C'est sous la présidence française que le gaz et le nucléaire auront rejoint la taxonomie verte. De même, la taxe carbone aux frontières, un de vos totems politiques, ne sera effective qu'en 2036 alors même que le secteur de l'industrie n'a pas vu baisser ses émissions de gaz à effet de serre depuis 2012.
Avec vous, nous assistons à la mise en place d'une transition écologique à plusieurs vitesses où les laissés-pour-compte risquent d'être nombreux. Vous favorisez ceux qui devraient réduire leurs émissions mais qui pourront négocier ou payer pour déroger aux règles. Je pense à l'amendement Ferrari : alors que l'Union européenne a acté la fin des moteurs thermiques en 2035, le rythme sera un peu plus tranquille pour les voitures de luxe de plus de 200 000 euros. Je déplore également le prolongement du traité sur la charte de l'énergie, un texte obscur et climaticide auquel on reste tragiquement attaché alors qu'il protège les investissements fossiles, offre une assurance vie aux entreprises énergétiques et menace nos objectifs climatiques.
Enfin, concernant la sobriété énergétique, la Commission européenne souhaitait que nos ambitions soient revues à la hausse, défendant une baisse de notre consommation d'énergie de 13 %. Mais la France a organisé la relance des énergies fossiles et maintenu une baisse à 9 %. Évidemment, si l'on ne s'appuie sur rien d'autre que le fait de demander à nos commerçants de fermer les portes de leurs magasins, nous n'irons pas très loin.
En outre, alors que cette même Commission européenne nous demande de réduire de 15 % notre consommation de gaz, vous n'actionnez pas le levier de la sobriété mais celui de la dépendance auprès de pays peu scrupuleux en matière de droits de l'homme. Vous ne participez pas à l'effort collectif européen en solidarité avec les autres États membres de l'Union. Finalement, vous usez de vieilles recettes qui ne fonctionnaient déjà pas dans l'ancien monde et persistez malgré les profondes mutations en cours – qu'il s'agisse de la crise sanitaire ou de la guerre en Ukraine.
L'Union européenne est une échelle fondamentale pour agir. La présidence était l'occasion de mener une action qui aurait redonné du sens au projet européen. Mais la France, État membre – et fondateur – de l'Union, n'a pas fait ce choix.