Vous considérez, comme l'amendement précédent, que l'affaire est suffisamment sérieuse pour inverser le principe général du droit classique selon lequel silence vaut acceptation, pour le remplacer par le principe selon lequel silence vaut refus. Je n'y suis pas opposé, mais je reste sceptique.
Tout d'abord, il faut faire confiance aux services du ministère qui instruiront les demandes et feront remonter les cas les plus sensibles. Pour être honnête, je serais bien incapable, au moment où je vous parle, de vous donner une idée de la quantité éventuelle de dossiers à traiter ; ce qui importe, c'est d'ailleurs moins leur nombre que leur sensibilité et la difficulté de les expertiser. Le texte actuel est rédigé de telle sorte qu'il sera possible au ministre de refuser son accord sans justification poussée à l'extrême. Je ne nie pas le contentieux que cela pourra susciter, mais il me semble que cette rédaction, ainsi que les débats que nous avons eus à son propos, apporte une justification suffisante.
J'irai jusqu'au bout du raisonnement pour purger le débat : le vrai risque serait, au fond, qu'une partie de l'administration laisse les demandes sans réponse afin que celles-ci soient acceptées, par une forme de solidarité de classe. Je ne crois pas que le ministère des armées s'inscrive dans cette dynamique-là.
Il faut laisser sa chance au dispositif. Nous encadrons par la loi un phénomène qui ne date pas d'hier. Si j'étais taquin, je dirais à la représentation nationale qu'il est curieux que ce dispositif n'existe pas déjà depuis longtemps : à bien des égards, il est stupéfiant qu'on n'ait pas songé, même pendant les grandes heures de la guerre froide, à inscrire dans le droit des mécanismes de protection. Au nom du Gouvernement, je vous propose de corriger cet oubli.
Nous avons décidé d'aller plus loin en commission en étendant le dispositif au personnel civil. L'amendement à venir du Gouvernement ajoutera des critères sans lesquels cette extension ne serait pas constitutionnelle.
Je comprends ce que vous voulez faire et je ne dirai pas que vous avez tort de vouloir renverser un principe général du droit pour être plus protecteur, mais il faut laisser au dispositif le temps de s'installer. Avis défavorable, moins par désaccord que parce que je ne veux pas prendre le risque de fragiliser un dispositif que nous faisons naître alors qu'il devrait exister depuis plusieurs décennies.