Nous avons l'honneur d'accueillir Patrick Lefas, président de l'organisation non gouvernementale (ONG) Transparency International France.
Notre commission d'enquête a d'une part, pour objet d'identifier l'ensemble des actions de lobbying menées par Uber pour pouvoir s'implanter en France et le rôle des décideurs publics de l'époque et d'émettre des recommandations concernant l'encadrement des relations entre décideurs publics et représentants d'intérêts ; d'autre part, pour ambition d'évaluer les conséquences économiques, sociales et environnementales du développement du modèle Uber en France et les réponses apportées et à apporter par les décideurs publics en la matière.
Au cours de nos travaux, nous avons évoqué à maintes reprises les questions éthiques et déontologiques dans les rapports entre les entreprises du secteur privé et les décideurs publics, le rôle des registres de déclaration des représentants d'intérêts et les contrôles réalisés par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).
Dans la mesure où Transparency International contribue à la lutte contre la corruption et prône la transparence du lobbying, la prévention des conflits d'intérêts, la protection des lanceurs d'alerte et l'indépendance de la justice, votre point de vue nous est apparu essentiel. Nous souhaitons connaître tout d'abord votre perception sur les révélations des Uber files. En effet, à partir du 10 juillet 2022, plusieurs membres du consortium international des journalistes d'investigation ont publié ce qu'il est désormais convenu d'appeler les Uber files : s'appuyant sur 124 000 documents internes à l'entreprise américaine datés de 2013 à 2017, cette enquête a dénoncé un lobbying agressif de la société Uber pour implanter en France, comme dans de nombreux pays, des véhicules de transport avec chauffeur (VTC) venant concurrencer le secteur traditionnel du transport public particulier de personnes réservé jusqu'alors aux taxis.
Ces documents montrent que l'entreprise a pu avoir accès aux décideurs publics de l'époque pour défendre sa perspective et ses intérêts. Au-delà des Uber files, notre commission d'enquête s'interroge sur le dispositif actuel d'encadrement des activités de lobbying des entreprises auprès des décideurs publics. Depuis les faits relatés dans les Uber files, la législation a changé : je pense ici à la « loi Sapin 2 » et à la mise en place de la HATVP. Quelles sont vos éventuelles recommandations pour améliorer le dispositif ? Existe-t-il, en Europe ou en Amérique du Nord, des exemples à suivre en la matière ?
Je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et retransmise en direct sur le site internet de l'Assemblée nationale et que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes entendues par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».