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Intervention de Amélie Oudéa-Castéra

Réunion du mercredi 27 juillet 2022 à 15h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques :

Je suis très heureuse de pouvoir exposer les enjeux relatifs au sport et à sa gouvernance, aux Jeux olympiques et paralympiques, et à la façon dont, collectivement, nous pouvons parvenir à inscrire davantage le sport au cœur de notre société pour faire bénéficier plus de nos concitoyens de ses bienfaits.

Au cours des dernières semaines, j'ai beaucoup réfléchi, en équipe, avec toutes les parties prenantes que je remercie – certaines sont d'ailleurs dans cette salle –, sur la vision que je souhaitais proposer aux acteurs du sport français, car les incompréhensions et le flou des derniers mois concernant la gouvernance résultent, en partie, d'un léger déficit de vision partagée.

Trois éléments principaux sont ressortis de nos échanges, ainsi qu'un, complémentaire et nécessaire à la réussite, relatif à la gouvernance.

Le premier élément, cela ne vous surprendra pas, touche aux Jeux olympiques et paralympiques. Cette opportunité majeure, inédite, va nous permettre d'agir sur la place du sport en France. Pour cela, bien entendu, il faut les réussir et parvenir à assembler quatre séries d'exigences afin que notre nation vive des Jeux heureux et utiles. L'organisation doit être irréprochable sur le plan sportif. Cinquante-quatre disciplines seront représentées aux Jeux, pour un peu moins de 880 épreuves. La carte des sites est quasiment stabilisée et les discussions concernant les contrats d'exploitation avec les différents responsables des sites avancent bien.

En plus des différentes cérémonies, il faudra sécuriser une soixantaine de sites – sites de compétition, d'entraînement et aires de vie –, ce qui mobilisera entre 7 000 et 11 000 forces de sécurité intérieure auxquelles il faudra adjoindre 17 500 agents de sécurité privés – environ 22 000 lors du pic d'activité. Il faudra bien calibrer les forces, mais aussi bien les déployer et être capable de faire face à une série de risques – terroristes, bien sûr, mais aussi cyber. Lors des Jeux de Tokyo, il a fallu déjouer plus de 4 milliards d'attaques cyber. La coordination de l'ensemble des services et l'alignement des expertises au service de nos objectifs sont indispensables.

Il faudra également transporter près de 800 000 personnes chaque jour vers les sites de compétition : 200 000 accrédités qui emprunteront les voies olympiques et paralympiques réservées, mais aussi le grand public – 600 000 personnes – en partenariat avec Île-de-France Mobilités (IDFM) qui assurera la desserte des différents sites. Là encore, il sera nécessaire d'assurer la sécurisation des parcours.

Sur le plan de la logistique, il faut être conscient des enjeux en termes de restauration ou d'hébergement, avec 20 000 journalistes et plus de 200 000 accrédités.

En outre, les Jeux doivent accompagner la transition écologique. Le comité d'organisation a pris l'engagement de diviser par deux l'empreinte carbone des Jeux, à 1,5 million de tonnes, contre 3 millions pour les Jeux de Londres. De plus, 15 millions d'euros vont être investis dans des projets à impact positif – développement de la biodiversité, compensation des émissions.

Enfin, dernier enjeu, la maîtrise des budgets : le comité d'organisation dispose de 4 milliards d'euros, dont 98 % correspondent à des financements privés. La Société de livraison des ouvrages olympiques (SOLIDEO) bénéficie quant à elle de 3,7 milliards d'euros, dont 1,57 milliard de contributions publiques, l'État finançant à hauteur d'un peu moins de 1,1 milliard d'euros. Les soixante-quatre ouvrages que la SOLIDEO pilote avancent bien ; les délais et les spécifications sont respectés, sachant que 95 % des capacités sont provisoires ou existantes, illustrant la sobriété de ces Jeux.

Il faut également aider nos athlètes à être au meilleur de leurs performances. Le Président de la République souhaite que nous figurions dans le top cinq des nations les plus médaillées lors de ces Jeux. Pour atteindre un tel objectif, et donner aux athlètes français une capacité sportive sur mesure, nous avons réuni un collectif de parties prenantes autour de l'Agence nationale du sport (ANS), représentée par Claude Onesta, de l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP), des fédérations, du réseau des établissements, des maisons régionales de la performance et des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (CREPS), mais également de mon ministère afin de développer un environnement serein, propice à l'expression de leurs performances dans le respect des exigences d'éthique et d'intégrité.

