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Intervention de Fabien Di Filippo

Séance en hémicycle du mardi 2 août 2022 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative au projet de programme de stabilité pour la période 2022-2027

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabien Di Filippo :

Parmi les principaux sujets qui concernent l'avenir de la France, sa souveraineté et le pays que nous laisserons à nos enfants, celui de la gestion de nos finances publiques et de notre endettement a sans doute été le plus négligé depuis dix ans.

Il est très inquiétant de constater une dissymétrie absolue entre les annonces autosatisfaites de la période électorale du début de l'année et le constat très sévère du Haut Conseil des finances publiques sur la situation actuelle : une inflation largement sous-estimée, une croissance au contraire surestimée et une dette toujours bien supérieure à vos projections. Alors que l'on assiste aux conséquences hyperinflationnistes, désastreuses et inévitables pour le pouvoir d'achat de nos concitoyens du « quoi qu'il en coûte » macronien – pratiqué en période préélectorale avec zèle, dans tous les domaines et bien au-delà des exigences de la crise, comme l'a démontré la Cour des comptes –, cet enjeu redevient central et incontournable.

Ce dont nous parlons, c'est de l'avenir de nos enfants, de leur marge de manœuvre pour investir dans l'avenir et pour faire face aux crises futures qui ne manqueront pas de survenir. L'argent magique et la sortie de la crise sanitaire nous ont ramené au niveau du PIB de 2019, mais avec un déficit deux fois supérieur : 178 milliards d'euros en 2021, contre 93 milliards d'euros avant la crise du covid. La croissance record que vous vantez n'était qu'un retour à la normale après une récession record en 2020, plus forte que chez nos voisins européens. Vous invoquez une croissance fantasmée pour prédire un recul de nos déficits, mais l'inflation et notre situation structurelle vont nettement l'amoindrir dans les années à venir.

Le programme de stabilité qui nous est présenté cette semaine pour la période 2022-2027 semble voué à l'échec, car frappé du sceau, funeste en matière de finances publiques, des trois « i » : insincère, intenable et injuste.

Insincère tout d'abord, car vous abusez de plus en plus du subterfuge qui consiste à classer des dépenses normales en dépenses exceptionnelles, et car vos projections sont d'ores et déjà battues en brèche par la hausse continue de l'inflation et par l'augmentation des taux directeurs dans toutes les banques centrales du monde. La méthode Coué, monsieur le ministre délégué, ne suffira plus dans quelques mois.

Intenable ensuite – et c'est peut-être le plus dangereux et le plus grave pour la France : d'une part, vous n'êtes pas capables de documenter la moindre économie dans les années à venir. Si je ne dois citer qu'un seul exemple, la réforme des retraites a vu ses fondements sapés par Emmanuel Macron lui-même lors de la campagne présidentielle : au gré des nécessités et des rencontres électorales, il en a évoqué plusieurs formes différentes et contradictoires. D'autre part, parce que la charge de la dette va battre, sous votre mandat, un triste record : elle va devenir le premier poste budgétaire d'un État exsangue, devant celui de l'éducation nationale ou celui de nos armées. Faute d'avoir anticipé la hausse des taux d'intérêt, la charge de la dette va augmenter drastiquement, de 17 milliards d'euros, à très court terme.

Injuste enfin, car il prévoit de fortes contraintes sur le fonctionnement des communes et plus généralement de toutes les collectivités locales, quand les efforts que nous appelons courageusement de nos vœux sur la fraude sociale et sur certaines dépenses sociales sont oubliés. Votre approche inflationniste et clientéliste du RSA et de certains minima sociaux est en effet inquiétante, alors qu'il faudrait privilégier la récompense du travail et mettre en place une carte Vitale biométrique pour limiter drastiquement les malversations.

Le ministre du travail a récemment indiqué que 2 millions de personnes sont actuellement allocataires du RSA, soit deux fois plus qu'il y a dix ans, et que la situation n'est pas satisfaisante, car leur taux de retour vers l'emploi est moins bon que celui des demandeurs d'emploi. Après un réquisitoire aussi implacable, comment nous faire croire que revaloriser cet assistanat, davantage que le travail, est un impératif de justice sociale ?

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