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Intervention de André Chassaigne

Réunion du mercredi 10 mai 2023 à 13h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Je formulerai quelques rapides observations sur le projet de loi relatif à la programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030.

Tout d'abord, les crédits ont augmenté dans des proportions considérables. Alors que la LPM pour les années 2019 à 2025 prévoyait 295 milliards d'euros de dépenses, la LPM pour les années 2024 à 2030 prévoit une somme de 413 milliards d'euros, soit une augmentation de l'ordre d'un tiers. L'effort additionnel porte pour l'essentiel sur la dissuasion nucléaire, avec un budget annuel moyen supérieur à 4 milliards d'euros. Le lancement des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de troisième génération et la construction d'un porte-avion à propulsion nucléaire de nouvelle génération posent des questions, qui ne semblent pas préoccuper le gouvernement. Ainsi, quel sera le véritable rôle de ce porte-avion au regard de son coût faramineux ? Nous sommes circonspects à l'égard de ces choix d'investissement, qui visent à renforcer la capacité de projection dans d'autres régions du monde dans le cadre de conflits extérieurs.

Ensuite, et surtout, les choix d'investissement effectués dans la LPM se font au détriment d'autres lignes budgétaires. Dans le cadre du programme SCORPION, les cibles fixées initialement sont étalées dans le temps. Sur les 300 engins blindés de reconnaissance et de combat JAGUAR, seuls 100 seront livrés après 2030. De même, le nombre de véhicules blindés GRIFFON est réduit de 1 827 à 1 573, et celui des véhicules blindés SERVAL est ramené de 2 038 à 633. Or, l'ambition du programme SCORPION ne doit pas être revue à la baisse puisqu'il s'agit d'un impératif dans la lutte contre les menaces nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC). C'est ce que j'avais souligné dans le cadre de la mission sur la défense NRBC, dont j'étais co-rapporteur. Au cours de nos travaux, le 2e régiment de dragons de Fontevraud nous avait signalé un vide capacitaire pour faire face aux menaces NRBC.

Enfin, je suis pour ma part assez dubitatif quant au risque de « guerre de haute intensité », utilisé pour justifier les différentes dépenses. Car, en effet, qui serait l'agresseur potentiel ? La Russie, qui ne parvient pas à conquérir quelques centaines de kilomètres carrés à côté de ses frontières, mettra de notre point de vue 10 à 15 ans pour reconstituer son potentiel offensif. Je doute donc que l'on puisse considérer qu'il existe un risque de guerre de haute intensité avec la Russie. Quant à la Chine, les risques sont davantage ceux de guerres localisées. Dès lors, le risque d'une guerre de haute intensité prend son sens lorsque l'on raisonne à l'échelle de l'OTAN et, surtout, que l'on se place à la remorque des États-Unis.

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