Troisième enjeu, faire de ces Jeux une véritable fête populaire. Aujourd'hui, 50 % des Français vivent dans une commune ou un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) labellisé Terre de Jeux 2024. Ce label permet aux territoires de s'investir dans les Jeux en faisant notamment usage des emblèmes, mais également en se mobilisant lors des temps forts comme la journée olympique du 23 juin dernier, la journée paralympique annoncée pour le 8 octobre prochain, la semaine olympique et paralympique à l'école, initialement prévue en janvier et décalée à avril 2023, l'olympiade culturelle pour laquelle le ministère de la Culture investit 12,5 millions d'euros sur une base pluriannuelle. La carte et le parcours du relais de la flamme seront quant à eux présentés à partir de l'été prochain. Ce relais associera le plus grand nombre possible de territoires, entre avril et l'ouverture des Jeux le 26 juillet 2024.

Pour faire de ces Jeux une fête populaire, nous disposons également d'outils d'animation des territoires. J'ai déjà évoqué le label Terre de Jeux. Je voudrais également mentionner les plus de 900 centres de préparation des Jeux qui permettront aux collectivités de recevoir des délégations françaises ou étrangères préparant leur compétition, mais aussi les fan zones, les animations dans les villes, le Club Paris 2024, qui permettra notamment à ses membres d'accéder plus facilement à la billetterie.

La billetterie sera, elle aussi, populaire. Le Président de la République l'a annoncé : 400 000 places seront offertes à des scolaires, des jeunes, des étudiants boursiers, des bénévoles du mouvement sportif, des personnes en situation de handicap et leurs aidants. En outre, 50 % des billets coûteront moins de 50 euros pour les Jeux olympiques, et moins de 25 euros pour les Jeux paralympiques.

Enfin, dernière dimension de réussite des Jeux, notre capacité à léguer un héritage durable et utile à la France et à nos compatriotes. Ce legs comporte une forte dimension sociale et écologique, notamment en Seine-Saint-Denis, qui concentre 80 % des investissements de la SOLIDEO. À terme, le village des athlètes et celui des médias se transformeront en 4 000 logements, dont 40 % de logements sociaux.

Ces Jeux sont également l'occasion de faire rayonner les savoir-faire des entreprises françaises qui accompagnent l'organisation des grands événements sportifs internationaux.

Dans la durée, il faudra que cela permette au sport de prendre une place plus centrale dans notre société, auprès de la jeunesse, mais aussi au service de l'inclusion, de la santé, du bien-être. Les politiques publiques doivent être davantage interministérielles et associer pleinement toutes les parties prenantes : les collectivités territoriales – premiers investisseurs dans le monde du sport, avec 12 milliards d'euros d'investissements –, mais également le monde économique, à travers l'Agence nationale du sport qui contribue désormais durablement à la gouvernance du sport français.

Plus largement, je suis ministre des Sports. J'estime que nous devons parvenir à fortifier le modèle sportif mis en place au lendemain des Jeux de Rome par le général de Gaulle en 1960. Ce modèle repose sur un peu moins de 110 fédérations sportives, l'engagement de 3,5 millions de bénévoles sur le territoire et les 180 000 clubs français.

Qu'est-ce que signifie fortifier notre modèle sportif ? Il faut bâtir un sport d'excellence pour les 15 000 sportifs français de haut niveau, en détectant les talents et les espoirs du sport sur l'ensemble du territoire, en s'appuyant sur les filières d'excellence, qui emmènent vers la haute performance, et en proposant des aménagements scolaires et universitaires adaptés afin de permettre aux sportifs de poursuivre conjointement, et le plus longtemps possible, leurs études et leur passion pour le sport.

Deuxième pan, le sport engagé : il faut préserver la vitalité du bénévolat sportif tout en le féminisant et en continuant à attirer les jeunes générations. Il faut soutenir les clubs – nous l'avons fait de façon massive lors de la crise sanitaire – et rappeler l'importance du sport amateur. Il faut continuer à accompagner l'emploi lorsqu'il est tourné vers le développement de la pratique dans les petites structures, mais aussi valoriser le rôle social des clubs, creusets fondamentaux de la transmission de valeur, de savoirs, creusets du partage et de la mixité.

En troisième lieu, le sport français doit être robuste, c'est-à-dire doté de ressources humaines et financières adéquates. Les cadres techniques et sportifs doivent être équitablement et efficacement déployés au sein des fédérations. Le sport doit bénéficier de dotations budgétaires adéquates, mais il faut aussi qu'il innove et développe des modèles économiques qui lui permettent de disposer de ressources pérennes et autonomes.

En quatrième lieu, il doit être responsable et irréprochable, éthique et intègre. Il faut prévenir et lutter contre les violences sexuelles, mais aussi éliminer toutes les formes de violence et de discrimination dans les stades, lutter contre le dopage, la manipulation des paris sportifs et le séparatisme, prévenir le cyberharcèlement.

