Toulouse, Bruxelles, Paris, Copenhague, Saint-Étienne-du-Rouvray, Stockholm, Prague, Manchester, Trèbes, Munich, Nice : les attentats qui ont dramatiquement endeuillé la France et l'Europe depuis 2015 nous ont fait prendre conscience du développement exponentiel de l'utilisation des réseaux sociaux et d'internet par les terroristes. L'appel au djihad, l'apologie du terrorisme, l'enrôlement des recrues, tout ou presque se passe en ligne. Les terroristes se sont approprié ces espaces pour en faire des instruments de leurs funestes desseins.
Les plateformes ont une grande responsabilité dans la régulation de ces diffusions, mais nous devons aussi les rappeler à leurs obligations et encadrer leur action pour protéger nos concitoyens des contenus à caractère terroriste, tout en préservant leur droit à la libre expression et à l'information.
C'est précisément ce à quoi s'attaque le règlement européen du 29 avril 2021, dit règlement TCO, relatif à la lutte contre la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne, que nous intégrons pleinement au droit français grâce à cette proposition de loi. Dans ce domaine comme dans de nombreux autres, nous sommes plus forts unis, et nos actions sont plus efficaces si elles sont concertées avec nos voisins. C'est pourquoi je me réjouis que nous ayons pu, en Européens, parvenir à un accord sur les obligations qui doivent peser sur les plateformes en matière de diffusion de contenus à caractère terroriste.
Ce travail devra évidemment se poursuivre grâce au Digital Services Act, auquel notre pays a grandement contribué à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne. Certaines dispositions de ce règlement figurent déjà dans notre législation, grâce notamment à toutes les mesures que nous avons adoptées ces dernières années à travers divers textes. Le présent texte nous permet d'adopter certaines dispositions afin d'assurer la pleine effectivité du règlement TCO, qui est d'application directe sur le territoire français. Je pense notamment à la possibilité d'enjoindre aux plateformes le retrait dans l'heure des contenus à caractère terroriste dont nous confions la responsabilité à l'ARCOM.
Nous avons aussi pu introduire des sanctions pénales et administratives, essentielles pour garantir le respect des obligations formulées dans cette proposition de loi. Le non-respect des injonctions de retrait est puni d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 1,250 million d'euros pour une personne morale. Si l'infraction est commise de manière habituelle, le montant de l'amende encourue peut aller jusqu'à 4 % du chiffre d'affaires mondial. Il en est de même dans le cas des sanctions administratives qui peuvent être prononcées par l'ARCOM.
Cette proposition de loi, certes plutôt technique, a fait l'objet d'un consensus assez large entre nos deux chambres, et la commission mixte paritaire a débouché sur un accord permettant d'aboutir à un dispositif équilibré. En effet, dans l'article unique, la CMP a précisé que la procédure inscrite dans ce texte s'applique sans préjudice de la faculté de saisir le juge en référé liberté ou en référé suspension devant le Conseil d'État. Cette importante précision permettra d'obtenir une décision très rapide en cas d'atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'expression, à laquelle nous sommes tous fortement attachés.
Chacune des deux chambres a aussi fait un pas vers l'autre pour aboutir à un accord sur la procédure devant la cour administrative d'appel : le délai d'appel sera de dix jours et le délai de jugement d'un mois à compter de la saisine. Là encore, c'est un bon compromis, équilibré et efficace.
Le groupe Démocrate se réjouit naturellement de l'accord trouvé lors de la CMP, qui répond aux attentes de beaucoup d'entre nous et aux objectifs affichés dans la lutte contre les contenus terroristes en ligne. Il est une pierre importante de l'édifice que nous bâtissons inlassablement contre le fanatisme et le terrorisme.