Intervention de Thierry Frappé

Séance en hémicycle du lundi 12 juin 2023 à 21h30
Améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Frappé :

Voici le constat : 6 millions de Français sont actuellement sans médecin généraliste traitant ; 1,6 million de Français renoncent chaque année à des soins médicaux ; 49 % des médecins généralistes se disent en situation de burn-out. Est-ce alarmant ? Bien évidemment ! À cela s'ajoutent 20 à 30 % de charge administrative et une augmentation inédite des déclarations d'agressions – de plus en plus violentes – sur l'ensemble des professionnels de santé.

Dans ce contexte, monsieur le rapporteur, votre texte ressemble à un cocktail bureaucratique qui ne résoudra en rien la désertification médicale. Vous allez dire : « Que proposez-vous ? » Nous regrettons que cette proposition de loi ne propose pas la levée totale du numerus apertus et la rémunération de la consultation modulée selon le lieu d'installation, deux idées défendues par Marine Le Pen lors de la campagne présidentielle. C'est avec des actions simples et immédiates que nous mettrons un terme à la désertification médicale en France.

Face à cette urgente nécessité, votre proposition de loi présente trois axes d'action.

En premier lieu, vous proposez le rattachement de tous les professionnels de santé aux CPTS. Or un tel rattachement enfermerait l'exercice libéral et ajouterait une nouvelle charge administrative au sein de notre système de santé. En outre, cette proposition est contraire au droit commun des contrats.

Le deuxième axe est la création d'un CTS pour rendre responsables les professionnels de santé en matière d'égalité d'accès aux soins. Avec cet article, votre majorité minoritaire entend se défausser de sa responsabilité et faire porter le poids de la désertification médicale sur les professionnels de santé, en leur donnant la lourde responsabilité de déterminer les conditions d'égalité d'accès aux soins, ce qui n'est pourtant pas leur profession initiale.

Troisième axe : l'assouplissement des conditions d'exercice pour les médecins étrangers sur le territoire national. Cette mesure, directement inspirée de l'article 7 du projet de loi pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration, constate le caractère inopérant de la politique gouvernementale en matière de santé et vient priver certains pays de leurs forces vives en matière médicale.

Le médecin que je suis vous le dit, et je ne suis pas le seul : une telle proposition de loi démontre une méconnaissance du quotidien des médecins et professionnels de santé libéraux.

Nous pouvons cependant nous satisfaire de certains points : d'abord, la possibilité pour les étudiants en médecine, odontologie, maïeutique et pharmacie de se voir accorder une allocation mensuelle en contrepartie d'un engagement à exercer au moins deux ans au sein d'un territoire donné après la fin de leur formation ; ensuite, la possibilité de contrôler les cliniques privées afin d'éviter les fraudes.

En outre, votre proposition de loi pourrait évoluer dans un sens favorable si certaines de nos idées, qui relèvent de l'évidence, étaient adoptées : exempter les femmes enceintes de la permanence de soins ; limiter l'interdiction de l'intérim médical aux deux années qui suivent le début de la carrière ; requérir le niveau C1 en langue française pour les médecins étrangers ; réintroduire dans la boucle le conseil départemental de l'Ordre des médecins, trop souvent écarté ; enfin, prendre en considération les rendez-vous médicaux non honorés, qui représentent l'équivalent du temps de travail journalier de 4 000 médecins. Si cela va sans le dire, cela va nettement mieux en le disant.

Pour le long terme, il faut apporter des solutions sur l'ensemble du territoire national. En effet, la désertification médicale résulte de l'abandon par l'État, pendant de nombreuses années, des territoires éloignés des métropoles. Il est nécessaire de restaurer l'attractivité de nos territoires en améliorant les services de transport, l'accès à l'éducation et aux études supérieures, et j'en passe. Toutes ces thématiques font fuir les professionnels de santé de leur territoire d'origine vers les métropoles, qui répondent à des besoins évidents en matière de vie personnelle et familiale.

Oui, il existe un urgent besoin d'agir. Oui, nous devons légiférer pour améliorer l'accès aux soins sur notre territoire. Les Français comptant sur nous, il nous revient d'être à la hauteur. En conséquence, mon groupe, le Rassemblement national, se déterminera au vu des discussions que nous aurons dans cet hémicycle. Suivant la qualité du texte final, nous déciderons de voter pour ou contre, ou bien de nous abstenir.

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