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Intervention de Florian Chauche

Réunion du mardi 23 mai 2023 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFlorian Chauche, rapporteur spécial (Sécurités : Sécurité civile) :

Avec l'intensité de la saison des feux 2022 – terme de moins en moins adapté, au vu de l'extension de la période de risque incendie – les crédits de la sécurité civile ont largement été mis à contribution. Je rappelle que les crédits du programme 161 Sécurité civile, c'est-à-dire les crédits de l'État, ne représentent qu'une petite part des dépenses de sécurité civile, la majorité de ces dépenses étant assumée par les Sdis.

Ainsi, partant de 568 millions prévus en loi de finances initiale, l'exécution du programme a été portée à près de 653 millions, soit une hausse de presque 15 %, due principalement aux feux de forêt dévastateurs que nous avons connus. Il a, en effet, fallu augmenter fortement les dépenses d'entretien des moyens aériens, acheter davantage de produits retardant et mobiliser vingt colonnes de renfort de plus qu'en temps normal. Ces dépenses supplémentaires n'ont pas été assez anticipées par le Gouvernement, comme en témoigne l'ouverture nette de près de 40 millions en loi de finances rectificative ou le dégel total de la réserve de précaution. Et encore le Gouvernement a-t-il pu se reposer sur d'importants reports de crédits de l'année précédente – près de 70 millions – ainsi que sur une sous-exécution substantielle des crédits liés à la lutte contre la pandémie de covid.

Le niveau très élevé de consommation des crédits, à 96,6 %, témoigne par ailleurs d'une absence de marges de manœuvre budgétaires. En 2021 déjà, la Cour des comptes alertait quant à un programme budgétaire particulièrement rigide, alors même que la vocation de ce programme est de gérer des crises, par nature imprévisibles. L'année 2022 est donc un véritable signal d'alarme pour les moyens de notre sécurité civile, qu'il nous faut prendre au sérieux. Vous avez souvent qualifié, Monsieur le ministre, la saison 2022 d'exceptionnelle, qui sortirait de l'ordinaire. Or, du fait du changement climatique, de telles saisons relèveront bien plus désormais de la norme que de l'exception en matière de risque incendie.

Lorsque j'ai visité la base aérienne de la sécurité civile à Nîmes, on m'a d'ailleurs indiqué que l'activité de l'année 2022 avait été intense pour les forces aériennes de la sécurité civile, mais moindre qu'en 2017 ou 2003 par exemple. Cette saison 2022 aurait en outre pu et dû être mieux anticipée. En effet, dès 2010, un rapport interministériel indiquait qu'une augmentation de 30 % des surfaces sensibles se traduirait par une augmentation des coûts d'au moins 20 % d'ici à 2040, et recommandait d'adapter le dimensionnement de la flotte à une extension du risque sur le territoire national.

Si donc je salue vos annonces sur le renouvellement de la flotte de Canadair et des hélicoptères de la sécurité civile, je regrette néanmoins que des efforts d'investissement n'aient pas été réalisés plus tôt et que nous soyons désormais au pied du mur. Les rapporteurs spéciaux qui m'ont précédé avaient pourtant eux aussi alerté sur le vieillissement de la flotte, le surcoût du maintien en condition opérationnelle et le non-respect du contrat opérationnel pour les hélicoptères. Compte tenu des délais de livraison, les moyens aériens de la sécurité civile n'augmenteront pas avant plusieurs années, probablement 2027-2028, et nos forces de sécurité civile devront donc faire face à une extension géographique et à une intensification du risque incendie avec des moyens insuffisants.

L'exécution budgétaire 2022 doit constituer un tournant en matière de budget de la sécurité civile. Nous devons mieux anticiper.

Monsieur le ministre, j'ai plusieurs questions que je n'ai pas pu poser dans le cadre de l'examen du PLF. Au-delà des investissements annoncés, avez-vous prévu d'augmenter le budget général de fonctionnement de la sécurité civile en conséquence ? Pour ce qui est de la flotte aérienne, ne serait-il pas judicieux d'envisager, au-delà du renouvellement des Canadair, l'achat d'hélicoptères lourds bombardiers d'eau, qui sont régulièrement loués ou réquisitionnés par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises et par de nombreux Sdis ?

Je tiens à saluer le renouvellement de la flotte d'hélicoptères EC145 de la sécurité civile. L'état de détérioration de certaines bases est cependant préoccupant. Un plan d'investissement et de rénovation est-il prévu ?

Je me réjouis que vous ayez avancé sur la question de la rémunération des personnels navigants de la sécurité civile et de l'attractivité de leurs carrières. Allez-vous faire de même pour les techniciens chargés du maintien en condition opérationnelle ? En visitant le groupement d'hélicoptères de la sécurité civile, j'ai été très surpris de constater que, du fait d'un manque de personnel, cinq lignes de visite seulement étaient opérationnelles, alors qu'il en existe six et que les ETP ont été adoptés pour une septième dans le cadre de la Lopmi.

Pour ce qui est, enfin, des indicateurs de performance du programme 161, l'indicateur Efficacité du dispositif de protection des forêts est aujourd'hui caduc, car il se limite aux seuls incendies survenant dans les départements méditerranéens ; celui qui porte sur la disponibilité des moyens aériens est différent pour les avions et les hélicoptères et ne permet pas de distinguer si une indisponibilité résulte d'une surutilisation ou d'une cause mécanique ou accidentelle. Une mise à jour de ces indicateurs, utiles à la représentation nationale, est donc nécessaire.

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