Je me réjouis de retrouver votre commission, tout en ayant une pensée très émue pour les agents publics qui ont perdu la vie en faisant leur métier ces derniers jours : Carène, l'infirmière du CHU – centre hospitalier universitaire – de Reims qui a succombé cette nuit à ses blessures, et les trois policiers, Paul, Steven et Manon, morts dimanche dans l'exercice de leurs fonctions. Nous pensons à eux et à leurs proches, en étant pleinement conscients de l'importance des missions qui leur étaient confiées.
Mon ministère est avant tout celui des agents publics. C'est un ministère profondément humain, qui fonctionne grâce à des hommes et à des femmes qui s'engagent, ne l'oublions pas. C'est aussi, et c'est important dans le cadre d'une discussion sur l'exécution budgétaire, un ministère très transversal, dont l'enjeu principal est l'efficacité, l'efficience de l'action publique et de nos services publics. Les directions placées sous la tutelle de mon ministère travaillent au service des autres et constituent des leviers de fonctionnement pour eux. Je pense à la direction interministérielle du numérique (Dinum), à la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), à la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), à la Diese – la délégation interministérielle à l'encadrement supérieur de l'État, chargée des ressources humaines (RH) dans ce domaine –, et au Cisirh, le centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines, qui s'occupe d'enjeux extrêmement importants.
S'agissant de l'exécution budgétaire, 87 % des crédits de paiement (CP) de la mission ont été consommés en 2022 : 88 % pour le programme Fonction publique, qui est piloté par la DGAFP, 92 % pour le programme Transformation publique, piloté par la DITP, 66 % pour le programme Innovation et transformation numériques, piloté par la Dinum – c'est là que la sous-exécution est la plus importante, mais il faut rappeler que cette direction est en cours de transition –, et 97 % pour le programme Conduite et pilotage de la transformation et de la fonction publiques, qui regroupe les effectifs et la masse salariale de la DGAFP, de la DITP et du Cisirh. Quant au programme Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants, qui est effectivement sous l'autorité du ministre chargé des comptes publics, à travers la DIE, son taux d'exécution est de 84 %.
Le programme 148 Fonction publique a connu une exécution plutôt dynamique en autorisations d'engagement (AE), mais un peu moins en CP. Cela s'explique par l'engagement total des crédits au titre des subventions pour charges de service public de l'INSP, l'Institut national du service public, qui a remplacé l'ENA (École nationale d'administration), et par une consommation soutenue au titre de l'action sociale interministérielle qui est au fondement de l'attractivité de l'action publique.
L'exercice 2022 fait apparaître un reliquat de 25 millions d'euros de crédits de paiement. Il s'agit principalement de dépenses d'investissement relatives aux restaurants interadministratifs, pour lesquels des retards calendaires ont eu lieu, notamment en raison du contexte géopolitique, et de crédits du Cisirh, qui ont été un peu décalés. Il y a aussi une légère sous-exécution en ce qui concerne le dispositif « Prépas talents », qui vise à renforcer l'attractivité, l'ouverture et la diversité de la fonction publique.
Ce dispositif, lancé par ma prédécesseure et sur lequel je suis très engagé, porte ses fruits. Ses 2 000 places, assorties de bourses dédiées, donnent accès à des concours de l'ensemble des écoles de la fonction publique. Les résultats sont là : les élèves des « Prépas talents » réussissent les concours – même mieux que les autres candidats – et peuvent ensuite accéder de manière effective à la fonction publique. Néanmoins, ce dispositif ne fait pas le plein, ce qui explique une partie de la sous-exécution constatée. Il est dommage que seules 1 229 places sur 2 000 aient été pourvues en 2022 ; on pourrait faire mieux. L'ensemble des écoles du service public et des réseaux universitaires, que nous avons réunis récemment, Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche Sylvie Retailleau et moi, se sont engagés à mieux faire connaître les possibilités et à mieux relier les « Prépas talents » à l'ensemble des réseaux universitaires afin d'ouvrir l'accès à la fonction publique.
