Intervention de Sophie Mette

Réunion du mercredi 10 mai 2023 à 9h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophie Mette, rapporteure pour avis :

Je vous remercie de m'accueillir au sein de la commission des finances. Cettee proposition de loi traduit l'essentiel des recommandations du rapport d'information « Feux de forêt et de végétation : prévenir l'embrasement », publié en août 2022 par nos collègues sénateurs Jean Bacci, Anne-Catherine Loisier, Pascal Martin et Olivier Rietmann. Elle a été déposée sur le bureau du Sénat le 14 décembre, adoptée par la commission spéciale le 28 mars, puis en séance publique le 4 avril. Notre Assemblée est saisie d'un texte de cinquante-deux articles dont l'examen est réparti entre quatre commissions.

L'initiative de nos collègues sénateurs part d'une série de constats dont je mesure la justesse chaque semaine, dans ma circonscription qui comporte notamment les communes de Landiras, Guillos, Louchats, Origne, Le Tuzan, Balizac, Hostens, Saint-Magne et Cabanac-et-Villagrains, très fortement touchées par les feux de l'été dernier, comme La Teste-de-Buch.

D'ici à 2050, près de 50 % des landes et des forêts métropolitaines pourraient être concernées par un risque d'incendie élevé, contre un tiers en 2010. En zone méditerranéenne, les surfaces brûlées pourraient augmenter de 80 % et être remplacées par des maquis. La période à risque serait trois fois plus longue – les feux hivernaux sont déjà de plus en plus fréquents et violents. Outre les forêts, sont aussi menacées la végétation et les terres agricoles, y compris dans des espaces périurbains.

Face à ce cumul des défis climatique, économique et sécuritaire, le Sénat nous propose une stratégie de prévention qui renforce l'obligation légale de débroussaillement, la dynamisation de la gestion sylvicole – je pense à l'abaissement du seuil d'élaboration des plans simples de gestion (PSG) –, la sécurisation des travaux des agriculteurs, la sensibilisation des citoyens et la mise à disposition des sapeurs-pompiers volontaires, dont nous pouvons tous saluer l'engagement, comme celui des professionnels.

J'ai bien entendu les remarques de nos collègues au sujet des articles dont nous ne sommes pas saisis.

L'article 20 propose de pérenniser et d'élargir le dispositif d'encouragement fiscal à l'investissement (DEFI) en forêt, qui regroupe plusieurs catégories de crédits d'impôt. C'est l'une des deux dispositions que je propose de ne pas conserver : la loi de finances pour 2023 a déjà considérablement simplifié et étendu ces allégements de l'impôt sur le revenu et nous ne savons pas encore comment les forestiers s'en sont saisis ni quelle a été la perte de recettes induite pour l'État. Certains alinéas sont d'ailleurs satisfaits.

L'article 20 bis supprime la limitation dans le temps d'un autre avantage fiscal : le taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à hauteur de 10 % sur les travaux sylvicoles et d'exploitation forestière réalisés au profit d'exploitants agricoles. Il pose une question de principe : il est de bonne pratique d'évaluer les niches avant leur reconduite, leur modification ou leur suppression. Du reste, c'est notre ancien rapporteur général, Joël Giraud, qui avait prévu que les travaux sylvicoles éligibles devraient être effectués avant le 31 décembre 2023, non pour mettre le taux réduit en extinction, mais pour inciter le Gouvernement à en produire un chiffrage. Tel n'ayant pas été le cas et son efficacité économique n'étant pas démontrée, je propose que nous reportions le débat au projet de loi de finances (PLF) pour 2024 et que nous rappelions à l'exécutif son engagement à procéder à une évaluation.

L'article 35 tend à subordonner le bénéfice des aides publiques consacrées aux bois et forêts à l'utilisation de pratiques sylvicoles et d'aménagements qui les protègent des incendies. Je partage sa philosophie, mais la plupart de ses alinéas sont déjà satisfaits ou mal placés dans le code forestier ; je suggère donc de le recentrer sur le cœur de la proposition de loi : la lutte contre les incendies.

L'article 36 confie au Centre national de la propriété forestière (CNPF), établissement public administratif sous la tutelle du ministère de l'agriculture, une mission de promotion de l'assurance contre les risques de tempête et d'incendie, en lien avec les syndicats de propriétaires forestiers. L'opérateur y est pleinement disposé et l'enjeu est essentiel : seuls 800 000 hectares environ sont couverts, sur près de 13 millions d'hectares de forêt privée.

Enfin, l'article 37 double le plafond des dépôts autorisés sur un compte d'investissement forestier et d'assurance (CIFA) après cinq années de détention, en le faisant passer à 5 000 euros, tout en indiquant plus nettement dans la loi que la souscription d'un contrat d'assurance contre le risque d'incendie permet d'ouvrir un tel compte. Le produit a son utilité puisqu'il permet de constituer une certaine réserve, mais il est trop peu connu par les propriétaires et trop peu mis en avant par les établissements financiers. Si l'incidence de la mesure n'est pas précisément déterminée, il est certain qu'elle représentera une incitation.

Sous réserve de nos travaux, Sophie Panonacle, Luc Lamirault, Anthony Brosse, Éric Pauget et moi-même souhaitons une adoption large de la proposition de loi, suivie d'une négociation fluide et conclusive avec le Sénat.

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