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Intervention de Sabrina Sebaihi

Réunion du lundi 25 juillet 2022 à 20h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabrina Sebaihi :

Chaque année, des dizaines de milliers de personnes essaient d'accéder à notre continent, poussées à l'exil par la situation économique, sociale ou climatique de leur pays. Bien souvent, elles endurent des parcours migratoires rudes, qui les écorchent, les brisent et, pour certaines d'entre elles, les tuent, particulièrement en Méditerranée.

La réponse de l'Europe n'est pas à la hauteur : nous ne pouvons pas nous émouvoir des murs érigés aux États-Unis et construire les mêmes à nos frontières. Ces murs qui ne sont ni en briques, ni en béton, pour l'instant, sont notamment l'œuvre de l'agence Frontex, chargée du contrôle des frontières de l'Europe. Cette agence a vu son budget croître constamment : entre 2005 et 2021, il a été multiplié par 90, passant de 6 millions à 544 millions d'euros. Quand redirigerons-nous ces crédits vers une politique migratoire digne de ce nom ?

Les migrations s'amplifieront à mesure que notre monde brûle et se déstabilise. Plus de 200 millions de réfugiés climatiques sont prévus pour 2050 à cause des sécheresses, de la montée des eaux ou des températures trop élevées. Nous devons adapter nos sociétés, non les barricader.

Barricader nos sociétés, c'est également instaurer des procédures profondément injustes, comme celle de Dublin, qui assigne les réfugiés au premier pays dans lequel ils ont posé le pied, majoritairement l'Italie et la Grèce, portes d'entrée géographiques de l'Europe.

La solidarité ne doit et ne peut pas reposer sur quelques pays. Chacun doit prendre sa part : c'est un devoir d'humanité. L'Europe a les moyens d'accueillir dignement les réfugiés. Elle le démontre avec la guerre en Ukraine mais elle ne peut pas le faire à deux vitesses. On ne fuit jamais son pays de gaîté de cœur, que l'on soit européen ou non.

La France est la patrie des droits de l'homme. Elle doit prendre pleinement part à la solidarité. Madame la secrétaire d'État, quand prendrez-vous position contre la procédure Dublin, qui est inefficace et souvent prétexte à reconduire des réfugiés à nos frontières ? Quand la France manifestera-t-elle l'ambition d'adopter une nouvelle orientation politique, digne, concernant l'immigration ?

Nous vous alertons également sur la montée des idées d'extrême droite sur notre continent, à mesure que les barbelés s'y installent. La Hongrie et la Pologne font du lobbying pour installer des murs aux frontières. Ces deux pays ont érigé – ou ont le projet d'ériger – plusieurs centaines de kilomètres de murs surveillés, avec des barrières de barbelés et parfois des lames de rasoir. En janvier, plusieurs dizaines de réfugiés sont morts, bien souvent de faim ou de froid, à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne. Cela n'est pas acceptable pour notre communauté européenne, fondée notamment sur l'esprit de solidarité.

La France doit s'engager au sein de l'Union européenne en faveur d'un devoir conjoint d'humanité et d'accueil inconditionnel.

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