Intervention de Nicolas Schmit

Réunion du jeudi 11 mai 2023 à 14h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Nicolas Schmit, commissaire européen à l'emploi et aux droits sociaux :

J'ai échangé avec une trentaine de plateformes. J'ai récemment rencontré le président directeur général d'Uber : il a tenté de me convaincre de l'approche que vous évoquez, en insistant sur la nécessaire flexibilité du fonctionnement des plateformes – tout en se disant favorable à la protection des travailleurs. Ces plateformes ne veulent pas se soumettre aux règles du droit du travail ou de la protection sociale mais préfèrent les assurer elles-mêmes dans le cadre du dialogue social. On peut donc y voir une forme de tiers statut même si personne ne le dit.

La question se pose pourtant dans des termes simples : soit il y a subordination – et, alors, il s'agit bien d'une relation salariale ; soit il n'y en a pas, et le travailleur est indépendant. Nous n'allons pas jeter aujourd'hui aux orties un droit du travail qui a été construit au fil des décennies pour plaire aux plateformes. Le grand danger, c'est que cette casse des acquis du droit du travail ne s'arrêtera pas aux plateformes comme Uber ou Deliveroo mais qu'elle risque de faire école : si une voie permet d'échapper aux cotisations sociales, de nombreux secteurs s'engouffreront dans cette brèche, par exemple la santé, la construction, l'hôtellerie ou le nettoyage, ce qui risquerait de créer une sorte de salariat de troisième zone, avec moins de droits, accordés selon le bon vouloir de chaque plateforme. Il faut donc absolument arrêter ce mouvement, qui aurait de graves conséquences sur les travailleurs, et qui, à terme, posera un immense problème à notre système de protection sociale si des pans entiers de l'économie cessent de cotiser ou cotisent moins. Cette présentation est biaisée et il ne faut pas l'accepter.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion