Je suis très heureuse de vous présenter le projet de loi visant à ratifier le traité pour une coopération bilatérale renforcée entre la France et l'Italie, dit traité du Quirinal. Je salue le travail de Mme la rapporteure Eléonore Caroit, ainsi que le travail que la commission des affaires étrangères a accompli lors de l'examen du projet de loi, le 20 juillet.
Madame la rapporteure, vous l'avez dit à juste titre : signé par le Président de la République et par le Président du Conseil des ministres italien, Mario Draghi, le 26 novembre 2021 à Rome, ce traité occupe une place à part. Il scelle l'amitié profonde qui lie nos deux pays, afin de renforcer leurs liens institutionnels et d'œuvrer au rapprochement de leurs sociétés civiles.
Il s'agit du premier traité de portée générale avec l'Italie, et du premier de cette ampleur ; sa signature marquera durablement l'histoire de la relation franco-italienne. Le choix du palais présidentiel italien, sur la colline du Quirinal, pour accueillir la cérémonie de signature, a témoigné du caractère exceptionnel de l'événement, auquel ont assisté les plus hautes autorités de nos deux pays.
Le traité du Quirinal consacre une amitié de très longue date, riche d'échanges entre nos deux États, entre nos peuples, nos sociétés civiles, nos intellectuels et nos économies : tous communiquent et interagissent naturellement depuis des siècles. De la civilisation gallo-romaine à la fondation des Communautés européennes, nous partageons avec l'Italie une culture et une histoire communes, qui confèrent à notre relation bilatérale un caractère évident et inné, tellement naturel que cette relation n'avait pas, jusqu'à récemment, été investie à sa juste valeur.
Toutefois, le traité du Quirinal ne se contente pas d'entériner une relation déjà installée ; il entend ouvrir une ère nouvelle. En structurant nos échanges et nos coopérations selon un cadre institutionnel rénové, il favorisera l'émergence d'un réflexe franco-italien dans tous les domaines et à tous les niveaux de l'État et des institutions et, nous l'espérons, bien au-delà. Ce réflexe, nous l'avons déjà vu apparaître et se renforcer depuis que la volonté de signer ce traité a été formalisée. Il se traduit par des échanges réguliers et fréquents entre membres de gouvernement, mais aussi entre administrations.
L'habitude de se concerter et de travailler en commun doit nous permettre d'approfondir nos coopérations, ainsi que, et c'est essentiel, de stabiliser, dans la durée, une relation qui, nous le savons tous, a parfois connu des turbulences et des soubresauts. Ce traité doit permettre de l'ancrer profondément, dans le temps long, à l'abri des aléas politiques.
Il ne vous aura pas échappé que le traité du Quirinal se veut aussi résolument européen, par ses valeurs et par ses objectifs. Il participera à renforcer nos contributions communes au projet européen. Cette ambition partagée nous rappelle combien les convergences entre la France et l'Italie, deux pays fondateurs de l'Union européenne, constituent l'un des ciments du projet européen. Durant la présidence française du Conseil de l'Union européenne, notre voisin transalpin a ainsi été un partenaire précieux et essentiel pour atteindre les résultats qui vous ont été exposés ce matin. Toutes les coopérations bilatérales que prévoit le traité s'inscrivent également dans le cadre européen, qu'elles contribueront à renforcer, y compris par une meilleure intégration de nos territoires.
Face aux difficultés auxquelles l'Union européenne est confrontée, comme la guerre, l'Italie nous a montré qu'elle était un allié de premier plan pour défendre et renforcer notre agenda de souveraineté et d'autonomie stratégique, pour préserver l'unité européenne, et pour élaborer une réponse commune à la guerre en Ukraine. Devant tous ces défis et ceux à venir, nous entendons, plus que jamais, entretenir avec l'Italie la dynamique de confiance qui permet à nos deux pays d'être forces de proposition et de faire avancer le projet européen.
