Je remercie M. Lefèvre et Mme Dupont de leur travail, et salue particulièrement l'engagement de longue date de cette dernière dans l'accompagnement des demandeurs d'asile.
Je condamne évidemment les agressions d'élus. Ils sont nombreux à connaître des difficultés, qu'il s'agisse d'agressions verbales ou, malheureusement, d'agressions physiques. Les faits évoqués par Mme Dupont seront bien portés à la connaissance non seulement du ministère de l'intérieur, mais aussi du ministère de la justice. Dans le cas du maire de Saint-Brévin-les-Pins, il s'agit à la fois d'assurer la protection du maire et d'assurer la réponse pénale, en veillant à faire en sorte que le procureur de la République échange en direct avec les élus, ce à quoi je sais que le garde des sceaux est très attentif. Pour ma part, j'ai pris le 16 mars dernier, donc avant les difficultés graves qu'a rencontrées le maire de Saint-Brévin-les-Pins, une instruction visant à protéger les élus, notamment dans le cadre de l'accueil des demandeurs d'asile sur leur territoire qui est souhaité et parfois imposé par l'État.
La capacité du DNA a augmenté. Elle est passée de 82 362 places en 2017 à 119 732 places en 2023, en comptant les 5 900 places qui doivent être ouvertes cette année. D'ici la fin de l'année, le nombre de places pour demandeurs d'asile aura donc augmenté de 45 % depuis l'élection du Président de la République et de la majorité parlementaire. Cet effort est d'autant plus remarquable qu'il a enjambé la période très particulière du covid, qui a exigé de loger des personnes qui n'auraient pas dû l'être en temps normal, et la période d'intensification des flux migratoires qui a suivi.
Les besoins sont très importants. La situation s'améliore, mais il reste du travail au ministère de l'intérieur, puisque ce sont 60 % des demandeurs d'asile qui vivent dans des conditions matérielles conformes au DNA. Il ne faut pas en déduire qu'il manque 40 % de places : certaines places sont occupées par des gens qui n'y ont pas droit. Sans doute faut-il mener un travail fin avec le ministère du logement. Au ministère de l'intérieur, nous sommes conscients des nombreux problèmes humains et d'accompagnement que pose cet état de fait, mais nous ne pouvons que le constater.
Nous avons donc prévu pour 2024, sous l'autorité de la Première ministre, de clarifier la situation en distinguant, parmi les demandes de logement, celles qui relèvent de l'asile, celles qui relèvent de l'hébergement des sans-abri et les autres. Par ailleurs, nous travaillons à l'inscription d'une augmentation du nombre de places dans le budget 2024, dont les arbitrages par la Première ministre sont en cours.
S'agissant de la participation du ministère de l'éducation nationale à l'élaboration du Snadar pour la période 2024-2027, elle est prévue pour les enfants en âge d'être scolarisés. J'espère pouvoir annoncer lors de la prochaine discussion budgétaire qu'elle a bien eu lieu.
L'hébergement citoyen a bien fonctionné pour l'accueil des réfugiés ukrainiens. Pour les autres demandeurs d'asile ou de protection, il n'existe que de façon très limitée. Il faut l'étendre en l'encadrant pour éviter les abus, des deux côtés d'ailleurs. Enrichis de l'expérience de l'accueil des Ukrainiens, nous pouvons imaginer cette évolution.
Un dispositif exceptionnel a été adopté par l'État et les préfectures. Nous pourrions l'essayer dans deux ou trois départements pilotes avant de le généraliser – si le Maine-et-Loire est candidat, nous le sélectionnerons avec plaisir –, non sans prendre connaissance auparavant du retour d'expérience de l'hébergement des réfugiés ukrainiens, dont s'occupe la ministre Sonia Backès et que nous pourrons vous faire parvenir. Il faudra tenir compte du fait que 90 % des réfugiés ukrainiens sont des femmes, contrairement aux autres demandeurs d'asile, qui sont majoritairement des hommes. Nous pouvons néanmoins imaginer des dispositifs, dans le cadre d'une intégration citoyenne des réfugiés.
Quoi qu'il en soit, j'ai chargé la direction générale des étrangers en France et la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal) de réfléchir à l'hébergement citoyen. Une mission a été menée par Frédérique Lahaye de Fréminville et Thierry Tuot, qui a été remplacé après avoir été nommé président de la section de l'intérieur du Conseil d'État mais a eu le temps d'aborder le sujet avec moi. La Dihal a prévu un dispositif pour 110 personnes réfugiées, en attendant une expérimentation plus large dans quelques départements que je vous proposerai.
S'agissant des prévisions de consommation de crédits, la demande d'asile étant restée basse au premier trimestre et ayant baissé au second, nous ne consommerons sans doute pas l'intégralité des 321 millions alloués au financement de l'allocation pour demandeur d'asile par la loi de finances pour 2023. Bien entendu, cette prévision est soumise aux soubresauts de la vie diplomatique, aux éventuels franchissements de frontières et aux difficultés que peuvent connaître nos voisins. Je demeure donc prudent mais, pour l'heure, nous ne constatons aucune tension particulière sur les crédits de l'ADA.
On dénombre en moyenne, pour le premier trimestre de cette année, 83 675 bénéficiaires de la protection temporaire offerte aux Ukrainiens – des doubles comptes peuvent parfois se produire, notamment pour des enfants. Le nombre de bénéficiaires de l'ADA est donc à peu près comparable à celui de l'année dernière et nous pensons qu'il se maintiendra, avec peut-être une légère évolution positive en raison de l'évolution de la guerre en Ukraine.
Au-delà des aspects militaires, on observe que, malgré les propositions d'accueil de la France, notre pays n'a pas été la première destination choisie par les réfugiés ukrainiens. En effet, la communauté ukrainienne en France est de petite taille, à la différence par exemple de celles d'Espagne ou d'Italie, ou de l'Allemagne, qui est, après les pays frontaliers, celui qui a accueilli le plus grand nombre de réfugiés d'Ukraine. Nous avons, pour notre part, envoyé des bus et des fonctionnaires pour ramener des réfugiés en France, mais ils ont refusé de venir. Nous continuons à ouvrir nos portes mais, hormis le cas particulier de Nice, qui compte une population ukrainienne plus importante, il n'y a pas de raison que le territoire national connaisse une forte augmentation du flux d'Ukrainiens.
Enfin, oui, un problème particulier se pose pour l'Île-de-France. Comme je l'ai dit tout à l'heure, un desserrement est nécessaire, pour les demandeurs d'asile, pour les élus, pour l'intégration et pour le traitement des demandes, voire pour les refus et les reconduites aux frontières. En tout état de cause, il n'y a pas lieu de laisser perdurer la situation actuelle en Île-de-France. Je rappelle qu'au 23 mai, sept sas d'accueil temporaire sont opérationnels.