Monsieur le ministre, votre titre – ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion – couvre trois missions sur lesquelles on peut dresser plusieurs constats.
En tant que ministre du travail, vous êtes le garant du droit du travail. Or celui-ci est à l'origine de souffrances pour des millions de Françaises et de Français. Le travail tue plus en France que dans les autres pays européens. Vous continuez néanmoins de rogner continuellement sur les protections et les acquis des travailleurs et des travailleuses.
En tant que ministre du plein emploi, vous annoncez un taux de chômage qui serait au plus bas, cet indicateur approchant 5 %, du moins dans vos tableurs Excel. Rappelons ce qu'est un chômeur au sens du Bureau international du travail : c'est peut-on lire sur le site du ministère, une personne en âge de travailler, sans emploi et disponible pour prendre un emploi dans les quinze jours. Une personne ayant travaillé une heure le mois dernier n'est donc pas un chômeur, de même qu'une personne qui ne serait pas disponible pour occuper un emploi dans un délai de quinze jours. Avec cette méthode, il semble facile d'atteindre le plein emploi, un plein emploi mensonger où se mêlent précarité et exclusion pour les plus fragiles.
Enfin, en tant que ministre de l'insertion, là aussi, votre politique, avec une insertion fondée uniquement sur l'apprentissage, est un échec. La Cour des comptes note que « l'essentiel des nouvelles places créées a profité aux élèves capables de suivre un cursus long et a peu bénéficié aux publics vulnérables ». Bref, on insère des personnes déjà insérées et on laisse les autres au bord de la route. Cette politique a bien un effet : en mettant au travail des personnes qui devraient être en formation, vous faites baisser la productivité française. Cette productivité du travail, qui constituait pourtant l'un de nos principaux atouts, est en chute libre. En trois ans, la productivité horaire a chuté de 3,6 % – même logique, même résultat lorsqu'on pousse les chômeurs à créer des entreprises qui ne produisent rien pour pouvoir les expulser des statistiques du chômage. Il est donc urgent de réagir pour retrouver cette productivité horaire qui a fait notre force durant des années, et qui aujourd'hui s'effondre. Est-ce en mettant à contribution les corps usés, abîmés, par le travail des seniors âgés de 62 à 64 ans, que vous souhaitez enrayer cet effondrement de la productivité ?