C'est à minuit vingt-cinq que nous abordons ce sujet important… Je remercie Stella Dupont et Mathieu Lefèvre pour leur rapport, qui pose de vraies questions. Je suis convaincu que la répartition sur le territoire des personnes arrivant en France est l'une des solutions pour une bonne politique migratoire.
La difficulté actuelle est de deux ordres. D'abord, il est ici question de demandeurs d'asile. Cela ne tient pas compte, notamment en Île-de-France, des personnes qui ne sont pas régularisées mais ne seront jamais expulsées parce qu'elles vivent et travaillent en France depuis des années – nous ne serons certainement pas d'accord sur cette question, monsieur le ministre. C'est très certainement ce qui explique que seulement 15 % des OQTF soient exécutées : il ne s'agit pas de laxisme, mais d'un mouvement normal lié au fait que de nombreuses personnes, pour diverses raisons, ne peuvent tout simplement pas quitter le territoire. Je vois tous les jours des personnes dont les parents sont français, qui font de brillantes études en France mais qui ont le malheur d'être arrivés après leurs parents, de telle sorte que leur situation ne peut pas être régularisée. Au lieu de vouloir expulser les personnes qui ne sont pas régularisées, mieux vaudrait peut-être chercher à les intégrer à la société, pour la plus grande satisfaction de tous.
Cette question complique les déménagements sur les territoires. Le relatif échec du départ vers les régions s'explique par l'absence de centres d'accueil dignes de ce nom en Île-de-France. Il devrait s'agir d'un véritable sas pour l'accueil administratif des personnes concernées, qui permettrait de mieux anticiper et mieux préparer leur déplacement vers les régions. Voilà peu de temps, dans ma circonscription, a eu lieu l'expulsion du squat Unibéton, le plus grand d'Île-de-France. Il est clair que les personnes expulsées d'un squat et envoyées en régions rencontrent le problème décrit par Mathieu Lefèvre et Stella Dupont : paradoxalement, le sentiment de déracinement qu'ils éprouvent tient moins au fait qu'ils viennent d'arriver qu'à l'absence d'une communauté pour les entourer. La solution à ce problème doit être préparée, et cela suppose en premier lieu l'existence d'un sas, comme c'est le cas dans de nombreuses capitales à travers le monde, qui disposent de centres d'accueil plus efficaces que les nôtres.
Plusieurs des préconisations formulées sont intéressantes, comme l'augmentation du nombre de centres d'accueil des demandeurs d'asile ou le fait de favoriser l'accès au travail pour certains d'entre eux. J'adhère aussi à certaines des propositions de Stella Dupont, qui me semblent propres à améliorer concrètement la situation des personnes qui, face à l'incertitude d'un déplacement, préfèrent retourner en Île-de-France ou dans les grands centres urbains. Il semble intéressant de supprimer la possibilité d'orientation directive sans hébergement, qui peut donner à ces personnes l'impression qu'il n'y a pas de retour possible, car cela contribue à une meilleure intégration. De même, l'idée d'enrichir l'algorithme utilisé pour déterminer la région d'affectation des demandeurs d'asile afin de tenir compte de leurs attaches particulières est également intéressante, comme celle d'un d'aménagement de l'implantation territoriale de l'Ofii. Ce rapport comporte donc des recommandations qui vont dans le bon sens.