Intervention de Yannick Neuder

Séance en hémicycle du lundi 12 juin 2023 à 21h30
Améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYannick Neuder :

Le temps où le médecin travaillait jour et nuit, week-end compris, est révolu. Nous devons le comprendre et surtout l'anticiper. Alors oui, monsieur Valletoux, comme vous le dites vous-même dans votre exposé des motifs : « La question de l'accès aux soins étant la première préoccupation des Français, elle doit être la première préoccupation du législateur. »

Toutefois, nous sommes contre la coercition proposée aux articles 3 et 4 : nous lui préférons l'incitation. De même, nous sommes opposés à la surcharge administrative et à l'empilement des couches de gouvernance prévues à l'article 1er : nous préférons libérer du temps médical pour les médecins. Si le constat est sans appel sur le manque de professionnels de santé, nous devons prendre garde à ce que le remède ne soit pas pire que le mal. Ces mesures pourraient en effet avoir des conséquences encore plus graves sur l'attractivité des métiers du soin : nous ne pouvons pas nous permettre de prendre le risque du déconventionnement, par exemple.

Le vrai problème de notre système de soins est d'ordre quantitatif : le nombre de médecins est insuffisant pour le nombre de Français. Toute mesure coercitive visant à déshabiller Pierre pour habiller Paul n'est donc que pacotille et ne réglera jamais le problème à long terme. D'ailleurs, les propos tenus hier par la Première ministre dans les médias démontrent parfaitement l'incapacité du Gouvernement et de sa majorité à s'accorder sur ce sujet si important. « Ce n'est pas en empêchant des médecins de s'installer dans des zones où il y en aurait trop que l'on va répondre aux difficultés des Français », a-t-elle notamment déclaré.

C'est pourquoi les députés du groupe Les Républicains plaident pour faire émerger des mesures nouvelles, solides et pérennes afin de renforcer l'accès aux soins.

En premier lieu, il faut impérativement revaloriser la rémunération des professionnels de santé – et le faire correctement, pas au prix d'un café. S'agissant de la formation, rendons effective la suppression du numerus clausus, en faisant en sorte que le nombre de candidats admis soit déterminé d'abord en fonction des besoins des territoires et en concertation avec les élus. Mais donnons surtout les moyens aux universités : créons plus de terrains de stage dans les cliniques et les cabinets sans pour autant déshabiller l'hôpital, et revalorisons la fonction de médecin maître de stage universitaire. À plus court terme, misons sur les paramédicaux qui connaissent les métiers du soin. Proposons-leur des passerelles afin qu'ils puissent reprendre un cursus accéléré d'études de médecine, et renforçons les aides à l'installation.

Enfin, favorisons davantage la coopération entre professionnels de santé pour dégager du temps médical. Accompagnons les structures d'exercice coordonné et soutenons le recrutement d'assistants médicaux : les médecins libéraux doivent pouvoir être de vrais employeurs à la tête de leurs cabinets. Je regrette d'ailleurs que nous ne sachions toujours pas reconnaître ni valoriser davantage les compétences spécialisées de certains infirmiers qui apportent pourtant beaucoup à la prise en charge des patients. Sans les infirmiers de bloc opératoire, les infirmiers anesthésistes et les puéricultrices, nos unités de chirurgie et nos structures mobiles d'urgence et de réanimation (Smur) ne fonctionneraient pas.

Voilà certaines de nos ambitions. Nous les construisons au contact des professionnels du soin que nous rencontrons chaque semaine. J'en profite pour saluer l'ensemble des collectivités territoriales que nous savons très engagées contre la désertification médicale. Elles financent des idées novatrices au service de la santé des Français. Je pense à la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui depuis 2016 a multiplié par cinq son budget d'investissement consacré à la santé, et qui est la première région de France en termes de maisons de santé. Mais l'État ne peut plus compter sur ces initiatives locales. Il doit prendre toute sa responsabilité dans ce combat et s'approprier les mots d'Hippocrate : rétablir, préserver et promouvoir la santé.

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