Le sport doit être actif dans sa contribution à la transition écologique. Nous devons déployer plus largement la charte des quinze engagements écoresponsables, qui s'applique aux organisateurs d'événements sportifs. En outre, nous l'avons annoncé avec Christophe Béchu à l'issue du conseil olympique et paralympique de lundi, nous préparons un plan d'adaptation de la pratique au changement climatique. Il s'agit de sécuriser les pratiquants, mais aussi d'améliorer la sobriété énergétique du sport, dans la foulée des annonces du Président de la République le 14 juillet et de l'engagement de la Première ministre.

Enfin, le sport français doit être influent : il s'agit à la fois de promouvoir le modèle sportif européen et de soutenir la filière sportive française dans sa conquête de marchés à l'étranger, tout en continuant à développer l'attractivité de nos structures pour favoriser les investissements de long terme dans le sport français.

En réussissant les Jeux, en fortifiant notre modèle sportif, nous serons en mesure de toucher la jeunesse. Nous voulons développer les parcours sportifs, de la maternelle à l'université. Les trente minutes d'activité physique quotidienne seront généralisées à la rentrée dans les écoles primaires et nous poursuivons la réflexion sur les deux heures de sport supplémentaires au collège, avec la volonté d'inventer de nouvelles collaborations entre les chefs d'établissement, les parents d'élèves, les collectivités territoriales, le mouvement sportif et ses éducateurs, en bonne intelligence avec les professeurs d'éducation physique et sportive (EPS).

Nous continuons à développer des passerelles entre les écoles et les clubs autour du label Génération 2024. Nous soutenons le déploiement du sport scolaire, grâce à l'Union sportive de l'enseignement du premier degré (USEP) et à l'Union nationale du sport scolaire (UNSS). Avec ma collègue Sylvie Retailleau, nous souhaitons développer la pratique étudiante. Si 70 % des étudiants veulent faire du sport régulièrement, seuls 20 % d'entre eux y parviennent, souvent dans les grandes écoles, ce qui contribue à la reproduction des inégalités. L'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche a été missionnée pour identifier les obstacles à cette pratique sportive.

Le sport a également un impact sur la santé et le bien-être de nos concitoyens. La sédentarité coûte 17 milliards d'euros par an et 25 % des Français de plus de 15 ans ne font pas encore de sport, dont deux tiers de femmes. Ils sont 48 % chez les personnes en situation de handicap. Il faut donc œuvrer au développement de la pratique sur tout le territoire grâce à différents leviers : la promotion de la pratique sportive en milieu professionnel, le design actif du mobilier urbain, le développement des équipements sportifs de proximité, grâce au programme des 5 000 équipements, ou le renforcement de l'offre loisirs des fédérations.

Nous devons développer le sport au bénéfice des malades chroniques ou des affections de longue durée en l'insérant davantage dans les parcours de soins, consolider le réseau des maisons sport-santé, accompagner le développement de l'offre de sport-santé des fédérations et agir dès la formation initiale et continue des médecins, tout en veillant à mieux reconnaître le rôle des enseignants en activité physique adaptée (APA) afin que le sport prenne toute sa place dans les politiques de prévention.

Enfin, nous devons développer l'inclusion par et dans le sport. Il faut débroussailler le maquis que constituent les plus de 1 000 diplômes permettant d'accéder à des métiers du sport. Il faut renforcer le dispositif Sésame vers l'emploi pour le sport et l'animation dans les métiers de l'encadrement (SESAME), les contrats d'engagement jeune (CEJ), l'apprentissage – au cours du précédent quinquennat, le nombre d'apprentis dans le sport a été multiplié par six –, le service civique – on compte 5 000 engagés dans le monde du sport. Les clubs sportifs peuvent constituer des lieux de rencontres entre un monde économique qui a des perspectives à proposer et des jeunes qui ont besoin d'une main tendue.

Tout cela doit s'inscrire dans une gouvernance clarifiée. C'est l'esprit de la réunion que j'ai organisée le 18 juillet dernier avec tous les acteurs, afin de repositionner le ministère des Sports dans une triple logique : orientation stratégique ; régalien ; évaluation et dialogue de gestion avec les acteurs du sport, le mouvement sportif et les fédérations.

L'Agence nationale du sport doit se focaliser sur le déploiement de ses deux programmes : Ambition bleue pour la haute performance et Impulsion sport pour la stratégie de développement. Les relations entre l'Agence et le ministère des Sports feront l'objet d'un protocole pour éviter toute ambiguïté. En outre, nous allons faire monter en puissance sa gouvernance territoriale, en installant des conférences des financeurs autour de quelques projets très structurants, dans la logique de mutualisation des moyens portée par le groupement d'intérêt public qu'est l'Agence.

La diversité des acteurs au service du sport est une force. Nous avons besoin du Parlement, des médias, des influenceurs, de la sécurité sociale, des mutuelles, de l'Union européenne. Ma volonté est claire : donner à l'écosystème du sport le sens, l'élan et l'enthousiasme indispensables à deux ans des Jeux olympiques et paralympiques de Paris.

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