaignent déjà de ne plus avoir de marges de manœuvre depuis l'entrée en vigueur de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi Notre, qui s'inscrivait sans ambiguïté dans une logique purement gestionnaire et un contexte d'austérité budgétaire.
Certes, la présente proposition de loi permet de limiter la casse en évitant qu'une commune soit pénalisée par un siège vacant, mais elle met des pansements sur une situation devenue intenable pour les petites communes de moins de 1 000 habitants qui, rappelons-le, représentent plus de 70 % des communes. Elle ne saurait par ailleurs répondre à la question plus globale de la mise à mal de la démocratie locale et au découragement de nombreux maires.
Le rehaussement du seuil de constitution des EPCI a conduit nombre d'élus de petites communes à percevoir l'intercommunalité comme une contrainte. Les élus locaux se sentent impuissants dans l'exercice de leur mandat local, du fait d'une perte de compétences et de la complexification de l'action publique locale. En abordant le problème de la vacance des sièges, ce texte met aussi le doigt sur celui des démissions d'élus municipaux, qui tendent à se multiplier dans les petites communes. Découragés face aux coupes budgétaires, à l'inflation et tout simplement à l'impossibilité d'appliquer leur programme, ceux-ci sont aussi en première ligne face à la colère populaire, dans un contexte délétère où les citoyens et les citoyennes ne se sentent ni écoutés ni respectés par un gouvernement qui fait passer ses textes en force et qui met à mal la confiance dans la représentation politique.
Nous sommes donc défavorables à cette proposition de loi : nous refusons de reculer sur le principe de la parité en vue de panser un dysfonctionnement bien plus large.