Une question porte sur la nature même du soin psychique, de l'accueil d'un patient avec une souffrance psychique et, finalement, autour de ce dispositif, un regard médical. Il faut entendre que s'il y a un refus d'entrer dans ce dispositif pour 93 % des psychologues, ce n'est pas parce qu'il n'a qu'un an d'existence ou qu'il existerait un problème de pédagogie, mais parce que la plupart le rejettent en se plaignant de ne pas avoir été entendus lors de sa mise en place. Un seul syndicat a activement participé au dispositif, les autres le refusant, et il faut entendre leurs raisons. Elles sont liées à la nature même du métier. En tant que psychologue, au bout de quatre ou cinq séances, on peut parfois percevoir des choses beaucoup plus graves et profondes. Mais, il faut attendre un an pour éventuellement avoir huit séances supplémentaires. Alors que certains évoquaient la dangerosité, ouvrir une offre et une écoute à quelqu'un pour finalement lui dire qu'on ne peut pas aller plus loin peut exposer à des situations très compliquées.
Beaucoup de médecins généralistes ne savent pas à qui adresser un patient. Lors des auditions, on a rencontré un gros problème vis-à-vis des « psycho-machins », qui sont surtout des charlatans sans formation, que les patients peuvent finalement aller voir. Le fait d'avoir un fléchage offrait une solution. Il faut aussi prendre la mesure du fait qu'un psychologue clinicien a bénéficié d'une formation de cinq ans qui, en matière de psychologie, est supérieure à un psychiatre qui n'a pas passé le même temps sur la question psy. Un psychologue est donc tout à fait en mesure de savoir si une situation est compliquée ou pas. Ce n'est pas parce qu'un trouble est de l'ordre de la psychose qu'un psychologue ne peut pas l'appréhender. Souvent, cela viendra en complément d'un traitement médicamenteux. Un trouble léger est déjà très difficile à repérer. Beaucoup de psychologues ne se sont pas sentis considérés à travers le dispositif.
Vous évoquiez le nombre de postes de psychologues créés, mais il faut prendre la mesure du fait que quand un enfant ne va pas bien, il faut attendre un an pour qu'il puisse entrer dans un dispositif. Ce n'est pas sérieux quand on voit les conséquences que cela peut avoir sur la scolarité et l'avenir d'un enfant. Plus on attend, plus les choses s'aggravent.
Quand seulement 10 % des précaires sont entrés dans le dispositif, cela montre que quelque chose ne va pas. Parmi les psychologues ayant utilisé ce dispositif, beaucoup nous ont expliqué que ce sont de jeunes actifs ayant les moyens de payer des séances qui ont principalement pu bénéficier du dispositif. Nous ratons la cible. Quelque chose ne va pas et doit être entendu.