Intervention de Philippe Pradal

Séance en hémicycle du mercredi 27 juillet 2022 à 15h00
Prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Pradal :

La première CMP de la XVIe législature, sur la présente proposition de loi, a été conclusive, comme d'autres qui l'ont suivie. Le groupe Horizons et apparentés en prend acte avec satisfaction. Le désaccord qui demeurait avec le Sénat ne portait que sur un point de procédure.

Grâce notamment à l'action d'Aude Bono-Vandorme, ce texte vise à lutter plus efficacement contre la propagation des contenus terroristes en ligne, en France et dans l'Union européenne.

Les terroristes utilisent les médias sociaux et le dark web pour radicaliser, recruter, inciter à la violence et pour faciliter la commission d'attentats. Pour déjouer les manœuvres de ces criminels sur internet, l'Union européenne a adopté, en avril 2021, un règlement relatif à la lutte contre la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne. Ces nouvelles règles s'appliquent depuis le 7 juin 2022.

Cette proposition de loi était néanmoins nécessaire pour habiliter l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique à émettre l'injonction de retrait transfrontalière que prévoit le règlement ; pour préciser les sanctions pénales applicables à l'encontre des fournisseurs d'hébergement qui ne respecteraient pas l'obligation de retrait des contenus à caractère terroriste ; pour définir des sanctions administratives et pécuniaires en cas de non-respect des obligations de diligence ; pour prévoir les voies de recours dont ils disposent dans le cadre d'une injonction de retrait.

Nice, comme tous les territoires frappés par le terrorisme – je salue avec émotion toutes les victimes, leurs proches et ceux qui les accompagnent –, sait les ravages causés par des radicalisés en ligne, hors de tout contrôle, l'esprit distordu par des discours de haine et de manipulation.

Le Gouvernement l'a souligné la semaine dernière devant le Sénat, les services antiterroristes ont fait l'objet d'un effort sans précédent : 1 900 postes ont été créés depuis 2017 ; les budgets d'investissement et de fonctionnement ont été renforcés ; ceux de la DGSI, la direction générale de la sécurité intérieure, ont doublé depuis 2015. S'y ajoute la création du parquet national antiterroriste en 2019, qui permet à la France de disposer d'une force de frappe judiciaire antiterroriste spécialisée. Plus récemment encore, un pôle national de lutte contre la haine en ligne a été constitué au tribunal judiciaire de Paris en janvier 2021 ; il est le pendant judiciaire de la plateforme de signalement PHAROS.

Afin de lutter contre le terrorisme en ligne, les services de renseignement disposent, depuis la loi du 30 juillet 2021 relative à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement, de nouveaux moyens de contrôle comme les algorithmes. Cette loi autorise le traitement automatisé des données de connexion et de navigation sur internet, grâce à la coopération des fournisseurs d'accès et à l'utilisation des adresses URL de connexion. L'adoption lors de l'examen en commission d'un amendement des rapporteurs, Loïc Kervran et Raphaël Gauvain, a d'ailleurs imposé au Gouvernement de remettre au plus tard le 31 juillet 2024 un premier bilan sur la surveillance des URL, afin de renforcer le contrôle parlementaire dans le cadre de l'utilisation des algorithmes par les services de renseignement. Il appartiendra à la XVIe législature de connaître de ce bilan et d'améliorer éventuellement les dispositifs existants.

Ce texte s'inscrit donc bien dans la continuité de l'action menée par les pouvoirs publics. La lutte contre le terrorisme est et doit être protéiforme, mais l'usage des outils numériques constitue le principal média de diffusion de ces idées mortifères, d'où l'intérêt de ce règlement et de cette proposition de loi. Selon la formule du commissaire européen Thierry Breton, il faut s'assurer que « Tout ce qui est interdit offline » le soit également « online ».

Le groupe Horizons et apparentés considère que les dispositifs normatifs de lutte contre la diffusion des contenus à caractère terroriste sont indispensables. Néanmoins, s'il est important de renforcer l'arsenal juridique, il faudra en parallèle armer les usagers d'ordinateurs, c'est-à-dire tous les Français.

Dans cet esprit, un article de la loi « contre le séparatisme » a inscrit dans le code de l'éducation qu'« À l'issue de l'école primaire et du collège, les élèves reçoivent une attestation certifiant qu'ils ont bénéficié d'une sensibilisation au bon usage des outils numériques et des réseaux sociaux ainsi qu'aux dérives et aux risques liés à ces outils. » Les mesures de cette nature peuvent paraître anodines, pourtant elles sont fondamentales si elles sont mises en œuvre sérieusement. L'éducation reste la meilleure alliée dans une stratégie de lutte sur le long terme contre l'obscurantisme et la violence. Comme l'écrit Victor Hugo : « L'ignorance est la nuit qui commence l'abîme. »

Le groupe Horizons votera ce texte, qui permettra le retrait en une heure de contenus terroristes en ligne. La procédure est encadrée juridiquement ; les droits et libertés fondamentaux sont garantis.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion