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Intervention de Jean-Paul Lecoq

Séance en hémicycle du jeudi 28 juillet 2022 à 9h00
Déclaration du gouvernement relative au bilan de la présidence française de l'union européenne

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Tirer un bilan de la présidence française du Conseil de l'Union européenne relève de l'impossible tant l'ambition du candidat-président Emmanuel Macron était démesurée, cela même si la guerre sur notre continent n'était pas advenue. Quelle hypocrisie de la part d'Emmanuel Macron de laisser croire qu'en l'espace de six mois l'Europe deviendrait « pleinement souveraine », qu'elle créerait un nouveau modèle européen de production, de solidarité et de régulation et disposerait d'institutions européennes proches des gens ! La vérité est bien moins impressionnante. En réalité, une présidence de Conseil de l'Union européenne consiste à faire avancer les dossiers des précédentes présidences et d'en proposer quelques autres. On fait peu de choses en un semestre ! D'ailleurs, si l'on ne tient compte que des directives ayant abouti sous la présidence française, le bilan n'est pas aussi brillant que vous venez de l'affirmer, madame la secrétaire d'État.

Parlons de la directive relative aux salaires minimum : dans les faits, elle n'impose pas aux États d'instaurer un salaire minimal mais propose soit, si un salaire minimum existe, d'évaluer si son montant est suffisant pour assurer un niveau de vie décent – très important ! –, soit de créer un salaire minimum reposant sur la moitié du salaire mensuel moyen brut du pays concerné. En France, le salaire mensuel moyen brut est de 3 183 euros. Selon les recommandations de la directive, cela donnerait donc un SMIC à 1 591 euros bruts, soit 50 euros de moins que notre SMIC actuel. Or les députés communistes, comme ceux des différentes composantes de la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, considèrent que le SMIC actuel ne permet pas de vivre décemment et proposent de le relever à 1 923 euros bruts, soit un salaire net mensuel de 1 500 euros. Les travailleurs européens méritent donc bien mieux que cette directive !

L'autre échec est celui de la fiscalité des entreprises : depuis l'accord obtenu sous l'égide de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) visant à instaurer un taux d'imposition mondial sur les entreprises de 15 %, rien n'a bougé. La France n'a pas avancé sur ce dossier, pourtant utile dans la lutte contre la fraude fiscale et l'amélioration des finances publiques.

Notons également l'échec des négociations sur la directive relative à la transparence salariale, qui vise à lutter contre les écarts de salaires entre les femmes et les hommes.

Voilà déjà trois sujets qui auraient mérité qu'on y consacre plus d'énergie ! Mais si les sujets sociaux n'ont pas été traités comme il se devait, d'autres, en revanche, ont bien avancé durant la présidence française. Ils concernent non pas les salariés, mais les très grandes entreprises !

Prenons l'accord de libre-échange signé avec la Nouvelle-Zélande. Validé le dernier jour de la présidence française, il libéralise le commerce avec un pays situé à 20 000 kilomètres de nos frontières. Il affaiblira notre secteur agricole en permettant aux agriculteurs néo-zélandais d'exporter vers l'Union européenne des quotas très importants de produits, sans qu'aucune clause miroir ait été prévue – contrairement à ce que vous affirmez, madame la secrétaire d'État –, c'est-à-dire sans obliger les produits importés à respecter les mêmes normes que ceux que nous produisons au sein de l'Union européenne. Emmanuel Macron avait pourtant promis d'en intégrer dans les futurs accords. C'est raté !

Durant la même période, l'accord modernisé de libre-échange avec le Mexique a également très bien avancé ! Enfin, le fameux Traité sur la charte de l'énergie (TCE) n'a pas non plus été remis en cause, malgré les alertes très claires émanant de nombreuses organisations de la société civile sur la menace qu'il fait peser sur la capacité des États à mener leurs propres politiques de transition énergétique.

L'Union européenne défendue par Emmanuel Macron a également protégé tous les profiteurs de crise qui pullulent depuis quelques mois, à commencer par le secteur pharmaceutique. Au lancement de la présidence française de l'Union européenne, il était question de faire du vaccin contre la covid-19 un bien public mondial, afin de le distribuer massivement aux États qui ne disposent pas des finances nécessaires pour l'acheter. Alors que dans les pays pauvres moins d'un habitant sur cinq a été vacciné ne serait-ce qu'une seule fois, rien n'a été fait.

L'Union européenne et l'Organisation mondiale du commerce (OMC) se sont satisfaits d'un accord sur la levée temporaire des brevets, qui est totalement creux et ne résoudra en aucune manière les vrais problèmes de fond que seule la levée totale des brevets sur les vaccins aurait permis de régler.

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