Je souhaite à présent évoquer quelques dispositions concrètes du traité, qui méritent tout particulièrement d'être mises en exergue, afin de mieux exposer nos intentions.
Tout d'abord, le traité fixe l'objectif d'approfondir notre coopération en matière de défense. Avec le retour de la guerre sur notre continent, nul ne doute de la pertinence de telles coopérations. Le traité souligne la solidarité qui lie nos deux pays en cas d'agression contre nos territoires respectifs. Certes, cette disposition est conforme aux engagements internationaux auxquels nous avons souscrit. Mais plus que cela, il s'agit d'un symbole fort, a fortiori dans le contexte international dégradé que nous connaissons, qui nous rappelle que nous devons agir ensemble pour surmonter les crises et pour défendre nos intérêts stratégiques communs, notamment en Méditerranée et en Afrique.
Deuxièmement, et pour moi c'est très important, le rapprochement de nos jeunesses constitue un autre axe fort de ce traité. Il témoigne de notre volonté de tourner notre relation vers l'avenir et constitue le meilleur gage pour y parvenir. Nous élaborerons une véritable stratégie pour favoriser des liens durables entre les jeunes Français et les jeunes Italiens, parce qu'ils sont et seront les meilleurs ambassadeurs de notre relation bilatérale. Nous créerons un service civique franco-italien, avec une mobilité croisée. En outre, nous développerons les échanges d'élèves, d'apprentis et d'étudiants. Soyez assurés que notre gouvernement, comme le gouvernement italien, prendra toute sa part à cette dynamique.
Troisièmement, dès son préambule, le traité fait de la Méditerranée un espace de coopération privilégié. Cette zone stratégique pour nos deux pays doit être au cœur de la coordination franco-italienne en matière de politique de voisinage, de développement, d'économie bleue, de sécurité et d'environnement. Elle doit aussi faire l'objet de toute notre attention, dans le cadre de la coopération bilatérale relative à la gestion de notre frontière maritime commune.
Quatrièmement, le traité prévoit que la France et l'Italie favoriseront des rapprochements équilibrés entre leurs acteurs économiques. La proximité existe déjà dans ce domaine, avec des relations intenses, mais son renforcement développera une meilleure connaissance réciproque des entreprises françaises et italiennes, favorisera la présence et le développement des industries des deux pays, notamment dans les secteurs clés de l'autonomie stratégique, comme le numérique, la transition écologique ou encore l'industrie spatiale.
Dernièrement, le traité vise à développer la coopération transfrontalière, ce qui constitue un autre objectif important. Il s'agit de favoriser la réalisation de projets concrets au bénéfice des habitants des régions frontalières, en particulier en matière de mobilité, de secours, de développement économique et de protection de l'environnement. Le texte institue un comité de coopération frontalière, inspiré du modèle franco-allemand que vous connaissez bien. Il doit permettre de soutenir des projets conjoints en levant les obstacles, réglementaires notamment liés à l'existence de la frontière.
N'ayez pas peur, je ne vais pas évoquer toutes les dispositions de ce traité extrêmement riche, car cela nécessiterait beaucoup plus que quelques minutes. Néanmoins, je souligne encore une fois que ce traité, si vous le ratifiez, sera structurant pour l'avenir de notre relation avec l'Italie. Nous nous attacherons à sa pleine exécution, notamment au profit de la population qui vit dans la zone frontalière.
Je finirai en évoquant un aspect central de la relation institutionnelle franco-italienne, qui vous intéressera particulièrement : la diplomatie parlementaire. Il est indispensable selon moi que nos deux parlements soient pleinement impliqués dans le dialogue franco-italien. Je sais que cette assemblée a déjà œuvré à structurer ses relations avec la Camera dei deputati, et je m'en réjouis. Je salue également les échanges de part et d'autre des Alpes entre groupes d'amitié parlementaires. Je suis convaincue qu'ils seront à nouveau de grande qualité pendant la XVI