Quelques mots concernant l'INSP, en lien avec la réforme de la haute fonction publique que nous poursuivons : nous investissons dans cette école que nous sommes en train de transformer assez profondément, dans une logique d'école d'application de très haut niveau. Nous avons revu ses modalités d'accès et nous sommes en train de faire de même pour le contenu de la formation initiale, qui a été recentrée autour des enjeux des grandes transitions et managériaux, lesquels sont essentiels pour le pilotage de la fonction publique. Par ailleurs, nous avons récemment décidé de supprimer le concours de sortie : cette école n'a pas à simplement classer, mais elle doit former et préparer à un parcours dans la haute fonction publique.
S'agissant de l'attractivité de l'école – la réforme avait suscité des inquiétudes en la matière –, les derniers chiffres, qui datent d'il y a quelques jours, montrent que le nombre de candidats au concours n'a jamais été aussi élevé depuis la création de l'ENA. Cela reste une école d'excellence, qui prépare à des parcours d'excellence, eux aussi, dans la fonction publique.
Les crédits du programme 349 Transformation publique ont été assez largement consommés pour ce qui est du Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP). Nous avons décidé, malgré un contexte budgétaire tendu, de continuer à investir dans des projets de transformation qui ont vocation à permettre, par la suite, des économies et de transformer l'action publique, d'améliorer son effectivité. Alors que 97 % des ressources disponibles en CP ont été consommées, nous avons décidé de faire perdurer ce fonds, qui a été rouvert pour le quinquennat – 330 millions d'euros seront mis au service de la transformation publique.
Cela m'amène à l'action que mène la DITP au service de la réussite des politiques prioritaires du Gouvernement, notamment en matière d'outillage et d'accompagnement des ministères et des administrations dans le cadre de leurs propres politiques de transformation. C'est le rôle transversal de mon ministère, qui repose en particulier sur le baromètre des résultats de l'action publique, lequel est un outil de pilotage et de transparence envers nos concitoyens.
Le programme 352 Innovation et transformations numériques est celui pour lequel la sous-exécution budgétaire est la plus marquée. La raison principale est que la Dinum connaît un repositionnement très important.
Nos stratégies numériques sont un enjeu absolument essentiel. Elles ne doivent jamais entrer en opposition avec le besoin d'humanisation des services publics : il faut un numérique qui fonctionne, qui soit accessible, notamment pour les personnes en situation de handicap – le numérique permet actuellement de traiter 90 % des interactions entre les citoyens et les administrations –, et qui agisse de façon complémentaire avec une réhumanisation des services publics. Nos concitoyens veulent, en effet, qu'on remette des voix et des visages derrière des guichets.
Nous devons réussir la stratégie numérique de l'État en partenariat avec les collectivités territoriales et avec la fonction publique hospitalière, selon une logique « trois versants ». C'est pour cette raison que nous réengageons la Dinum. Les questions relatives à la transition numérique et à la data (données) doivent être placées au plus haut niveau stratégique dans les ministères. Il a été décidé de revoir les feuilles de route ministérielles en la matière et de donner à la Dinum un vrai positionnement de chef d'orchestre. Elle se dote de moyens pour atteindre cet objectif et, je le dis au passage, pour appréhender les enjeux de filière RH du numérique de l'État, qui sont absolument essentiels si l'on veut se donner les moyens de réussir, notamment en réinternalisant un certain nombre de compétences. La reprise en main, le réarmement en matière de maîtrise d'ouvrage est une question centrale.
Le programme 368, qui concerne les dépenses de personnel, a été assez bien exécuté. Nous avons réinternalisé des moyens au sein de la DITP, notamment pour les prestations de conseil. Retrouver une capacité d'internalisation en la matière est un des enjeux principaux, notamment en armant la DGAFP pour conduire des réformes essentielles liées à ce qui est peut-être l'enjeu prioritaire, celui de l'attractivité de la fonction publique : nous préparons une réforme des modalités d'accès, des déroulés de carrière et de la rémunération.
Je termine en rendant hommage à l'engagement, au quotidien, des agents de la fonction publique, qui donne beaucoup de sens aux missions et aux enjeux budgétaires dont nous discutons.